Dimanche 3 avril, le Fidesz, le parti du premier ministre nationaliste Viktor Orban, a largement remporté les élections législatives hongroises, avec 53,19% des voix. L'opposition, une coalition rassemblant des partis allant de la gauche à l'extrême droite, est sévèrement battue, et doit se résoudre à laisser Viktor Orban gouverner le pays pour un quatrième mandat, le troisième consécutif depuis son retour au pouvoir, il y a 12 ans. « Le monde entier a pu voir qu’à Budapest le patriotisme a gagné. C’est notre message à l’Europe : nous ne sommes pas le passé, nous sommes l’avenir ! » a-t-il déclaré, dimanche soir, tout sourire devant cette réélection triomphale. « Cette victoire, on va s’en souvenir, car nous n’avons jamais eu autant d’adversaires, entre notre gauche nationale, la gauche internationale, les bureaucrates de Bruxelles, [le milliardaire américain d’origine hongroise] George Soros, les médias internationaux et même le président ukrainien », a-t-il encore ajouté.
Dès son retour au pouvoir, le 29 mai 2010 (après avoir déjà gouverné le pays entre 1998 et 2002), Viktor Orban a inquiété l'Union européenne, dont la Hongrie est membre depuis 2004. A l'époque, son projet de loi sur l'organisation des médias prévoyait un contrôle accru de l'Etat sur l'information, imposant aux journalistes de révéler leurs sources lorsqu'il s'agit de la « sécurité de l'Etat », et menaçant la presse de lourdes sanctions économiques « pour des chaines de télévision qui auraient porté atteinte à l'intérêt public ».
En janvier 2011, lorsque la Hongrie prenait la présidence tournante de l'Union européenne pour six mois, il se retrouvait de fait à la tête d'une institution dont les valeurs sont en contradiction avec sa tentative de contrôler les médias de son pays.
Son premier discours au sein du Parlement européen est donc houleux. Il est notamment apostrophé par Daniel Cohn-Bendit, qui le compare à un « Chavez européen » et par Martin Schulz, le Président du groupe PSE, qui lui fait remarquer qu'en démocratie, « ce sont les médias qui contrôlent le gouvernement, pas le gouvernement qui contrôle les médias ».
Durant les douze années où il a été au pouvoir, les relations entre Viktor Orban et Bruxelles auront été constamment très difficiles. Fin octobre 2021, il s'exclamait encore : « L'Union européenne nous parle et se comporte avec nous et les Polonais comme des ennemis », un discours tenu devant une foule de sympathisants, massés pour un rassemblement à l'occasion de la fête nationale qui commémorait le soulèvement de la Hongrie contre l'URSS en 1956. « Bruxelles ferait bien de comprendre que même les communistes n'ont pas réussi à nous avoir. Nous sommes le David que Goliath ferait mieux d'éviter », ajoutait-il, affichant son soutien à Varsovie dans le conflit qui l'opposait à Bruxelles sur l'indépendance des tribunaux et la primauté du droit européen.
Mais depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, un fossé semble s'être creusé entre ceux deux pays d'Europe centrale traditionnellement eurosceptiques, la Pologne affichant la position la plus dure vis-à-vis de la Russie et un soutien sans faille au président ukrainien Volodymyr Zelensky, tandis que Viktor Orban, proche de Vladimir Poutine, apparaît toujours comme le plus éloigné de la position de l'Union européenne. Une position qui singularise encore un peu plus au sein des 27 la Hongrie de Viktor Orban.