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Le procès de Bobigny ou la défense du droit à l'avortement

Le procès de Bobigny ou la défense du droit à l'avortement

Il y a 50 ans, le 11 octobre 1972, Marie-Claire Chevalier était acquittée. Pour avoir avorté, elle risquait alors jusqu’à cinq ans de prison. Ce procès, porté par son avocate Gisèle Halimi, se transforma en arène politique pour défendre le droit à l’avortement.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 11.10.2022
ll y a 50 ans le procès de Bobigny - 2022 - 02:55 - vidéo
 

« Je ne voulais absolument pas garder un enfant d'un voyou, je n'avais pas de situation, je venais de quitter l’école, je n'étais pas préparée à avoir un enfant », expliquait en 1972, Marie-Claire Chevalier, cette jeune fille avait avorté suite à un viol. Sauf qu'avorter en 1972 était un délit. « Alors j’ai donc décidé qu'il faudrait que je me fasse avorter, » continuait-elle. « Votre mère a compris et vous a aidé ? », lui demandait-on. Elle répondait : « Elle m’a aidé comme elle a pu. » Elle risquait jusqu’à 5 ans de prison. Sa mère jusqu’à 10 ans. L’avocate qui la défendait : Gisèle Halimi.

« L'audience est publique, laissez-nous entrer » : le procès se transforma en arène politique avec des manifestations de féministes. Et le 11 octobre 1972, Marie-Claire Chevalier fut acquittée. Son avocate commentait : « Marie-Claire a été acquittée, car on estime qu’elle n’avait pas délibérément choisi de commettre ce délit alors qu’elle l’a reconnu. »

Le procès de Bobigny fit date, mais ce n’était pas terminé. « Ce n’est qu'un début continuons le combat », scandaient des manifestantes en marge du procès. Un mois après, la mère de Marie-Claire, Michèle Chevalier et trois complices furent convoquées devant ce même tribunal, accusées d’avoir procédé à l’avortement ou de complicité.

Là encore Gisèle Halimi fut l'avocate et les peines symboliques : une amende avec sursis. Michèle Chevalier expliquait, soulagée : « Les juges ont enfin pris leurs responsabilités, ils ont pris connaissance des lois, que c'était plus applicable. »

Un procès clé vers la loi Veil

Au début des années 70, l’avortement était régi par une loi de 1920. Les femmes françaises devaient aller à l’étranger se faire avorter. Un voyage qui avait un coût et qui instaurait une injustice entre celles qui avaient les moyens de le faire et les autres. Gisèle Halimi plaida alors pour que la loi change : « ce jugement est un pas irréversible vers un changement de la loi. (...) Il a exprimé le désarroi de tous les juges devant ce problème. »

Ce procès bouleversa l’opinion publique. Des reportages, des débats se multiplièrent à la télé : « Cette loi est-elle dépassée ? Le moment est-il venu de changer la législation sur l'avortement ? » lançait par exemple le journaliste, Léon Zitrone. Gisèle Halimi fut invitée sur les plateaux. « La vérité, c'est que toutes les femmes avortent y compris les femmes de députés et les maîtresses des ministres et tout le monde. Seulement elles ne le disent pas. »

Un an plus tard, la loi Veil légalisant l’avortement fut votée. Un droit pour les femmes de disposer de leur corps, mais un droit jamais vraiment acquis rappelait Gisèle Halimi en 1989 : « Ce n'est pas un acquis définitif parce que tout peut être remis en question. Mais c'est une liberté pour les femmes et pour les couples aujourd'hui de ne plus être confrontés à l'horreur des avortements clandestins. »

Cet été, des députés ont proposé d’inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution. Proposition pour l’instant sans réponse.

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