Vincent Lindon, le président du jury de la 75e édition du Festival de Cannes, a débuté sa carrière de comédien un peu par hasard au début des années 1980, après avoir pris quelques cours de théâtre, et sans vraiment rêver un jour d’en faire son métier. Mais l’année 1986 allait marquer un tournant dans sa jeune carrière. Le 15 août 1986, il était présenté par Hervé Claude dans son journal de la mi-journée, sur Antenne 2, comme le jeune talent du cinéma français. C’est très intimidé et surpris d’être là qu’il évoquait son parcours.
Dans l’archive en tête d’article le jeune acteur précisait d'emblée qu’il avait commencé à prendre des cours un peu par hasard, avant d’être remarqué, toujours par hasard, par un réalisateur : « Paul Boujenah qui cherchait Francis Huster », plaisantait-il. Il racontait aussi qu'avec son enthousiasme naturel, il avait blagué avec lui, « ça lui a plu et il m’a convoqué pour des essais et j’ai été pris pour "Le Faucon". C’était en septembre 1983 ».
Depuis, il avait enchaîné les tournages, jouant notamment dans 37,2° le matin de Jean-Jacques Beneix ou Yiddish connection de Paul Boujenah. Mais le film pour lequel il était reçu ce jour-là, c’était un film américano-anglais de Bob Swain, Escort Girl dans lequel il jouait aux côtés de Sigourney Weaver.
Après avoir résumé le film, l’acteur expliquait ce que cela faisait de se retrouver face à l’héroïne d’Alien : « D’abord ça fait très peur », reconnaissait-il, vantant son professionnalisme et sa générosité, comme tous les grands acteurs : « ils jouent vraiment avec vous, ils vous écoutent et si par hasard vous changez une phrase... ils s’adaptent. »
« Mon rêve c’est d’essayer de faire des choses différentes »
Vincent Lindon, confiait qu’elle avait été très attentionnée avec lui, « elle s’intéressait à ma vie, comment ça allait, qui j’étais, mes projets en France… ». Une fois de plus, le seul acteur français du film soulignait sa chance d’avoir été choisi par le réalisateur et racontait la rapidité du casting : « quand j’ai fermé le répondeur, après il y avait un trou dans le plafond parce que j’ai sauté de joie », plaisantait-il.
Quelques semaines plus tard devaient sortir Yiddish connection qu’il résumait ainsi, « c’est une attaque de coffre-fort faite par 5 pigeons… très maladroits ». Une comédie avec Charles Aznavour.
Visiblement impressionné par son talent, le journaliste lui faisait remarquer que son spectre de jeu était déjà large, passant du drame à la comédie avec aisance. Vincent Lindon confirmait que sa vision du cinéma ne se limitait pas à un seul registre : « Mon rêve c’est d’essayer de faire des choses différentes, des choses qui font rire et puis de faire peur, d’être un tueur et puis après d’être un docteur. C’est ça qui est agréable ». Reprenant la métaphore du pilote automobile il ajoutait : « c’est agréable de faire de la Formule 1, mais c’est bien de faire des rallyes aussi ».
Cet éclectisme, il l’envisageait aussi dans le choix des réalisateurs avec lesquels il souhaitait alors travailler, tout en soulignant, une nouvelle fois, la part de chance : « c’est vraiment se trouver le jour où il faut, à l’endroit où il faut et à l’heure où il faut. »
Mais pour conclure l’interview, le journaliste lui faisait remarquer qu’il fallait quand même du talent pour en arriver là. Pourtant ce jour-là, sans doute trop humble pour le reconnaître, le comédien bottait en touche avec un large sourire. Il n'en dirait pas plus.