L'avocat peut-il être complice ? En mai 1981, l'émission de débats d'Antenne 2 « Les Dossiers de l'écran » recevait plusieurs avocats, dont Gisèle Halimi et Henri Leclerc, pour répondre à cette question. L'occasion pour Henri Leclerc, mort le 31 août 2024, d'y exposer plusieurs des grands principes qui faisaient sa profession.
« Lequel d'entre nous n'a pas subi des injures ? Lequel d'entre nous n'a pas été agressé soit par téléphone, soit dans la rue, par des gens qui lui reprochaient de défendre tel ou tel ? », interpelait l'avocat en début d'émission et dans l'extrait en tête d'article. Il dénonçait ainsi ceux qui « n'acceptent pas la défense », similaire à ses yeux à un « refus de la justice. »
Et de rappeler l'humanité de tout accusé. « Celui qui est jugé est un homme. C'est un homme identique à tous les autres. Quel que soit le crime qu'il a commis. Il faut le défendre. (...) Et il faut essayer de trouver pourquoi. Où sont les véritables responsabilités ? Pourquoi cet homme qui est comme nous, qui est un frère, qui est un homme comme les autres, pourquoi cet homme a commis un certain nombre de choses ? »
Une particularité, pour lui : le délinquant politique, qui « revendique sa cause » et qui est jugé pour ses idées et « pas tellement pour l'acte qu'il a commis ». C'est là, que, selon lui, l'avocat avait le devoir de s'engager : « Si l'avocat ne défend pas les idées de celui qui est là, l'avocat manque à sa mission. Celui qui revendique son acte, il doit être défendu non pas pour l'acte lui-même, mais pour ce qui l'a inspiré et pour les idées qui l'avaient inspiré ».
Les plus pauvres doivent pouvoir avoir « l'assistance des plus grands avocats »
« Le rapport d'argent entre l'avocat et son client est un phénomène scandaleux qui, à juste raison, choque le public. » Dans le second extrait, ci-dessous, la question des téléspectateurs porte sur la rémunération de l'avocat par son client, de l'influence que celle-ci pouvait avoir sur la position de l'avocat. Henri Leclerc semblait y voir une problématique majeure pour sa profession. Il disait souhaiter « que les honoraires de l'avocat soient pris en charge socialement d'une façon ou d'une autre, pour que cette difficulté ne soit pas ce qu'elle est aujourd'hui et que les plus pauvres puissent avoir, même dans les plus petites affaires, l'assistance des plus grands avocats ».
Henri Leclerc et le rapport d'argent entre l'avocat et son client
1981 - 05:01 - vidéo
Enfin, il insistait sur la sincérité de l'avocat. « En matière politique (...), je disais tout à l'heure qu'il fallait que l'avocat défende d'une certaine façon les idées de son client. Or, les avocats, contrairement à ce qu'on a dit, ne sont pas des menteurs. Les avocats sont des témoins de la vérité. Nous sommes pour la vérité, la vérité à laquelle nous croyons, bien entendu, pas la vérité dans l'absolu. Qui connaît la vérité dans l'absolu ? Mais notre vérité, la vérité du client. Nous sommes pour défendre sa vérité et nous sommes des témoins de la vérité. Or, il est vrai que lorsque nous défendons une cause et lorsque nous défendons les idées de quelqu'un, il est évident qu'il y a une sincérité de l'avocat. Il y a une nécessité d'engagement de l'avocat. »