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À Dreux en 1983, la télé a tenté de déconstruire les préjugés sur l'immigration

À Dreux en 1983, la télé a tenté de déconstruire les préjugés sur l'immigration

Dimanche 13 octobre sur BFM, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé la volonté du gouvernement de porter une nouvelle loi immigration dès janvier 2025. Certains y voient des gages en direction l'extrême droite. Retour en 1983, à l'époque Dreux avait été la première ville remportée par le FN, avec en ligne de mire les immigrés.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 14.10.2024
Dreux : micro trottoir sur l'immigration - 1983 - 05:31 - vidéo
 

L'ACTU.

Dimanche 13 octobre 2024 sur BFMTV, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a annoncé la volonté du gouvernement de travailler sur une nouvelle loi immigration dès janvier 2025. Il s'agira de la 33e loi sur ce sujet depuis 1980. Cette annonce intervient un an après la promulgation de la précédente loi immigration en janvier 2024 dont certains décrets ne sont toujours pas passés. Elle avait enflammé les débats à l'Assemblée, avant d'être retoquée en partie par les Sages du Conseil constitutionnel.

Selon la place Beauvau, les mesures écartées par le Conseil constitutionnel devraient servir de base à un nouveau texte ainsi que la création d’un délit de séjour illégal. D'autres sujets devraient également revenir : la transformation de l’aide médicale d’État (AME) en aide médicale d’urgence, la suppression de la circulaire Valls autorisant 30 000 régularisations par an sur des critères d'activité et de vie familiale, et l’allongement de la détention en centre de rétention qui passerait de 90 jours à 210.

À l’heure où le Rassemblement national n’exclut pas une censure, certains commentateurs voient dans cette annonce des gages en direction de l'extrême droite qui dénonce depuis des décennies les privilèges alloués aux immigrés. L'occasion de revenir sur une date-clé : 1983. Cette année-là, pour la première fois, le Front national remportait une élection, en l’occurrence les élections municipales de Dreux, avec un discours axé sur le rejet des immigrés.

Ce résultat avait été tellement inattendu que la télévision allait tenter de comprendre pourquoi les électeurs du FN étaient si obsédés par la question migratoire dans une ville où l'immigration était anecdotique.

LE CONTEXTE.

À partir des années 1960, avec le développement économique du pays, la France fait appel à une main d’œuvre étrangère, souvent d'origine maghrébine, avec un pic au début des années 1970. À l'époque, les Trente Glorieuses s'achèvent mais la crise n'a pas encore frappé. Les Français, conscients du manque de travailleurs, notamment dans le bâtiment, semblent accepter cette main d’œuvre étrangère jugée indispensable. Peu d'animosité dans la population, certains pointent la propension des Français à refuser les travaux difficiles. C'est le cas dans le micro-trottoir ci-dessous réalisé à Dunkerque en juin 1971.

« S'il y a des chômeurs français, c'est parce qu'ils le veulent bien », « Ils font le travail que les Français ne veulent pas faire »....

En 1974, la crise pétrolière bouleverse l'équilibre économique. L'émergence des déficits chroniques et l'augmentation du chômage vont balayer le statu quo. L'époque coïncide avec l'apparition du Front national fondé en octobre 1972 par Jean-Marie Le Pen dont le discours se résume en une phrase qu'on peut résumer ainsi : les migrants prennent le pain et le travail des bons Français de souche et il faut les renvoyer chez eux. Un discours et des boucs-émissaires qui ne varieront plus.

L'ARCHIVE.

Onze ans plus tard, le FN remportait sa première victoire dans les urnes et la mairie de Dreux. Jean-Pierre Stirbois, qui conduisait la liste du Front national, venait d'obtenir 16,7% des suffrages. C'était le score le plus élevé jamais obtenu par le FN. Une victoire assez inédite pour que le grand magazine d'enquête « Résistances » se rendait sur place pour tenter de comprendre ce qui avait motivé la population à voter à l'extrême droite.

Cette poussée inédite de l'extrême droite reposait en grandes parties sur son discours anti-immigration, déjà bien rôdé et visiblement parfaitement intégré par les Drouais et Drouaises. Le magazine télévisé « Résistances » allait tenter de décrypter ce succès électoral et de confronter les habitants, visiblement obsédés par la question migratoire, à l’objectivité des statistiques.

Données chiffrées

L'archive disponible en tête d'article date du 6 octobre 1983, son originalité réside dans sa manière de déconstruire le discours porté par les tenants du FN. Il s'agit de l'un dès tout premiers reportages de «fact checking » de la télé, joliment appelé «sottisier» par le journaliste. Il s'agit d'un mix alternant un micro-trottoir et des infographies. Chaque assertion est confrontée à une objection sourcée, datas à l'appui.

Les personnes interviewées expriment leurs idées reçues sur l'immigration, témoignant d'un racisme ordinaire souvent inconscient. Les contre-arguments avancés concernent le nombre d'immigrés en France, les cotisations perçues, les allocations familiales, les soins hospitaliers, la main d’œuvre, et l'insécurité. Ce micro-trottoir s'achève sur une note d'espoir avec la réponse d'un enfant à la question suivante : « Si on les renvoyait chez eux, qu'est-ce que ça ferait ? ». Réponse : « On les a pris, autant les garder ».

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