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Virginie Despentes : «D'où je viens, il faut du courage pour écrire des livres»

Virginie Despentes : «D'où je viens, il faut du courage pour écrire des livres»

Cinq ans après la fin de sa trilogie à succès «Vernon Subutex», l'auteure sort un nouveau roman intitulé «Cher connard» dans lequel elle aborde des débats très actuels de notre société, comme le harcèlement sexuel ou les réseaux sociaux, mais aussi la détermination sociale, un sujet qu'elle traitait déjà en 1998.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 16.08.2022
 

Virginie Despentes inaugure la rentrée littéraire avec la parution de son nouveau roman Merci connard. L'autrice livre un récit très ancré dans le présent en abordant la plupart des sujets qui ont marqué l'actualité de ces dernières années : le harcèlement sexuel, le féminisme, le patriarcat, la tyrannie des réseaux sociaux, le jeunisme, la drogue, mais aussi des thèmes qui lui sont chers, comme celui du déterminisme social. Cette question, elle l'évoquait déjà la fin des années 1990 dans ses premiers romans, notamment dans son troisième, Les belles choses. Un roman qu'elle présentait dans « Le cercle de minuit » de Philippe Lefait, le 7 octobre 1998.

Dans l'archive en tête d'article, l'écrivaine était reçue sur le plateau en compagnie de Sophie Calle. Au début de son interview, le journaliste opposait le travail de l'artiste conceptuelle, notamment sa quête du non-événement, à l'écriture de Virginie Despentes, basée au contraire sur les vicissitudes qu'elle avait dû affronter au cours de sa vie. L'auteure confirmait en effet qu'elle avait connu les galères, les petits boulots, bref la vie difficile. Elle reconnaissait volontiers s'être servie de ce parcours dans son écriture. Mais, tout comme la plasticienne, elle souhaitait avoir elle aussi « une belle vie », la galère ce n'était pas un choix, « j’ai pas envie d’avoir une vie pourrie », déclarait-elle.

Elle allait raconter ensuite que le monde d'où elle venait ne la prédisposait pas à l'écriture, qu'elle l'avait fait « par inadvertance », avant de réaliser ce que cela impliquait, car « d'où je viens, il faut du courage pour écrire des livres » disait-elle. Elle confiait qu'écrire l'avait forcée à changer de classe sociale, à apprendre de nouveaux codes et à fréquenter une sorte d'élite sociale.

Vision désenchantée

Virginie Despentes ajoutait, qu'en revanche, elle ne devait cette ascension sociale qu'à sa singularité, à cette originalité qui l'avait faite se démarquer et vendre. Ce style unique, cette écriture ancrée dans un réel, parfois sordide, c'était son bien le plus précieux avouait-elle. « Je n’ai pas intérêt à la perdre, je n’ai que ça, mon écriture », assurait-elle.

A l'époque, sa vision de la société était déjà désenchantée. A la fin de cet entretien, elle la qualifiait même de « grosse partouze mentale ». Elle ne désespérait pourtant pas, rêvant à haute voix, qu'un jour on arrive « à tout foutre en l’air ». Son monde idéal, elle le décrivait comme un univers où les gens occuperaient leurs postes grâce à « leurs compétences », et non plus en fonction de passe-droits.

24 ans après cette interview, les thèmes abordés dans le nouveau roman de l'auteure montrent que le monde idéal dont elle rêvait alors n'est toujours pas à l'ordre du jour. Cette société imparfaite aura au moins eu l'avantage de lui permettre de continuer son ascension littéraire.

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