On l'appelle la muse de l'existentialisme. Jean-Paul Sartre, Boris Vian, Albert Camus et les jazzmen américains font partie de ses proches : durant cette période d'après-guerre, Juliette Gréco évolue au sein de ce cercle très prisé qu'est Saint-Germain-des-Prés. L'intelligentsia y bouillonne : la vingtaine à peine passée, Juliette Gréco mène une vie de bohème tambours battants. Une jeunesse dorée qui succède à une enfance beaucoup plus sombre.
Jazz et philo à Saint-Germain
Née à Montpellier le 7 février 1927, Juliette Gréco est passionnée de danse. Ses rêves s'effondrent à l'annonce de la seconde guerre mondiale. Son père est absent, sa mère s'engage dans la résistance. Cette dernière, démasquée par la Gestapo, est envoyée en déportation avec sa fille aînée, Charlotte. Juliette se retrouve seule.
A propos de son emprisonnement, 1962
Les retrouvailles avec sa soeur, 1962
Sa professeure de théâtre, la comédienne Hélène Duc, l'héberge et la prend sous son aile : Juliette découvre alors les merveilles de l'art dramatique, les plaisirs de la scène. Et le Quartier Latin.
Paris est encore en guerre que sommeille une vie culturelle qui ne demande qu'à exploser. Paris libéré, elle affiche ses galons d'or à Saint-Germain. Cafés, clubs, de jazz : des endroits emblématiques où se retrouve la fine fleur des artistes et penseurs.
Pourquoi la surnommait-on la "muse de Saint-Germain-des-Près", 1962
Juliette Gréco se choisit un lieu fétiche : le Tabou, un club ouvert en 1947, rue Dauphine. Là elle y multiplie les rencontres.
Déshabillez-moi, 1971
Des poètes français aux réalisateurs américains
Personnalité incontournable de cette jeunesse d'après-guerre, elle fait les couvertures de magazine.
A propos des hommes, 1988
Jean Cocteau lui offre une place de choix dans son film Orphée. Et lorsque la belle rebelle se lance un nouveau défi, celui de la chanson, les poètes se pressent pour lui présenter leurs quelques lignes. Juliette Gréco pose ainsi sa voix sur des vers de Raymond Queneau (Si tu t'imagines),
Si tu t'images, 1962
Jules Lafforgue (L'Eternel féminin), Jacques Prévert (Les Feuilles mortes).
Les feuilles mortes, 1972
Très vite, Juliette Gréco impose son style intense, sensuel et grave. « Je suis comme je suis » affirme-t-elle en 1951 dans un premier album au titre revendicateur. Un album qui la révèle aux yeux de tous, y compris à ceux des réalisateurs hollywoodiens.
En 1957, Orson Welles et John Huston la contactent pour leur long-métrage : Juliette Gréco s'envole vers les étoiles. Mais l'aventure américaine ne durera qu'un temps
"Des chansons éternelles"
De retour en France, c'est avec Serge Gainsbourg que Juliette Gréco s'associe. Il signe ses chansons pendant plusieurs années, dont la célèbre Javanaise en 1963. Même si en 1965, Juliette Gréco fait sensation grâce à son interprétation dans la sérié télévisée Belphégor, c'est à la chanson qu'elle consacre la majeure partie de son temps.
A propos de sa carrière, 1972
Sa carrière s'essouffle dans les années 1970. Juliette Gréco fait un retour remarqué en 1982 lorsqu'elle publie Jujube, son autobiographie. Son album, intitulé Aimez-vous les uns les autres ou bien disparaissez (2004), comporte la signature de Bernard Lavilliers, Art Mengo, Miossec ou encore Benjamin Biolay.
La solitude, sa fille, 1972
Après des collaborations remarquées avec Abd Al Malik ou Olivia Ruiz, elle sort en janvier 2012, un nouvel opus Ca se traverse et c'est beau... , un hommage à Paris. Quand elle revient au micro de RFI sur son métier, elle confie : « C'est une espèce d'étrange bénédiction bizarre. Ou les gens vous écoutent... ou bien, ils vous refusent. Ce métier est miraculeux, étrange, bouleversant. Impossible à décrire, impossible à expliquer. Il est fait de douleur immense, il est fait d'amour, de démesure. »
Pour aller plus loin
Belphégor ou le fantôme du Louvre
Emission "Juliette Gréco et Henri Gougaud", 20 janvier 1974
Sur le même sujet