Nina Companeez, pour de nombreux téléspectateurs, évoque le souvenir d'un feuilleton télévisé des années 1980, Les dames de la côte, mais avant de poursuivre sa carrière à la télé, elle réalisa plusieurs films pour le cinéma cinéma. En 1972, sortait le premier intitulé Faustine et le bel été. Un long métrage qui révélera une pléiade d'acteurs, alors inconnus, qui feraient tous de belles carrières...
En ce mois de février 1972, la réalisatrice et l'un de ses acteurs, le jeune Francis Huster, se sont déplacés à Rouen pour présenter le film. Ils répondent aux questions du reporter local de Normandie Actualités.
Ce dernier rappelle sa carrière comme scénariste et dialoguiste de Michel Deville dans Benjamin ou les mémoires d'un puceau et Raphael ou le débauché. Il lui demande ses motivations. Elle attendait "surtout la possibilité de diriger des comédiens. C'était la chose qui me manquait."
Une distribution jeune, inconnue et prometteuse
Pour ce film, elle précise qu'elle a choisi de jeunes acteurs inconnus ou presque, elle s'en explique ainsi : "j'ai voulu briser le terrorisme du vedettariat et lancer des jeunes comédiens plein de talent et de passion pour leur métier mais qui n'ont pas de noms et qui ont entre 16 et 25 ans. Qui n'étaient pas connus jusque-là. Parmi sa distribution, Isabelle Adjani (16 ans), Jacques Weber (21 ans), Jacques Spiesser (24 ans) et Francis Huster (24 ans)…
Présent à ses côtés, la chevelure ébouriffée et tout sourire, il se présente avec fougue : "Je suis comédien à la Comédie française à Paris. Je viens de créer Volpone de Jules Romains à l'Odéon…" Au cinéma, c'est son deuxième rôle, il avait tourné dans La faute de l'abbé Mouret de Franju. " A propos de ce film, il poursuit : "Ce n'était pas le premier film mais c'est pour moi un nouveau départ car le film a eu beaucoup de succès. Je crois que ça va permettre à une certaine catégorie d'acteurs nouveaux et jeunes, en France, de tourner dans des films qui répondent à un besoin du public de mon âge. De ne pas trouver des acteurs qui soient toujours des beaux garçons mûrs, gominés, bien habillés, mais des gens qu'on rencontre comme ça dans la vie."
"C'est un film assez audacieux sur la jeunesse, l'adolescence (...) où la sensualité a beaucoup d'importance."
Le journaliste demande ensuite ce que Nina Companeez pense du fait qu'on la compare souvent à Musset ou Marivaux. Elle acquiesce mais explique qu'on le disait surtout à l'époque de ses scénarios, "pour "Faustine", on m'a plutôt dit de Colette, parce que c'est un film sur la nature et sur la sensualité. C'est un film assez audacieux sur la jeunesse, sur l'adolescence (…) Je crois qu'on pourrait plus le comparer aux Claudine de Colette".
Le journaliste souligne que certaines scènes sont assez déshabillées et lui demande si pour elle le nu est une forme d'expression ? Elle y voit plutôt un certain naturalisme : "C'est une forme de naturel. J'ai essayé de traiter la nudité, de montrer un corps nu comme je montrerais un arbre, comme une forme de la nature. C'est un film où la sensualité a beaucoup d'importance, toutes les formes de sensualité. L'odorat, le toucher, la vue… Un film sur la nature, la nature humaine et la nature végétale."
De son film la réalisatrice déclare enfin : "C'est un film sur l'éveil d'une adolescente à l'amour moral et physique. Je trouve qu'il y a une espèce d'hypocrisie qui fait croire que quand on pense à l'amour à 16 ans, on en rêve comme une héroïne de roman de façon très platonique. Or je pense qu'à 16 ans tout s'éveille, le cœur et le corps. Un critique a dit : "c'est le tendre poème de l'éveil au plaisir". Je crois que c'est une très belle définition du film".
Quant à Francis Huster, toujours aussi enthousiaste il ajoute que "des jeunes de mon âge ont pu trouver dans ce film tout ce qui s'est passé quand eux aussi ont découvert l'amour (...) et pas seulement, puisque les comédiens ont reçu des lettres extraordinaires de personnes de 45-50 ans, parce qu'ils avaient retrouvé dans le film tout ce qu'ils avaient oublié (...) de leur jeunesse à la campagne.
Pour aller plus loin
Pour le cinéma : Nina Companeez et "Faustine et le bel été". Interview et tournage. "En faisant du cinéma j'ai l'impression de stopper le temps. je l'immortalise... J'ai eu envie de faire un film alors je l'ai écris. C'est un film autobiographique..." (7 novembre 1971)
Aujourd'hui madame : Nina Companeez et les acteurs de "Faustine et le bel été". Nina Companeez et les acteurs du film chez elle, dans son jardin. (Reportage en couleur, 4 janvier 1972)
D'autres oeuvres de Nina Companeez
Discorama : Nina Companeez à propos du film Adorable menteuse et de l'interprétation de la chanson La menteuse par Marina Vlady. (3 mars 1962 )
Pour le cinéma : Brigitte Bardot et Nina Companeez sur le tournage de "L'histoire très bonne et très joyeuse de Colinot trousse-chemise avec Brigitte Bardot. (7 septembre 1973)
JT Aquitaine : Sur le tournage du film de Nina Companeez "L'histoire très bonne et très joyeuse de Colinot trousse-chemise" avec Brigitte Bardot et Francis Blanche au château Fénelon près de Sarlat. ( Reportage en couleur, 9 juin 1973)
Samedi et demi, Nina Companeez évoque le tournage des "Dames de la côte" et ses motivations à réaliser ce feuilleton sur le rôle des femmes pendant la Première Guerre mondiale. (12 janvier 1980)
Dans la même émission Claude Barma évoque la place des femmes au cinéma.
Samedi et demi : "Les Dames de la côte" Fanny Ardent et Nina Companeez. Actrice et réalisatrice évoquent le tournage du téléfilm Les Dames de la côte. (12 janvier 1980)
Samedi et demi : Martine Chevalier, Nina Companeez évoquent le tournage du téléfilm "Les Dames de la côte" (12 janvier 1980)
Dans l'émission Aujourd'hui la vie, la réalisatrice vient présenter sa pièce de théâtre Le sablier (26 octobre 1984)
Pourquoi elle passe au théâtre avec cette pièce qu'elle a écrit et mise en scène, la direction des comédiens de théâtre, la différence avec le cinéma et extrait d'une répétition, ses personnages...
Florence Dartois