L'Obs a révélé qu'une ancienne grande plume du Canard enchaîné, Jean Clémentin, aurait été espion au service de la Tchécoslovaquie entre 1957 et 1969. Journaliste plus connu à l'époque sous le pseudonyme de Jean Manan, c'est sous le nom de code de « Pipa » qu'il aurait livré plus de 300 notes aux services secrets tchécoslovaques, alors que ce pays d'Europe centrale était situé de l'autre côté du rideau de fer. Rémunéré pour ses informations, le journaliste français aurait également publié dans son journal de fausses informations dictées par la StB, les services secrets tchécoslovaques.
Jean Clémentin, on le retrouve dans les archives de l'INA, à l'occasion de la sortie de livres satyriques écrits au cours des années 1970. Comme Pinarque, en 1977, ou, un an plus tôt, La France ce n'est pas ce qu'il y a de plus grand c'est ce qu'il y a de meilleur. Pour ce dernier livre, Jean Clémentin était ainsi invité sur le plateau du journal télévisé de TF1. Dans l'archive en tête d'article, il résume ainsi son livre satyrique au journaliste Jacques Legris, sur un ton pince-sans-rire : « La France, en l’an 2000 [...] a retrouvé sa grandeur, par une politique mise au point avant sa mort par un général qui a gouverné la France. Cette politique a consisté à faire faire aux Français et aux Françaises un nombre considérable de bébés. La France en l’an 2000 a 110 millions d’habitants, a retrouvé la communauté [française], a reconquis la plus grande partie de son empire [colonial, NDLR], et en outre elle est une puissance qui dirige le monde, elle est même parmi les super grands. L’Onu est [même] venu s’installer à Paris. »
Jean Clémentin a occupé un rôle de tout premier plan au sein de la rédaction du Canard enchaîné, qu'il a intégré au début des années 1960. Au cours des années 1970, il en est devenu rédacteur en chef, un poste qu'il a quitté en 1976, pour passer à la critique littéraire, toujours au sein du Canard enchaîné, au début des années 1980. Il a quitté le journal en 1989 pour se consacrer à l'écriture. Le journaliste est actuellement âgé de 98 ans et est protégé de toute poursuite par la prescription. «Nous ne sommes évidemment pas au courant, nous sommes sidérés», a affirmé Nicolas Brimo, actuel directeur du Canard enchaîné après les révélations de L'Obs.