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France - Israël : ce que les archives disent de 75 ans de relations diplomatiques

France - Israël : ce que les archives disent de 75 ans de relations diplomatiques

Samedi 5 octobre 2024, le président français Emmanuel Macron a appelé à arrêter les livraisons d'armes à Israël, provoquant la colère du premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. Un froid dans les relations entre les deux États qui ne devraient pas effacer 75 ans de relations diplomatiques.

Par Romane Laignel Sauvage - Publié le 09.10.2024
 

« La France a été l’un des premiers pays à établir des relations diplomatiques avec Israël, le 11 mai 1949 », rappelle le ministère des Affaires étrangères français. Avant d'ajouter : « La France a établi une relation bilatérale solide avec Israël, marquée par un soutien constant à l’existence de cet État. » Une fois dit cela, il convient d'ajouter que la France soutient également et historiquement une solution à deux États au Proche-Orient, Israël et la Palestine. Et ce, notamment, depuis le discours de François Mitterrand à la Knesset en 1982.

Une position officielle qui masque mal toutefois une relation bilatérale faite de hauts et de bas. Retour en archives sur le rapport entre la France et Israël depuis sa création.

LES ARCHIVES.

« La Ve République s'était dégagée vis-à-vis d’Israël des liens spéciaux et très étroit que le régime précédent avait noué avec cet État. » La France avait reconnu Israël un an après sa création, en 1949. Dans le contexte d'une France cherchant à garder son influence géopolitique historique.

Les deux pays vont même, au lendemain du fiasco de la crise de Suez en 1956, coopérer pour qu'Israël obtienne la bombe atomique. Ce que résume l'historien Pierre Razoux dans son article Israël et la dissuasion nucléaire : « Paris construit clé en main l’usine nucléaire de Dimona, dans le désert du Néguev, puis se désengage au début des années 1960, suite aux injonctions du général de Gaulle qui sait désormais pouvoir compter sur une arme atomique française opérationnelle, et qui souhaite se démarquer d’Israël pour promouvoir la nouvelle politique arabe de la France. Les États-Unis d’Amérique prennent alors le relais et encadrent de près le programme nucléaire militaire israélien ».

Ce revirement sur le nucléaire est le reflet d'un mouvement plus large, amorcé par Charles de Gaulle et renforcé après la fin de la guerre d'Algérie. Il cherche notamment à renforcer les liens de la France avec les pays arabes.

1967, un tournant dans les relations franco-israéliennes

Même si, une fois au pouvoir, Charles de Gaulle entretient des relations normales avec Israël, la rupture est consommée en 1967, après la guerre de six jours et un discours perçu comme antisémite par une partie de l'opinion publique française et israélienne. Celui-ci est disponible en tête d'article.

En voici un extrait : « Certains redoutaient que les Juifs, jusqu’alors dispersés, mais qui étaient restés ce qu’ils avaient été de tout temps, c’est-à-dire un peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur, n’en viennent, une fois rassemblés dans le site de leur ancienne grandeur, à changer en ambition ardente et conquérante les souhaits très émouvants qu’ils formaient depuis dix-neuf siècles : l’an prochain à Jérusalem. »

Charles de Gaulle y résume son analyse de la politique extérieure israélienne et les grandes orientations de la France vis-à-vis du Proche-Orient : « Depuis 1956, a la faveur de l'expédition franco-britannique de Suez, on avait vu apparaitre en effet un etat d’Israël guerrier et résolu à s'agrandir. Et, ensuite l'action qu'il menait pour doubler sa population par l'immigration de nouveau éléments, donnait à penser que le territoire qu'il avait acquit ne lui suffirait pas longtemps et qu'il serait porté pour l'agrandir à utiliser toute occasion qui se présenterait. C'est pourquoi d'ailleurs la Ve République s'était dégagée vis-à-vis d’Israël des liens spéciaux et très étroit que le régime précédent avait noué avec cet état. Et la Ve république s'était appliquée au contraire à favoriser la détente dans le Moyen-Orient. Bien sûr, nous conservions avec le gouvernement israélien des rapports cordiaux et même lui fournissions pour sa défense éventuelle les armements ».

Enfin, il assurait condamner l'incursion israélienne lors de la guerre de six jours, justifiant l'embargo sur les armes décrété avant le conflit. Et dénonçait : « Maintenant, il [Israël, ndlr] organise sur les territoires qu'il a pris, l'occupation qui ne peut aller sans oppression, répression, expulsion. Il s’y manifeste contre lui la résistance, qu’à son tour, il qualifie de terrorisme ».

1967 est un tournant et pousse Israël à renforcer d'autres alliances, notamment avec les États-Unis.

Après le retrait de Charles de Gaulle du pouvoir, ses successeurs poursuivent une politique similaire. En 1974, l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) obtient le statut d'observateur à l'ONU grâce au vote de plusieurs pays, dont la France.

1982, François Mitterrand en Israël

En 1982, le socialiste François Mitterrand est le premier président français de la Ve république à se rendre en Israël, signe de sa volonté de renouer avec le pays. Il prononce un discours historique devant la Knesset, le parlement israélien. Il y rappelle l’amitié franco-israélienne, mais aussi la position historique de la France pour une solution à deux États dans le conflit avec les Palestiniens.

Les relations entre la France et Israël restent en dents de scie, en fonction du contexte géopolitique et de la situation avec les autorités palestinienne. En 1996, un incident au cours du voyage de Jacques Chirac en Israël lui faisait gagner en popularité dans le monde arabe. En témoigne l'archive ci-dessous.

Le déclenchement de la seconde intifada en 2000 dégrade rapidement les relations d'Israël et la France. Ce n'est qu'après la mort de Yasser Arafat en 2004 puis la visite officielle d'Ariel Sharon en 2005 que les deux pays renouent contact. Comme on l'entend dans l'archive ci-dessous, « la visite en France entamée hier par Ariel Sharon marque bien le rapprochement entre les deux pays ».

Depuis, les relations bilatérales des deux pays sont restées similaires. Le dialogue n'est évidemment pas rompu, mais il reste difficile, notamment lorsqu'Israël bombarde au Liban (2006 ou 2024), un pays historiquement soutenu par les Français.

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