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Dans les ruines d'Oradour-sur-Glane, le village martyr

Dans les ruines d'Oradour-sur-Glane, le village martyr

Le 10 juin 1944, une compagnie de la Waffen SS investissait le village d’Oradour-sur-Glane dans la Haute-Vienne. En quelques heures, les nazis massacrèrent la population, pillant et incendiant le village et l'église. Le bilan fut terrible : 643 morts et seulement 6 rescapés. Quelques mois plus tard, l'un d'eux faisait visiter le village à la télévision.

Par Florence Dartois - Publié le 08.06.2022 - Mis à jour le 07.06.2024
Oradour sur Glane - 1944 - 01:45 - vidéo
 

L'ANNIVERSAIRE.

Il y a quatre-vingt ans, le 10 juin 1944, quelques jours après le débarquement en Normandie, le village d’Oradour-sur-Glane en Haute-Vienne, situé à 22 kilomètres au nord-ouest de Limoges, était investi par la 3e compagnie de Waffen SS de la division « Das Reich » qui remontait vers le front. En quelques heures, les 200 soldats éliminèrent la population, pillant et incendiant le village qui comptait, lors du recensement de 1936, 1574 habitants. Le bilan du massacre fut lourd : 643 victimes (une femme de nationalité espagnole a été reconnue victime en 2020). Seules 6 personnes réussirent à échapper aux soldats allemands, devenant les seuls rescapés du plus important massacre de civils français de la Seconde Guerre mondiale.

L'ARCHIVE.

Filmé dans les ruines du village martyr, le reportage disponible en tête d'article, a été réalisé par le journal de « France Libre Actualités » sur les lieux du drame, en septembre 1944. Les stigmates sont partout visibles et la désolation surgit devant les objectifs des caméras. Sur une musique dramatique, le speaker commente des plans larges du village en ruines, la plupart des maisons et bâtiments carbonisés, dont le nom résonne désormais « comme un glas », précise-t-il. Oradour-sur-Glane est devenu le symbole de la « cruauté hitlérienne ».

Les pans des murs chancelants, encore noirs de suie, illustrent le drame qui s'est joué là quelques semaines plus tôt. Le village « torturé » est mort. Les images dévoilent avec force l'atroce « cataclysme ». Une seule maison tient encore debout, les voitures sont calcinées, un vélo gît enchevêtré dans une masse de débris.

Le reportage se poursuit au cimetière où les nombreuses couronnes, gerbes de fleurs et croix de bois gravées témoignent du nombre élevé de victimes du massacre. Le ton du speaker se fait encore plus lugubre, et la musique inquiétante, lorsqu'il décrit la place du village et retrace les faits : « Il était deux heures de l'après-midi lorsque les SS sont venus. Ils ont rassemblé toute la population sur cette place. D'un côté, les hommes, de l'autre, les femmes et les enfants ». Les hommes ont été emmenés dans des granges, abattus et brûlés. Les femmes et les enfants ont été enfermés dans l'église du village, avant d'être « mitraillés et brûlés vifs ».

L'un des rares rescapés, le visage sombre, guide silencieusement l'équipe de télévision dans les décombres de l'édifice religieux que les nazis ont tenté de dynamiter et où les murs sont encore criblés de trous de balles. En fin de reportage, un homme pointe du doigt un vitrail brisé. C'est par ce minuscule orifice que la seule femme survivante a pu s'échapper.

Témoignage d'une survivante

Cette femme, mentionnée dans le reportage de 1944, c'est Marguerite Rouffanche. Dans l'archive ci-dessous, extraite du Magazine d'actualités de FR3 Limoges en juin 1969, elle témoigne de l'arrivée des nazis à Oradour., du rassemblement des habitants sur la place du marché, appelé le « champ de foire ». La survivante, qui a perdu sa famille ce jour-là, raconte avec beaucoup d'émotion, la peur, l'attente et la séparation d'avec son mari et son fils qui ne voulait pas la lâcher. Elle se souvient aussi comment son mari avait tenté de l'alerter et de lui faire quitter le village avant que les soldats ne l'encerclent. Peine perdue.

Dans cet autre passage extrait de la même archive, Marguerite Rouffanche décrit comment elle réussit à s'échapper de l'église, par une fenêtre de la sacristie, laissant ses filles mortes derrière elle. Blessée aux jambes par un tir de mitraillette, elle restera allongée dans le jardin, jusqu'à ce qu'elle soit secourue le lendemain.

La reconstruction

Malgré le drame, le village allait se reconstruire. En 1947, date du reportage des Actualités françaises ci-dessous, quarante-deux personnes y vivaient à nouveau. Du mécanicien au cordonnier - qui ne réparait plus de souliers d'enfants - au boulanger, la population reprenait peu à peu goût à la vie, comme en témoignent les visages des onze jeunes garçons qui composaient désormais la toute nouvelle équipe de football d'Oradour.

Un procès compliqué

Le 12 janvier 1953, le procès d’Oradour-sur-Glane débutait à Bordeaux. Ce procès allait soulever un malaise dans l'opinion publique, du fait de la participation au massacre d'Alsaciens enrôlés de force dans la Waffen SS, « les Malgré-Nous ». En effet, parmi les dix-neuf accusés présents dans le box comparaissaient sept soldats allemands - dont l’adjudant Karl Lenz - le plus haut gradé, et quatorze Alsaciens.

Le verdict fut prononcé le 12 février 1953. Côté allemand : Karl Lenz a été condamné à mort, et les autres ont écopé de peines de prisons et de travaux forcés de dix à douze ans. Quarante-quatre autres condamnations capitales par contumace ont été prononcées. Côté français : Georges René Boss était également condamné à mort. Quant aux autres, malgré leur jeune âge et une faible implication, ils furent reconnus coupables à l’unanimité et condamnés à des travaux forcés et à des peines d’emprisonnement de cinq à huit ans. Un verdict qui allait provoquer la stupeur dans le prétoire et en Alsace.

Pour les créateurs de contenus

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