Paris, 1968. Alors que les étudiants de Nanterre et de la Sorbonne demandaient plus de libertés, d’autres étudiants, eux, réclamaient de l’ordre. Sur leurs drapeaux, des croix celtiques, véritables symboles nationalistes. Il s'agissait des membres du mouvement Occident. Ce mouvement fut dissous le 1er novembre 1968, mais un autre mouvement naquit quelques mois plus tard de ces cendres : Ordre nouveau.
Le mouvement avait pour ambition de réunir et d’unifier toutes les forces nationalistes. En mai 1970, le premier meeting du mouvement eut lieu au Palais de la Mutualité, à Paris, comme le racontèrent les journaux télévisés : « Les mouvements d’extrême-droite sont venus au meeting sous la même bannière. Anciens du mouvement dissous Occident, militants de l'ex-OAS, jeunes étudiants du Groupe union droit, nationalistes de tous horizons. » Le ton est donné : « Le meeting débutait par l'audition de Tannhäuser de Wagner et des poèmes de Brasillach, poète fusillé à la libération pour collaboration avec les nazis. »
La jeunesse de ce mouvement était regroupée dans le Groupe union défense, d'abord nommé Groupe union droit et aujourd'hui plus connu sous l’acronyme GUD. En 1973, ils manifestèrent à Paris, comme le rapportaient les journaux télévisés : « 7h ce matin, devant la faculté de Droit et de Sciences économiques, rue d'Assas à Paris : une trentaine d’étudiants du GUD, un groupe d'extrême-droite arrive pour, disent-ils, défendre leur faculté des gauchistes. » Leurs slogans étaient clairs : « Gauchistes, salauds, on vous fera la peau ».
Création du Front national : investir le champ politique
Ordre nouveau et le GUD faisaient souvent parler d’eux à la page des faits divers. Et les affrontements avec les militants de la Ligue communiste commencèrent à faire tache. Alors, dans la perspective des législatives de 1973, les têtes pensantes d’Ordre nouveau voulurent un parti plus lisse afin de pouvoir peser sur la scène politique. Terminée la bagarre, direction les urnes. François Duprat, alors membre du bureau politique du mouvement Ordre nouveau, expliquait en 1972 : « Le mouvement est apparu comme la seule force organisée de l’opposition nationale. Ce qui nous a permis de définir et de faire approuver une politique de front national, incluant un accord entre Ordre nouveau et les personnalités de l’opposition nationale. »
Mais il fallait un visage pour conduire ce parti. C'est là que Jean-Marie Le Pen, ancien député, retiré de la vie politique, fit son entrée. Le Front national naquit le 5 octobre 1972. Et dès le départ, Jean-Marie Le Pen fit le service après-vente auprès des journalistes. Comme en 1972, où il déclarait : « Nous sommes la droite, oui, nous sommes la droite populaire. Qui est ancrée sur les valeurs traditionnelles qui à nos yeux ont fait les 2000 ans de notre histoire. Nous sommes la droite sociale qui ne sépare pas l'amour de la patrie d’amour de l'amour de son peuple. » Les élections législatives de 1973 furent un échec pour le FN. Conséquence : une scission entre Ordre nouveau et le FN. Un beau marchepied pour Jean-Marie Le Pen qui conserva la tête du parti.
Retrouvez ci-dessous un extrait de l'émission de France info et l'INA «INAttendu». Dans ce dossier, Géraldine Cornet Lavau revient en longueur avec le journaliste politique Alain Duhamel sur les origines du Front national.
INAttendu : les origines du FN
2022 - 07:00 - vidéo