Deux études précédentes réalisées avec l'organisation PFDM (Pour les femmes dans les médias) ont permis de démontrer que :
- entre 2008 et 2018, seuls 12 % des réalisateurs des fictions diffusées sur les chaînes de télévision étaient des réalisatrices, et les personnages féminins parlaient près de moitié moins que les hommes.
- de la création à la production, les femmes occupent en moyenne 38 % des postes-clés des séries et téléfilms français diffusés en prime time sur un an et qu’elles sont notamment sous-représentées dans les postes techniques et « de pouvoir ».
Pour ce qui concerne le documentaire, l’INA est en mesure de révéler les chiffres de la diffusion de documentaires à la télévision sur les 20 dernières années. Pour cela, nous avons analysé les premières diffusions (c’est-à-dire que nous ne nous sommes pas intéressés aux rediffusions, qui peuvent aussi comporter des biais de genre) de documentaires sur les années 2002 à 2022, sur les chaines hertziennes historiques (de TF1 à M6). Au total, cela représente 33 000 documentaires et 25 000 réalisateurs et réalisatrices :
Premier constat : les hommes sont bien plus représentés dans la profession : sur les 25 000 réalisateurs et réalisatrices, on a 70% d’hommes, et donc 30% de femmes. Le métier de documentariste consistant à porter et à partager un regard sur le monde, on voit que ce regard est genré. En plus de cette forte disparité dans les effectifs de la profession, on note que les projets sont plus souvent confiés à des hommes. De fait, sur 20 ans, les œuvres diffusées sont réalisées par trois fois plus d’hommes que de femmes, les documentaires réalisés par des femmes ne représentent que 25% des diffusions.
Sur 20 ans, on remarque une lente et légère amélioration, même si on est encore loin de la parité : les 5 dernières années montrent un taux de réalisatrices croissant et les deux dernières années analysées, 2020 et 2021, sont les deux meilleures années de la période avec respectivement, 30% et 33% de réalisatrices (on en dénombrait 21% en 2002).
Comme le montre le graphique ci-dessus, pour ce qui est de la réalisation, la part des femmes demeure extrêmement faible. Comme pour les fictions, la réalisation est le plus fréquemment (dans 54% des cas) confiée à un homme seul, alors que ce n’est le cas pour une femme seule que dans moins de 20% des cas. Les documentaires diffusés sont réalisés par des groupes d’hommes dans 14% des cas, par des groupes mixtes dans 9% cas, et par plusieurs femmes… dans moins de 2% des cas.
Notre étude montre également que les thématiques de documentaires réalisés par des femmes sont très typiques des rôles sociaux qu’on souhaite leur imposer. Les quatre catégories parmi lesquelles on trouve le plus de femmes réalisatrices sont :
- Philosophie (67% de réalisatrices)
- Psychologie (60% de réalisatrices)
- Éducation-pédagogie (50% de réalisatrices)
- Médecine-santé (47% de réalisatrices)
Enfin, le service public, dont Arte, est globalement très proche de la moyenne de 25%. On note que la chaine qui diffuse le plus de documentaires de femmes est M6 et que TF1, le plus « mauvais élève » ne compte qu’une seule femme réalisatrice pour 9 réalisateurs hommes.
La table ronde est préparée et animée par Patricia Boutinard Rouelle (Nilaya productions, ex-Directrice des Documentaires du Groupe France Télévisions) :
- Agnès Chauveau, Directrice générale déléguée, INA
- Bouchera Azzouz, Autrice, documentariste, essayiste, femme politique et militante féministe française
- Christine Cauquelin, Groupe Canal+, Directrice des Chaînes "Découvertes" et des documentaires
- Fabrice Puchault, Arte, Directeur de l'unité Société / Culture
- Claire Lajeunie, L2 Film productions, ex-« Envoyé spécial » , « Des Racines et des Ailes », « Zone Interdite »
- Audrey Ismael, Musicienne compositrice, Prix de la Meilleure Musique 2019 au Festival de la Fiction TV de la Rochelle pour la série Les Grands
- Félicie Roblin, Zadig Productions & Zadig Films, Vice-présidente de la Commission Télévision de la Procirep