« Le Conseil national palestinien, au nom de dieu et du peuple palestinien proclame l'établissement de l'État de Palestine sur notre terre, avec pour capitale Jérusalem la sainte. » Yasser Arafat reste le visage d'un tournant pacifiste du nationalisme palestinien que la proclamation unilatérale de l'État palestinien en novembre 1988 symbolise. À la télévision française, cet événement historique avait fait la une.
Soir 3 évoquait dans l'archive en tête d'article une « stratégie nouvelle » de l'Organisation de libération de la Palestine à travers la déclaration du Conseil national, instance représentative du peuple palestinien qui n'existe plus aujourd'hui. Et de détailler : « Le Conseil national palestinien a à la fois accepté la résolution 242 de l'ONU et proclamé la naissance d'un État palestinien. Accepter cette fameuse résolution de l'ONU constitue une reconnaissance implicite d'Israël, réduite aux frontières de 1947. »
L'élément clé était là. Dans sa déclaration, Yasser Arafat avançait implicitement vers la reconnaissance de l'État d'Israël, première étape vers un processus de paix au Proche-Orient. Et ce « dans des frontières sûres et reconnues ».
Droit à l'autodétermination des Palestiniens
Et puis, disait la journaliste, à Alger, « l'émotion est à son comble » puisque « pour la première fois les contours de l'État que réclament les Palestiniens paraissent un peu moins flous ». D'autant que le Conseil national palestinien précisait la nécessité de « garantir les droits nationaux des Palestiniens, notamment le droit à l'autodétermination ». Et condamnait aussi « le terrorisme et la violence ».
Ce discours a eut lieu lors d'une session exceptionnelle du Conseil national palestinien au cours de la première intifada. Elle avait provoqué la décision de la Jordanie de se retirer de la Cisjordanie par peur de contagion du conflit dans cette partie du territoire. Il était alors nécessaire de déterminer qui administrerait la Cisjordanie. La réponse était ainsi donnée par Arafat avec la création de l'État de Palestine.
« Yasser Arafat sort largement renforcé de ce CNP extraordinaire, ses thèses de modération l'ont emporté », concluait Soir 3. Et de laisser le dernier mot au dirigeant qui appelait à ce que cette session exceptionnelle du Conseil national palestinien devienne « la session de la paix, la session de la paix si les États-Unis et Israël le veulent. »
Une approche réaliste du problème
La Palestine en tant qu'État fut très rapidement reconnue par une vingtaine de pays, principalement arabes, comme le montrait l'archive d'Antenne 2 ci-dessous. Mais pour les grandes puissances, la déclaration d'Arafat n'était qu'un début. « En fait, on a l'impression que la proclamation de cet État palestinien gène un peu tout le monde. Personne parmi les grandes nations n'ose reconnaitre un État qui n'existe pour l'instant que sur le papier. On préfère attendre une éventuelle conférence internationale sur la paix au Proche-Orient », analysait le commentaire.
La proclamation de l'Etat palestinien
1988 - 02:43 - vidéo
Ainsi, les États-Unis appelaient à plus de précision, Moscou saluait une « approche réaliste du problème » et la France assurait qu'une reconnaissance ne faisait pas de difficulté en principe, mais que dans les faits plusieurs problèmes y faisaient obstacle telle la question des frontières. Israël, quant à elle, rejetait la déclaration.
À Genève le 14 décembre, Arafat réitérait sa volonté de renoncer au terrorisme et d'avancer dans un processus de paix. Le 15 décembre 1988, l'Assemblée générale des Nations unies prenait acte de la déclaration d'indépendance et reconnaissait au peuple palestinien son droit à exercer la souveraineté sur son territoire.
Une charte « caduque »
L'une des questions qui resta en suspens après 1988 était la charte de l'OLP. Celle-ci mentionnait l’élimination de la présence sioniste en Palestine, élément inacceptable pour Israël. En 1989, lors d'une rencontre bilatérale, le président de la République française François Mitterrand encouragea ainsi le dirigeant palestinien à mettre à jour cette disposition.
Dans un célèbre extrait, disponible ci-dessous, le chef palestinien répondait au président français en direct sur TF1. « Quand à la charte, je crois qu'il y a une expression française : "C'est caduc" ».
Petite phrase de Yasser Arafat sur TF1
1989 - 00:57 - vidéo
Une petite phrase volontairement floue dans l'espoir de ménager l'opinion publique palestinienne. Elle fut néanmoins clé dans l'évolution du processus de paix au Proche-Orient. L'abrogation officielle par le Conseil national palestinien des articles rejetant l'existence d'Israël eut lieu en avril 1996.
Cette marche en avant vers la paix aboutit aux accords d'Oslo en septembre 1993, après l'élection d'un nouveau dirigeant israélien enclin à la discussion, Yitzhak Rabin. Ils permirent la création de l'Autorité palestinienne.
Yasser Arafat mourut en novembre 2004 sans que l'État palestinien soit reconnu par la communauté internationale.
Aujourd'hui, près de 145 pays reconnaissent donc la Palestine, qui est également État observateur permanent à l'ONU depuis 2012.