Le volcan Hunga Tonga-Hunga Ha'apai, situé sur une petite île déserte des Tonga, en grande partie sous-marin et dont le sommet culmine à 114 mètres d’altitude, est entré en éruption samedi 15 janvier. L’explosion, la plus forte enregistrée sur la planète depuis l’éruption du mont Pinatubo aux Philippines en 1991, et équivalent à 10 000 fois la bombe atomique, a propulsé une colonne éruptive à 20 km d’altitude, jusque dans la stratosphère. L’onde de choc, qui a parcouru la moitié de la terre, a été ressentie jusqu’en Alaska, et enregistrée par les stations météorologiques jusqu’en Europe. Un tsunami s’est alors formé, qui a atteint les rivages de l’Amérique, tuant deux personnes sur le littoral péruvien.
Aux Tonga, dont les communications sous-marines qui la relient au monde ont été sectionnées par la force de l’explosion, un premier décès, celui d’une Britannique de 50 ans, a été reporté mardi 18 janvier. Selon France 24, les premières constatations par les autorités font état « de dégâts considérables ».
Cette actualité braque les regards sur ce royaume océanien composé de trois principaux archipels, situé à l'ouest de l'océan Pacifique sud, à 2000 kilomètres à l’est de la Nouvelle-Calédonie, comprenant environ 170 îles et ilots, et peuplé de 105 000 habitants.
Vieux royaume
Nous avons retrouvé dans les archives de l’INA un reportage de la chaîne RFO, diffusé en 1980, qui propose la découverte de l’histoire, de l’économie et de la culture des Tonga. Le premier extrait, présenté en tête de cet article, rappelle la particularité de ce territoire, celle d’être un vieux royaume, « fier » de son indépendance constante vis-à-vis des puissances européennes, le seul état de la région polynésienne à n’avoir jamais été sous la coupe des Occidentaux. L’historien Michel Mourre explique dans son Dictionnaire encyclopédique (Editions Bordas, 1996) que ces îles « furent gouvernées dès le Xe siècle par des rois sacrés, qui à partir du XVIIe siècle, se firent assister par un second roi, revêtu de l’autorité temporelle ».
Le reportage de RFO donne à voir quelques vestiges archéologiques datant du XIIIe siècle, une porte monumentale qui servait de « repère astronomique » et des tombes princières, deux ensembles bâtis avec des pierres de corail. D’abord « découvertes » par les Hollandais en 1616, les îles Tonga le sont à nouveau par les Britanniques de l’expédition du capitaine Cook, en 1777 et 1779. Avec l’influence occidentale parvient le christianisme, religion à laquelle « se convertit, toujours d’après Michel Mourre, le roi Taufa’ahau Tubou en 1831, le même souverain qui, sous le nom de Georges Ier, va réunir les îles en un seul et même royaume ». Le même « réalisa la conversion de son peuple vers 1860 et fit reconnaître son indépendance par les grandes puissances européennes ».
Protectorat britannique
D’une monarchie absolue, le système devient constitutionnel en 1875, inspiré du modèle britannique mais avec toujours un pouvoir presque total du souverain. La pression occidentale est cependant si forte que le roi des Tonga George II doit accepter le protectorat britannique en 1900 (qui ne prend fin qu’en 1970), tout en conservant les traditions séculaires du pays et la monarchie absolue.
En 1980 toujours, RFO explique ainsi que les pouvoirs du roi Taufa'ahau Tupou IV [qui règne de 1965 à 2006, NDLR], « sont très concentrés. [Il les partage seulement] avec sept représentants du peuple élus au suffrage universel et 33 nobles désignés par le souverain ».
Malgré cette domination imposante du pouvoir de la dynastie Tupou sur la vie politique du pays, la monarchie absolue ne semble pas remise en cause. C’est en tout cas ce que pense le fils du roi, interviewé par RFO, qui exclut toute possibilité de « coup d’état ». Rappelant que la monarchie à Tonga est ancrée dans l’histoire du pays et qu’elle « est devenue la gardienne des libertés populaires », le prétendant au trône estime qu’elle est « le meilleur système ».
