« C’est vrai que c’est toute une époque, les années 70, se souvient le journaliste Bertrand Amar. C’est l’arrivée des consoles qu’on appelait Pong qui sont des consoles multi-jeux mais tous les jeux se ressemblaient. En gros, il y avait deux barres et c’était le tennis, le foot, le hockey. »
L'une des premières archives documentant l'arrivée du jeu vidéo, c'est ce reportage du 23 décembre 1977 : « Pour 300 francs environ, le petit écran se transforme en terrain de football ou en court de tennis, les adversaires se renvoyant la balle grâce à une commande manuelle. » En visionnant cette archive de l'INA, Bertrand Amar trouve le « journaliste [de l'époque] plutôt bienveillant. C’est vrai qu’on a beaucoup souffert du traitement par les médias du jeu vidéo mais là, il n’y a pas encore le mal du jeu vidéo qu’on a subi dans les années 80 et 90. »
Exemple en 1983, les jeux vidéo commencent à se démocratiser. Et les journalistes s’interrogent, comme dans ce sujet du 29 avril 1983 : « La mâchoire est crispée, le regard fixe, les gestes saccadés, les symptômes sont clairs, le diagnostic sans appel. Ces enfants sont atteints d’un mal très contemporain : la passion des jeux vidéos. »
Le bénéfice du jeu
« Il est assez édifiant ce reportage, commente Bertrand Amar. Je ne l’avais jamais vu. Le champ lexical du journaliste : le mal, les symptômes. Les plans aussi, les yeux crispés. On voit déjà dans ce reportage tout l’écart entre les médias et le jeu vidéo. »
« Les journalistes, poursuit-il, faisaient partie de cette génération qui ne comprenaient pas, qui avaient peur de voir les enfants s’enfermer dans les jeux vidéo. Peut-être aussi de voir la télé servir à autre chose que diffuser des images. Il y a toujours eu cette idée que pendant qu’on est sur la console, on ne regarde pas la télé. »
Mais d’autres personnes, au contraire, y voient un côté bénéfique pour les jeunes. C'est le cas de Jacqueline Renaud, médecin-psychologue, interviewée le 29 avril 1983 : « Avec le jeu vidéo, ils participent avec passion. Ils ont une compétition, ils veulent gagner, ils veulent se vaincre eux-mêmes. Et à partir du moment où un enfant veut réussir, il y a un dynamisme excellent. » Réaction agréablement surprise de Bertrand Amar à la vue de cette archive : «La psychologue, qui est quand même d’un certain âge à cette époque et qui découvre le jeu vidéo, a un regard très bienveillant. Elle comprend que finalement, ça aide les enfants à se dépasser, à se fixer des objectifs. Et pourtant, les médias, eux, ne le voient pas. »
40 ans plus tard, l’image des jeux vidéo à la télé a bien changé selon Bertrand Amar : «Aujourd’hui, le traitement qui est fait du jeu vidéo par les médias, je le trouve très juste. On voit bien aujourd’hui quand il y a une compétition, les médias viennent, saluent la ferveur populaire. Donc on a un traitement bienveillant et juste. Les journalistes n’ont plus les idées préconçues qu’ils avaient à l’époque.»