« Je jouais arrière. J’ai plaqué. Quand je me suis relevé, j’étais K.O. J’avais le bras qui pendait et quatre nerfs coupés sous le choc. » En 1991, Gilles Dumazeau, ancien joueur, alertait sur les dangers d’un rugby encore amateur. Quatre ans plus tard, en 1995, l’ovalie devenait professionnelle. Et les joueurs plus massifs.
Le jeu changea. Terminé l’évitement, place au cassage des lignes adverses. Conséquences : des plaquages plus violents, et des chocs plus nombreux, notamment à la tête. Ce n’est qu’à partir du début des années 2010 que ces blessures furent enfin médiatisées. À la télévision : « Le risque de commotions cérébrales potentiellement mortelles est sous-estimé dans de nombreux sports et notamment le rugby. » Une commotion cérébrale, c’est quand le cerveau bouge dans le crâne à la suite d'un choc. Cela entraîne des maux de tête, des étourdissements, ou encore des pertes de mémoire. Et le risque neurologique est bien réel.
Des alertes répétées sur un sport violent
En 2010, Jean-François Chermann, neurologue, était l’un des premiers à lancer l’alerte. « Le rugby est un très jeune sport professionnel. On a jamais vu un développement musculaire aussi important en 20 ans. On a jamais vu un calendrier de matchs aussi développé en 20 ans. Par contre, le cerveau, lui, ne se développe pas. Il n’y a pas de muscle autour et les impacts sont très violents. »
Des alertes qui se multiplièrent. En 2010, toujours, même le médecin du Stade Français était inquiet. Alexis Savigny : « Il n'y a que ce sport qui a cette spécificité de violence immédiate. Aujourd’hui, c’est le sport qui est le plus en avance en termes de blessures graves. » Pour détecter ces commotions cérébrales, le rugby professionnel a mis en place un protocole en 2012. Une mesure jugée insuffisante par certains joueurs et médecins du sport, car elle n’empêche pas pour autant les blessures. Sur le terrain, les chocs sont toujours là. Et en 2017, le neurochirurgien Jean Chazal mettait lui aussi en garde : « Je ne suis pas le premier à le dire, mais, un jour, on aura un mort. »
En 2018, trois jeunes rugbymen sont morts à la suite d’un plaquage. Face à ces drames, la Fédération français de rugby a décidé de réagir. Depuis 2019, certaines règles ont changé, mais seulement dans le monde amateur. Désormais, obligation de plaquer sous la poitrine, et le placage à deux est interdit.