L'ACTU.
Le Hamas palestinien a lancé une offensive inédite contre Israël le 7 octobre 2023. Des centaines de morts côté israélien et palestinien sont à déplorer, ainsi que des centaines d'otages israéliens vraisemblablement transférés dans la bande Gaza que le Hamas dirige depuis 2007. Il s’agit de l’escalade la plus meurtrière dans le conflit israélo-palestinien depuis des décennies.
Cette attaque survient cinquante ans après la date anniversaire de la guerre israélo-arabe du Kippour de 1973. À l'époque, Israël avait également été attaquée par surprise. Le conflit qui avait suivi avait duré trois semaines, avec un bilan de 2600 Israéliens et au moins 9500 morts et disparus côté arabe.
LE CONTEXTE.
Depuis la création de l’État d'Israël en 1948, l'histoire du pays est émaillée de conflits avec ses voisins arabes et de tentatives de paix. La dernière date remonte au 13 août 2020 avec un accord obtenu sous la gouvernance américaine de Donald Trump entre Israël et les Émirats arabes unis. Il prévoyait une normalisation des relations diplomatiques, une ouverture de lignes aériennes, le développement de liens économiques, ainsi que l'abandon par Israël de son plan d'annexer une partie de la Cisjordanie occupée depuis 1967. Sur ce dernier point, l'interprétation de l'accord divergeait entre les deux parties. Pour les Émirats, l'abandon de cette politique devait être définitif, tandis que du côté israélien, on parlait plutôt de « suspension » du projet, faute de soutien américain suffisant.
L'accord était assez important pour qu'il soit salué par toutes les chancelleries occidentales et qu'il soit perçu comme un véritable tournant dans la politique traditionnelle arabe de la région. Le Monde expliquait alors qu'il contrevenait pour la première fois à la doctrine saoudienne du « plan Abdallah » qui soumettait en 2002 la normalisation des relations entre Arabes et Israël à la création préalable d'un État palestinien viable et souverain, avec Jérusalem-Est pour capitale.
Le précédent accord datait de 1978. À l'époque Israël signait pour la première fois un rapprochement avec un pays arabe : l’Égypte. Il s'agissait d'une esquisse de paix véritable, alors que les deux pays rivaux s'étaient fait la guerre à quatre reprises, en mai 1949 (première guerre israélo-arabe), en 1956 (la crise du canal de Suez après sa nationalisation par Nasser) : en 1967 (troisième guerre israélo-arabe, dite « guerre des Six Jours ») et en 1973 (quatrième guerre israélo-arabe, dite « guerre du Kippour »).
L'ARCHIVE.
C'est ainsi que le 17 septembre 1978, le président égyptien Anouar el-Sadate et le premier ministre israélien Menahem Begin signaient les accords dits de « Camp David ». C'est dans ce lieu de villégiature des présidents américains que s'étaient tenues des négociations bilatérales, sous la médiation du président américain Jimmy Carter. L'archive en tête d'article relate la signature des deux accords-cadres qui venaient d'être négociés durant 13 jours (du 5 au 17 septembre 1978) dans le plus grand secret et la fébrilité. Elle est intéressante car elle montre à la fois la liesse générée par l'annonce de la signature, tout en pointant la relative fragilité de l'accord. Une fragilité structurelle plusieurs fois évoquée dans les commentaires prudents des journalistes.
L'archive débute par le lancement du journal de 13 heures de TF1 du 18 septembre 1978. Yves Mourousi y expliquait que jusqu'au petit matin, heure de la signature du traité, un certain pessimisme régnait parmi les observateurs. Il reprenait les propos tenus par Menahem Begin à l'issue des concertations : « Le sommet de Camp David est peut-être le plus important depuis la conférence de Vienne au XIXe siècle ». Yves Mourousi, visiblement circonspect par le choix cette comparaison, se montrait prudent en rappelant que cet accord n'avait pas tenu dans le temps et qu'il avait engendré les futurs conflits européens.
Le sujet montrait ensuite des images de la signature exceptionnelle à la Maison blanche. Ces plans devenus célèbres dévoilaient les visages radieux et soulagés des trois négociateurs, puis l'entrée des trois hommes d’État sous des applaudissements nourris. Jimmy Carter, le premier à prendre la parole, annonçait que le président égyptien et le premier ministre israélien allaient signer un accord-cadre pour la paix au Proche-Orient et un second accord-cadre, pour la paix entre Israël et l’Égypte, cette fois. Le premier traité de paix devait être signé avant le 17 décembre 1978.
