Il y a cinquante ans, le 19 décembre 1971, sortait aux Etats-Unis Orange Mécanique, l’un des chefs-d’œuvre de Stanley Kubrick. En France, le film, qui sortait en avril 1972, déclenchait un débat passionné entre critiques du « Masque et la Plume ». En cause, la représentation de la violence, sujet central du film.
Pour Robert Benayoun, le film propose une lecture « presque inépuisable », au contenu « très profond » et offre une vertigineuse réflexion sur la violence et la légitimité de celui qui l’exerce. Celle de l’Etat, et de ses agents, est-elle plus nécessaire, moins néfaste, que la violence des individus qu’elle se donne pour mission d’éradiquer ?
Véritable « chef-d’œuvre, meilleur film des tous les temps après Citizen Kane », pour un spectateur du public, le film recueille aussi l’enthousiasme d’un spectateur très averti, le jeune Jean-Christophe Cambier, alors élève de 1ère C. Ce dernier juge le film « fascinant », quoique sans engendrer « à aucun moment la terreur », en raison d’une représentation fortement « stylisée de la violence » (effets, musique, accélération, ralentis…).
La critique plus générale du film vient de Georges Charensol, qui, s’il admet la qualité esthétique et divertissante d’un film dont le metteur en scène n’a plus à faire ses preuves, juge que le fond est néanmoins raté, et qu’il est avant tout une démonstration de l'efficacité de la violence au cinéma : « Depuis que le cinéma américain existe, depuis cinquante ans, le sexe et la violence sont les mamelles du cinéma, nous en avons une fois de plus la preuve. Ceci dit, que Kubrick soit un homme extrêmement habile [...] je n’en disconviens pas, mais je continue à prétendre que ce sujet très important, qui est la modification du comportement d’un individu et de savoir si on a le droit d’attenter au fond de l’être humain, car c’est ça le sujet, et bien je continue […] à prétendre que ce sujet n’est pas traité dans Orange Mécanique. »