Traité transatlantique : duel eco entreThierry Pech et Elsa Conesa
[Source : documentation France 3] Barack Obama et les dirigeants européens Herman Von Rompuy et José Manuel Barroso voudraient signer un traité de libre échange transatlantique, pour simplifier les échanges économiques entre eux. Duel Eco du lundi entre Elsa Conesa des "Echos", et Thierry Pech, directeur de la fondation Terra Nova - Elsa, que répondez-vous aux détracteurs de ce grand méchant marché? Que finalement, ça peut nous apporter de la croissance? - E. Conesa : L'idée de ce traité, c'est de bénéficier aux deux marchés, européen et américain. Il y a beaucoup de fantasmes sur ce sujet. Globalement, l'idée, c'est d'essayer de mettre un peu d'ordre dans ces négociations commerciales entre les Etats-Unis et l'Europe. Les échanges entre les Etats-Unis et l'Europe, c'est 40 % du commerce mondial. - P. Loison : Ca marche très bien comme ça, pourquoi il faut encore plus? - E. Conesa : Une grande entreprise de cosmétique française veut exporter aux Etats-Unis des crèmes de beauté, sur les étiquettes, elle a marqué "aqua" pour eau. Aux Etats-Unis, les normes disent qu'il faut que ce soit écrit "water". C'est sur ce genre de choses triviales qu'il faut se mettre d'accord. Cela peut être aussi des choses compliquées. Les détracteurs mettent en avant le sujet du poulet au chlore et des OGM. Les commissaires européens ont été clairs: ça ne fait pas partie des discussions. - P. Loison : Il y a beaucoup de fantasmes, est-ce que ce poulet au chlore, ce boeuf aux hormones, ce sont des armes brandies pendant cette campagne des européennes ou ce sont des vrais sujets, des normes que les Etats-Unis pourraient essayer de nous imposer dans ces négociations? - T. Pech : Ce sont des négociations ont lieu à huis clos. Evidemment, ce serait transparent, on ne parlerait pas de fantasmes. On voudrait que ces négociations soient plus ouvertes. Les fantasmes, il y en a dans les deux sens. Il y a des fantasmes qui font légitimement peur, car on parle de normes sanitaires et de normes environnementales, et dans l'autre sens, en disant que cela créera des bénéfices fantastiques. En réalité, quand on regarde les choses de près, est-ce que cela a profité au Mexique par exemple, l'ouverture du marché américain? On ne sait pas trop. Même sans ce grand traité transatlantique, les frontières tarifaires se sont déjà beaucoup abaissées. Voilà les tarifs douaniers que s'imposent l'Europe et les Etats-Unis. - P. Loison : Alors pourquoi tout ça? C'est tirer les normes vers le bas - T. Pech : Les barrières réglementaires, c'est ça le sujet. Ces barrières réglementaires, il y en a qui sont de nature protectionniste, qui sont des artifices pour empêcher les marchés d'être en concurrence. Il y a des barrières sérieuses, on attend de l'Europe qu'elle se batte, car il y a des choses qui comptent. Les intérêts sanitaires, les préférences collectives qui portent sur les hormones, les OGM, ce sont de vraies préférences démocratiques. - E. Conesa : L'Europe a dit qu'elle se battrait sur le poulet à la javel, les OGM, etc. Mais le sujet n'est pas seulement entre l'Europe et les Etats-Unis, il est à l'échelle du monde. Où doit être le centre de décision? Qui doit édicter ces nouvelles normes? Il faut savoir que, en parallèle, les Etats-Unis négocient avec une douzaine de pays asiatiques. Les négociations sont très avancées. C'est pour cela que l'Union européenne a été à l'initiative de ces négociations. - P. Loison : Sinon, on resterait sur le bord de la route On peut se permettre dans une mondialisation comme on la décrit tous les jours dans ce journal et dans d'autres, de rester moins intégrés économiquement que les autres? - T. Pech : Ce n'est pas la question qui est posée. La question, c'est qui fait les normes? Si on passe les derniers sur le marché des accords, on devra adopter les normes des autres. C'est cela le problème. Il faut qu'on soit intégrés, mais les normes, elles sont légitimées dans le cadre démocratique. Si, demain, comme il en est question dans ces négociations, il existe un tribunal supranational devant lequel les entreprises multinationales pourront venir faire procès aux Etats des décisions qu'ils auront prises au nom des lois adoptées par des parlements légitimes, ça pose un problème. - P. Loison : Le camp du libre-échange, cela vous inquiète? - E. Conesa : En partie oui, mais ces tribunaux, cela fait longtemps que cela existe. Historiquement, c'étaient les pays émergents contre les pays développés. Quand les entreprises des pays développés voulaient exporter, elles voulaient avoir des garanties qu'elles ne seraient pas victimes d'un système judiciaire pas fiable. - T. Pech : Les traités européens sont quand même plus légitimes que ce qu'impose la Chine aux échanges
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France 3 |
Générique | Présentateurs : Patricia Loison, Louis Laforge Participants : Thierry Pech, Elsa Conesa |