Dans la suite du reportage, Menahem Begin annonçait que les troupes israéliennes se retireraient du Sinaï entre mars et décembre 1979. Il était prévu qu'après cette date s’établiraient des relations diplomatiques entre les deux pays. Puis venaient de longues séquences les accolades entre les trois hommes, notamment celle d'Anouar el-Sadate et Menahem Begin, entrée dans l'histoire.
Un accord imparfait ?
L'heure semblait à l'espoir et à la confiance, comme le précisait Dominique Bromberger au début de son commentaire : « Mais enfin, la paix est là, vraiment à portée de la main ! ». « Un accord comme celui-là, un moment de ce genre, qui eut pu penser, il y a 36 heures seulement, qu'il eut pu être possible ce soir ? » S'interrogeait Dominique Bromberger qui depuis plusieurs jours insistait sur la tension inhérente aux négociations. Il décrivait à nouveau la stupéfaction et la joie suscitée par l'annonce de la signature.
Après l'optimisme, le journaliste soulignait que l'accord contenait quand même « un point d'ombre », celui du statut de la Cisjordanie [annexée après la guerre des Six Jours en 1967 par les Israéliens, avec installations de colonies], pour laquelle une période intermédiaire de cinq ans avait été décidée. Il était prévu qu'Israël cesse d'y installer des colonies et retire ses troupes. Les Palestiniens devaient, quant à eux, élire leurs représentants. On leur promettait l'autonomie pour l'administration de leurs affaires.
Les négociations de paix devaient s'engager au terme de cette période entre la Jordanie, l’Égypte, les élus palestiniens d'une part et les Israéliens de l'autre. Le journaliste relevait un autre point épineux : « C'est loin de l'autodétermination que réclamaient les Arabes et Sadate lui-même », cet accord était basé sur les seuls compromis personnels de Sadate et de Begin et Dominique Bromberger se demandait si, à l'avenir, les Palestiniens et les Jordaniens accepteraient à leur tour les concessions accordées à Camp David.
Il n'avait pas tort, car avant même la fin des négociations, le positionnement de l’Égypte était sévèrement critiqué par les Palestiniens comme le montre l'archive ci-dessous.
Le contenu des deux accords
Il y eut donc deux accords-cadres de Camp David en 1978. Le premier accord fixait un cadre pour la paix au Proche-Orient et se divisait en trois parties : la base des futures négociations sur le sort de la Cisjordanie et de la bande de Gaza ; la seconde partie concernait les relations diplomatiques entretenues entre Israël et l'Égypte ; la troisième partie déclarait certains principes qui auraient dû s'appliquer aux relations entre Israël et les autres pays arabes. Elle resta lettre morte.
Le second accord concernait le traité de paix entre les deux pays. Il fut signé le 26 mars 1979 à Washington. Il permit à l’Égypte de récupérer le Sinaï en 1982 après le retrait complet de l'armée israélienne et le démantèlement de certaines implantations juives. En contrepartie, Israël obtint une normalisation des relations diplomatiques israélo-égyptiennes et des garanties sur la liberté de circulation sur le canal de Suez. Chacun des deux pays acceptait de ne plus rassembler de troupes près de la frontière. Israël offrit également une garantie de libre passage de l'Égypte vers la Jordanie.
Israël et l’Égypte signent la paix
L'accord de paix entre Israël et l’Égypte entrait en vigueur le 26 mars 1979, avec une signature à la Maison blanche. Notre archive ci-dessous est extraite du 20 heures d'Antenne 2, elle relate cette avancée. Dans son lancement, comme ses confrères quelques mois plus tôt, Jean-Pierre Elkabbach résumait le contenu des deux accords, avec leurs points forts et leurs lacunes.
Puis, dans son analyse, le journaliste Édouard Lor énumérait l'essentiel de l'accord de paix : la rétrocession progressive du désert du Sinaï occupé par Israël depuis la guerre des Six Jours, l'accès à 30% du pétrole découvert par Israël dans cette zone pour une durée de dix ans.
Le journaliste terminait son sujet avec l'évocation des questions restées en suspens dans le premier accord et toujours pas résolues : le statut de la bande de Gaza qui devait recouvrer une forme d'autonomie à terme, le statut de la Cisjordanie, région devait rester dans le giron israélien, avec autorisation d'installer des « colonies sauvages » palestiniennes. Pas un mot en revanche sur Jérusalem qui restait possession d'Israël, soulignait-il, notamment Jérusalem-Est qui faisait partie intégrante des territoires conquis par les Israéliens depuis 1967. Cette partie des statuts, jugée trop floue, ne sera finalement jamais appliquée.
La signature des accords
1979 - 02:21 - vidéo
Sur Lumni enseignement
Sur le site de l'INA édité pour les enseignants et leurs élèves, retrouvez en accès libre deux dossiers complets sur l'histoire d'Israël et la situation géopolitique locale :