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2015 : Derrière le discours officiel, les difficultés du système de santé nord-coréen

2015 : Derrière le discours officiel, les difficultés du système de santé nord-coréen

Huit nouveaux décès dus à de la «fièvre» ont été enregistrés en Corée du Nord, quatre jours après l'annonce officielle du tout premier cas de Covid-19 dans le pays, a affirmé dimanche 16 mai l'agence officielle nord-coréenne KCNA. L'occasion de publier un reportage de la journaliste Nathalie Tourret pour «Envoyé Spécial», réalisé sous le contrôle inévitable des autorités nord-coréennes, mais qui montre néanmoins à quel point le discours officiel sur l'état du système de santé semble loin de la réalité.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 16.05.2022
Corée du Nord et santé - 2015 - 03:30 - vidéo
 

Huit nouveaux décès dus à de la «fièvre» ont été enregistrés en Corée du Nord, quatre jours après l'annonce officielle du tout premier cas de Covid-19 dans le pays, a affirmé dimanche 16 mai l'agence officielle nord-coréenne KCNA.

Plus de deux ans après l’apparition de l’épidémie de Covid-19 en Chine et sa diffusion très rapide dans le monde, la Corée du Nord semblait pour le moment avoir échappé à la propagation du virus, en raison de son isolation extrême, une isolation imposée par la dictature de Kim Jong-un. Selon les experts internationaux, le système de santé aurait du mal à faire face à une épidémie majeure.

Dans les archives de l’INA, nous avons retrouvé un reportage de Nathalie Tourret, spécialiste de la Corée du Nord, pour le magazine «Envoyé Spécial» et diffusé le 16 avril 2015. Un témoignage rare des conditions de vie en Corée du Nord, tant est difficile pour les journalistes étrangers l’accès à ce pays replié sur lui-même et sur lequel les autorités font peser une chape de plomb.

Au cours de son reportage qui l’emmène dans différents endroits du pays, toujours sous un étroit contrôle de ses deux guides nord-coréens, sans réelle liberté de mouvement donc, Nathalie Tourret est amenée à visiter un hôpital, inauguré deux ans plus tôt, en 2013. Son commentaire montre à quel point le régime tend, jusqu’à l’absurde, à faire passer le pays, et dans le cas de cet extrait, le système de soin, comme parfaitement vertueux. Sur des images de petites filles chantant dans une salle de l’hôpital, Nathalie Tourret commente ainsi : « Dans ce pays où tout le monde est forcément heureux, même les enfants malades trouvent la force de remercier le régime. » Même enthousiasme dans un « centre de cancérologie moderne », où une « patiente nous attend ». Pour cette malade nord-coréenne, les soins sont visiblement parfaits : « Je suis très heureuse de me faire soigner dans ce palais pour femmes, qui a été conçu par notre maréchal Kim Jung-un. Je me sens tellement bien ici que ma maison ne me manque pas. C’est comme un palais. » Mais détail peu anodin, selon la journaliste, la chambre ne montre pas la « moindre trace d’effets personnels. » Pour Nathalie Tourret, «c’est comme si l’hôpital l’avait placée là pour qu’elle me dise sa joie d’être soignée par le régime ».

Et la visite se poursuit, avec la visite d’un « matériel dernier cri », et surtout le discours « bien rodé sur l’efficacité du système de santé » tenu par une soignante : « Que ce soit pour le président Kim Il Sung [fondateur du régime dictatorial de Corée du Nord en 1948, mort au pouvoir en 1994 et déclaré Président éternel de la République en 1998, NDLR], pour notre cher leader Kim Jong-il [président de 1994 à 2011, NDLR] ou pour notre maréchal Kim Jung-un, nos trois dirigeants, ce qui est le plus important c’est la santé du peuple. Et c’est vrai qu’en province, on ne peut pas prendre en charge certains cas, donc il arrive souvent qu’on envoie un avion, ou un train express, pour lequel on fait arrêter le trafic, afin de ramener les patients ici. »

Des propos « peu crédibles, selon la journaliste spécialiste de la Corée du Nord, et invérifiables bien sûr ». D’autant plus que le dictateur Kim Jung-un « préfère s’adresser à des spécialistes étrangers quand il a un problème de santé », précise encore le reportage d’«Envoyé Spécial». Qui s’en va ensuite tenter d’y voir un peu plus clair en rendant visite à une ONG, «Première urgence aide médicale internationale», basée à Pyongyang. Véronique Mondon y a fondé le bureau de la capitale nord-coréenne douze ans plus tôt, et son équipe intervient dans le sud du pays. Selon elle, la situation est loin d’être aussi belle que ne le montrent les autorités : «Il y a un système de suivi des enfants, de suivi des femmes, mais qui est très en difficulté. Il leur manque des tables pour les femmes : elles accouchent à la maison, généralement dans ces campagnes, il manque tout un système de soins dentaires, ils ont effectivement des dentistes et des chaises dentaires mais qui sont en très mauvais état. »

Et selon la journaliste de France 2, même cette description de la situation sanitaire est loin d’être complète, une certaine autocensure étant de règle pour qui ne veut pas se fâcher avec les autorités nord-coréennes et « risquer de compromettre le travail de l’ONG ».

Pour aller plus loin :

Vie quotidienne en Corée du Nord. Un reportage d'«Envoyé Spécial» du 16 avril 2015 : En cuisine avec une nord-coréenne, cette dernière explique que le parti leur fournit les produits alimentaires de base mais que ce n'est pas toujours suffisant. La journaliste Nathalie Tourret précise que «d'après les Nations-unies, 80 % des Nord-Coréens ne mangent pas à leur faim».

Corée du Nord : au coeur d'un pays fermé. Un reportage du 18 septembre 2018.

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