C’est pourtant ce même « dauphin », qui, parvenu sur le trône en 2006 à la mort de son père sous le titre de George Tupou V, va mettre en place la transition démocratique. En 2010 ont lieu les premières élections d’un véritable parlement, qui choisit désormais directement le premier ministre issu de ses rangs.
L'archipel des Tonga
1980 - 10:38 - vidéo
Le reportage de RFO se poursuit avec le deuxième extrait, consacré à l’économie et à la culture du pays. En 1980, la production principale du pays est alors la banane et la coprah, issue de la noix de coco, dont les exportations sont très fluctuantes. Au contraire, le royaume « importe de l’étranger la quasi-totalité des biens consommés ». Une aide extérieure importante est fournie par « l’Allemagne fédérale, la Nouvelle-Zélande et le Marché commun ».
La nouvelle ressource qui pointe le bout de son nez, c’est alors le tourisme, encore « modeste » en 1980, « avec 9000 personnes par an ». Un « tourisme de plage, comme tout le Pacifique Sud, mais aussi un tourisme d’escale pour bateaux de croisière », qui représente autant d’occasions de vente aux étrangers d’objets traditionnels, comme des « vanneries et des sculptures locales » pour les habitants de la capitale Nukuʻalofa.
La capitale attire de nombreux Tongiens, comme ces femmes interviewées en présence d’un missionnaire mariste, qui ont émigré pour trouver une meilleure situation que la misère de leur localité d'origine. Mais surtout, précise l’homme d’église, la subsistance provient le plus souvent des « expatriés » qui fournissent une part substantielle des revenus des familles, permettant ainsi la construction de « petites maisons en bois ou en ciment ». L’espoir de développement économique réside, toujours selon le prêtre missionnaire, dans les projets « d’industrialisation du pays », et notamment ceux, portés par le roi, de prospection « pétrolière » et de construction d’un « aérodrome international ».
L’avenir, pour RFO en 1980, ce sont surtout les jeunes, « 60 % de la population ayant alors moins de 21 ans ».
Défis
Les défis auxquels sont aujourd’hui confrontés les Tonga sont nombreux, avec en premier lieu, le réchauffement climatique et la violence des phénomènes naturels et climatiques, comme l’illustre l’explosion du Hunga Tonga-Hunga Ha'apai. L’économie du pays avait déjà été endommagée par le cyclone tropical Gita, qui a touché 80 % de la population en février 2018.
Néanmoins, depuis le reportage de RFO, les progrès économiques et politiques sont réels. Selon l’Agence de développement économique de la région Occitanie, reprenant les chiffres de la Banque mondiale de 2020, le « tourisme est la deuxième source de revenus en devises fortes après les envois de fonds, avec 62 500 visiteurs en 2017. Le secteur agricole représente 17,2% du PIB, tandis que l'industrie et les services contribuent respectivement à 17,3% et 60,3%. Les Tonga disposent d'une infrastructure de base raisonnablement solide et de services sociaux bien développés ». Toujours selon l’Agence de développement économique de la région Occitanie, reprenant des données de la Banque asiatique de développement (BAD), l’archipel connaît néanmoins toujours « un taux de chômage très élevé, en particulier chez les jeunes des zones rurales (40%). Aux Tonga, plus de 22,1% de la population continue de vivre en dessous du seuil de pauvreté national, principalement dans les zones rurales des îles périphériques ».
Depuis 2012, le trône est occupé par le roi Tupou VI, frère du précédent roi Tupou V. Le pays est membre indépendant du Commonwealth, symbole de ses liens historiques avec le Royaume-Uni.
Pour aller plus loin :
Pour les créateurs de contenus
Vous souhaitez créer des contenus sur les îles Tonga ? Un dossier de clips est disponible sur mediaclip, notre offre réservée aux professionnels du numérique.