Des ouvrages en attente de traitement au ministère de l'information du Liban. Crédits : INA.
Quelle était votre mission auprès de la Direction étude et publication du ministère de l’Information du Liban ?
Le travail a consisté à traiter une bibliothèque existante du ministère de l’Information et issue du Département des études et publications. Ce département a un rôle de conseil pour la législation médiatique et produit et diffuse des études. J’ai travaillé avec 4 personnes et une traductrice dans le but de faire un inventaire archivistique de cette bibliothèque. L’objectif était de parvenir à ouvrir une salle de consultation dans le ministère, où il y aurait des archives papiers mais aussi audiovisuelles.
De quoi était constitué le fond que vous avez trouvé en allant sur place ?
Il y avait beaucoup de poussière ! Mais aussi beaucoup d’envie et d’énergie de la part de l’équipe, malgré leur dure condition de vie du fait de la crise que traversait, et traverse encore, le pays. Mais dans ce fond, on avait des livres du début du siècle, des études, des herbiers et guides anciens, des ouvrages en français et quelques-uns en arabe... Un autre fonds comportait des ouvrages plus modernes, avec notamment de très nombreux exemplaires du même livre. Ces livres étaient achetés en masse par le ministère pour aider les écrivains…
Mais il n’était pas utile d’archiver tous ces exemplaires achetés en surplus ?
En effet, c’est pourquoi, nous avons établi un protocole de conservation pour ces ouvrages : nous n’en avons gardé que trois exemplaires de chaque. Un pour la consultation, un autre de sauvegarde au cas où le premier disparaisse, et un troisième qui serait massicoté en cas de numérisation. Les ouvrages qui restaient ont été donnés.
Dans quelles conditions avez-vous travaillé ?
À l'ancienne ! Les ouvrages étaient dans des petits bureaux. Je suis arrivé avec des gants blancs, des blouses, des boîtes. Les personnels du ministère ont installé deux tables de tri, des rayonnages, il y avait des livres partout dans les couloirs, un vrai capharnaüm. Mais encore une fois, avec un investissement entier de tout le monde. C’était rudimentaire mais nous avons avancé ainsi, de manière très artisanale. Le matin était réservé à la théorie, l’après-midi, à la pratique.
Un ouvrage conservé au Département des études et publications du ministère de l'information du Liban. Crédits : INA.
Un ouvrage conservé au Département des études et publications du ministère de l'information du Liban. Crédits : INA.
Avez-vous trouvé des trésors ?
Oui, nous sommes tombés par hasard sur une collection de périodiques reliée, une revue de programmes télévisés des années 60, en arabe, avec une belle mise en page, des photos, c’est assez rare de retrouver cela.
Comment cette mission a été reçue par les équipes ?
Chacun avait conscience du sens de la mission, et l’investissement du ministre de l’Information Ziad Makary et de sa conseillère Elissar Naddaf a été entier. Par exemple, quand les équipes ont vu qu’Elissar est venue nous aider, quand ils ont vu qu’elle aussi a rangé, stocké les ouvrages, il y a eu un entrain collectif. Et puis, chacun avait conscience d’être là comme des archéologues, pour mettre en lumière la mémoire et le fruit de leur recherche. Et puis je pense que dès qu’on parle de mémoire, ça fait un écho à leur propre vie. Quand on sait que des archives ont été cachées, perdues, détruites, travailler sur la mémoire du pays est stimulant, ça fait sens.
On a l’impression que cette mission vous a aussi apporté à vous…
Oui, cela a été extraordinaire. La mission n’était pas terminée mais cela m’a questionnée sur mes pratiques du travail et d’organisation. Le temps du travail était différent et il fallait l’accepter. Et puis, j’ai vu que j’avais réussi à donner envie et à entraîner.
Un numéro de l'encyclopédie générale des arts, dirigée par Fouad Ephrem Boustani, ancien directeur de l'Université libanaise. Cet exemplaire date de 1966. Crédits : INA.
Un numéro de l'encyclopédie générale des arts, dirigée par Fouad Ephrem Boustani, ancien directeur de l'Université libanaise. Cet exemplaire date de 1966. Crédits : INA.