LE CONTEXTE.
Emmanuel Macron a effectué une visite surprise à Marseille mardi 19 mars 2024 dans le cadre de la lutte contre les narcotrafics qui gangrène la ville. Le chef de l’État a débuté son déplacement par la cité de la Castellane, dans le nord de Marseille.
En septembre 2021, lors d'une précédente visite, le chef de l’État avait annoncé d’importants financements pour désenclaver les 13e, 14e, 15e et 16e arrondissements de la ville. Des quartiers qui comptent parmi les plus pauvres de France. Et ça ne date pas d’hier comme le montre le montage d'archives présenté en tête d'article.
LES ARCHIVES.
Après la Seconde Guerre mondiale, les habitants du centre-ville bombardé devaient être relogés au nord de Marseille. Avec eux, les milliers d’immigrés venus reconstruire la France.
En 1955, Gaston Defferre, maire de Marseille, était fier d'annoncer un grand plan d'urbanisme pour la cité phocéenne : « Pour vous tous, nous avons préparé la construction de plusieurs milliers de logements qui vont pousser un peu partout dans notre commune en 1955. »
En 1956, lors de la construction de la Cité Marjolaine, le ton était joyeux : « Une maison qui pousse est un foyer qui s’installe, une nouvelle communauté qui se fixe dans la grande communauté de la cité marseillaise. » Un beau projet sur le papier, mais ces grands ensembles seraient construits dans l’urgence. Et la situation s’aggraverait encore dans les années 60, lorsqu’il faudrait accueillir les nombreux rapatriés d’Algérie.
En 1962, Jacques Maziol, ministre de la Construction de 1962 à 1966 déclarait : « Je le dis, tout particulièrement dans cette ville qui est le port d’accueil de nos frères d’Algérie, tout doit être fait pour leur procurer le plus rapidement possible, le logement auquel ils ont droit. »
Enclavement et abandon
Mais les autorités furent rapidement dépassées. Des bidonvilles s’installant durablement dans le paysage. Au même moment, dans les cités HLM, l’intégration des populations étrangères était parfois très difficile, comme le montre ces réactions de Marseillais glanées en 1969 : « On ne peut pas discuter avec des femmes algériennes comme avec des femmes françaises, impossible ! Ils ne parlent pas forcément le français… Et quand vous leur parlez… ils ne comprennent rien… », « Leur expliquer comment vivent les Français… non ! », « Chacun chez soi ! ».
Racisme, pauvreté, manque de moyens et de perspective. En 1972, cette commerçante d’une cité HLM de Marseille, s’inquiétait pour l’avenir des jeunes de son quartier : « Vous avez des enfants, vous les prenez un par un, ils n'ont rien de différent des autres (...) Et puis, à l’adolescence (…) les dangers qui les guettent. C’est incroyable ! (...) ils sont désœuvrés parfois. Ils font des groupes, on les appelle des bandes (…) Ils tombent dans la délinquance ».
Le trafic de drogues, la délinquance et les règlements de compte entre bandes rivales finirent d’achever la mauvaise réputation des quartiers nord. Aujourd’hui encore, aucune politique publique n’a réussi à désenclaver ces territoires. Dans certaines cités, le taux de pauvreté dépasse les 40%.
