Volodymyr Zelensky : président de l'Ukraine, le rôle de sa vie

Dès le 24 février 2022, après la déclaration de guerre de Vladimir Poutine contre l'Ukraine, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fait montre de courage tout en rassurant ses concitoyens : « Pas de panique, nous sommes prêts pour tout, nous allons vaincre ».

Mercredi 21 décembre, lors d'un déplacement historique à Washington, il a assuré l'Ukraine tiendra «ses positions et ne se rendra jamais». Sous les applaudissements du Congrès américain, il a assuré que l'argent versé à l'Ukraine n'était pas de la «charité» mais un «investissement».

Depuis le début des frappes russes, le jeune président de 44 ans est apparu chaque jour pour encourager ses troupes, appeler ses concitoyens à résister, balayer les rumeurs de reddition, ou encore saluer la formation d’une «coalition internationale» et l’envoi «d’armes, de médicaments de nourriture, de carburant et d’argent» pour soutenir l'Ukraine. Dans ce conflit, l'ancien acteur semble prendre une dimension présidentielle incontestable. Pourtant, en 2018, l'annonce de sa candidature n'avait pas vraiment été prise au sérieux. Une candidature étonnante, d'abord raillée, puis critiquée qui inquiétait certains commentateurs.

L’archive en tête de cet article est l’un des premiers portraits consacrés à Volodymyr Zelensky, lorsque l'acteur-comique briguait la présidence de l’Ukraine. Ce 24 mars 2019, une question taraudait la communauté internationale : les Ukrainiens, lassés des hommes politiques jugés corrompus, allaient-ils lui donner sa chance ?

De président virtuel à candidat réel

Le premier sujet présente Volodymyr Zelensky comme un humoriste sans aucune expérience en politique. Il était alors la vedette d’une série télévisée humoristique intitulée « Serviteur du peuple », qui rencontrait un grand succès en Ukraine. Le comique incarnait un professeur d'histoire intègre qui se retrouvait malgré lui propulsé à la tête du pays. Un président idéaliste qui n’hésitait pas à dire leurs 4 vérités aux députés corrompus. Volodymyr Zelensky était le producteur de « Serviteur du peuple » et son personnage lui avait semble-t-il donné d’autres ambitions, celles de participer lui-même à la vie politique de son pays.

À la surprise générale, en décembre 2018, à la veille de Noël, le comédien avait donc officiellement annoncé à ses compatriotes sa volonté de se présenter à l'élection présidentielle. À l’époque de ce portrait, en mars 2019, Volodymyr Zelensky était déjà largement en tête des sondages. Interrogé sur sa candidature, il déclarait comprendre que son personnage dans la série ait pu contribuer « à la popularité du candidat » qu'il était. Il expliquait que son rôle n’était pas sorti de nulle part : « Quand on l’a inventé, on a voulu lui donner une morale et des principes qui d’abord sont les nôtres. »

Volodymyr Zelensky arrivait cinq ans après la révolution de Maïdan, dans une économie poussive, que le président sortant, Petro Porochenko, n’avait pas réussi à relancer. Le pays était aussi gangréné par des scandales politiques, la corruption, la guerre dans le Donbass et les tensions avec la Russie bien décidée à conserver la Crimée annexée.

Un micro-trottoir réalisé à Kiev montrait que les Ukrainiens étaient prêts à lui donner sa chance. Le quarantenaire incarnant alors l’espoir d’un avenir meilleur : « Je vais voter Zelensky. C’est une nouvelle génération et avec lui j’espère que ça ira mieux ».

Son programme : bannir la corruption

Ses opposants l’accusaient alors de n’être qu’une marionnette aux mains d’un oligarque (l'homme d’affaires Igor Kolomoïski), lui-même empêtré dans une affaire de corruption et propriétaire de la chaîne où était diffusée la série. Zelensky s’en défendait et jurait que s’il était élu, il serait aussi intègre que le président qu’il incarnait sur le petit écran. C’est ce qu’il affirme dans le sujet ci-dessous, daté du 29 mars 2019. On le voit lors d’une réunion de campagne. À ses côtés, deux anciens ministres, opposés à l’oligarque Igor Kolomoïski, qui avaient quitté le gouvernement : « Ce que j’ai appris d’eux, ce sont les choses à ne pas faire si on ne veut pas voir toutes les réformes qu’on amorce tomber à l’eau. Il faut apprendre de ses erreurs et nous réfléchissons ensemble comment réformer ce pays pour que enfin ça marche. À un moment donné, ils ont jeté l’éponge mais maintenant ils voient se matérialiser une incroyable deuxième chance. »

Dans la vidéo ci-dessus, les jeunes ukrainiens se montraient particulièrement enthousiastes vis-à-vis de cette candidature et expliquaient qu'ils iraient aux urnes. Le statut de comique de Zelensky était même vu comme un avantage. Un jeune homme interrogé à Kiev déclarait d'ailleurs : « Avoir de l’humour, c’est une preuve d’intelligence ». Mais cette candidature inquiétait aussi. Quelques jours avant le scrutin, une politologue s’avouait sceptique devant ce nouveau candidat sorti de nulle part : « On ne sait pas très bien ce qu’il défend et ce qui m’inquiète c’est qu’on ne sait rien de son programme, ni de ses conseillers. »

Malgré ces interrogations, Volodymyr Zelensky, novice en politique, allait gagner l'élection présidentielle avec 73% des suffrages face au président sortant Petro Porochenko. Il affirmait ce jour-là vouloir lancer un processus de paix avec la Russie.

Le 20 mai 2019, l'ancien acteur-comique, fraîchement élu président de l’Ukraine, était investi au Parlement. Les images de ce reportage montrent la cérémonie, une cérémonie qu’il avait déjà vécue, mais virtuellement... dans sa série. Ce matin-là, ce n’était plus un rôle qu'il incarnait. Après avoir prêté serment sur la Bible et la Constitution, il endossait le costume de président et promettait de tout faire pour mettre un terme à la guerre dans le Donbass. Devant des députés hostiles, il annonçait la dissolution du parlement et convoquait des élections législatives anticipées.