« Un bateau de pêche a été pris dans un tourbillon : c'était la première indication de l'existence d'un volcan. Puis pendant deux jours, l'eau de la mer s'est mise à briller et le volcan est sorti de 130 mètres de profondeur à 120 mètres du niveau de la mer. C'était le 14 novembre 1963. » Il y a 60 ans, une terre émergeait au large de l'Islande : Surtsey. À une trentaine de kilomètres des côtes islandaises, un volcan sous-marin en activité poussait vers la surface assez de lave pour fabriquer une île. Jusqu'au 5 juin 1967, ce volcan continuait son activité pour atteindre finalement sa superficie maximale d'un peu moins de trois km² et 175 mètres de hauteur.
« Voici l’Islande, pays proche du cercle polaire, volcan immense perdu au nord de l'Atlantique. Sol pauvre où tout est paradoxe. (...) Île solitaire au laboratoire naturel de vulcanologie. Douze éruptions terrestres, dont la dernière sous-marine, en un demi-siècle. Région volcanique la plus active du globe, prolongement de l'épine dorsale des Açores. Bon anniversaire Surtsey, volcan que nous appelions il y a un an île des Français. » Au-delà de la rareté d'un tel événement, la spécificité de la naissance de Surtsey est la quantité d'images qui en ont été faites, notamment par des équipes françaises. Exemple avec l'archive des « Coulisses de l'exploit » en tête d'article.
Dans ce reportage de 1964, une équipe française se rendait sur place pour le premier anniversaire de l'îlot et le montage permettait également de faire profiter aux spectateurs d'images exceptionnelles de 1963, d'une « naissance qui ressemble à la fin du monde ». En bonus, un commentaire lyrique typique de la télévision de ces années-là.
Un engouement scientifique international
En un an, l'activité volcanique du « frère cadet de l’Islande, ce monstre, tout aussi froid qu'en perpétuelle ébullition » avait ralenti. « Le cratère est désormais fermé, tel un élément déchainé, le volcan n'a plus d'ouverture vers la mer » expliquait le reportage. Et de poursuivre : « La nature reprend ses droits. Désormais de la lave solide coule, les sables originaux ne subsistent que comme vestiges d'une douloureuse naissance. »
Un événement assez rare pour qu'océanographes, volcanologues et scientifiques du monde entier y viennent observer « la formation d'une nouvelle terre, observe la naissance de vie sur une île stérile, les effets produits par les matières volcaniques ». La lave y était encore brulante.
Une quarantaine d'années plus tard, « Thalassa » rencontrait des scientifiques parmi les quelques-uns autorisés à se rendre sur cette île devenue « laboratoire vivant ». Dans cette archive de 2001 ci-dessous, le volcanologue Sven Jacobson racontait comment Surtsey qui était « née en à peine deux jours » a d'abord été crue « fragile, sans doute éphémère ». Preuve avec des échantillons régulièrement collectés depuis les années 1960, la cendre volcanique s'était finalement solidifiée avec le temps. Elle avait permis à l'îlot, « appelé Surtsey en hommage au géant du feu de la mythologie nordique », de persister.
Naissance de Surtsey en Islande
2001 - 07:06 - vidéo
Un laboratoire à ciel ouvert
« Aux débuts, c'était comme marcher sur la lune, dévoilait un second scientifique, Karl Jonharsson, c'était une terre totalement vierge ». Depuis, de nombreuses espèces se sont installées, dans une emprise d'abord « timide, en équilibre précaire ».
« Cette île est unique, car ici, vous pouvez suivre la colonisation des espèces sans qu'il n'y ait aucune intervention humaine. » Et puis, expliquait-on, « pas mal de plantes sont arrivées sur l'ile et se sont installées là toutes seules les huit ou dix premières années après l'éruption, à cette époque, on comptait une vingtaine d'espèce. Et puis des oiseaux sont venus coloniser la partie sud de l'île, une colonie de goélands. Leur arrivée a entrainé une explosion d'espèces de plantes. » À l'image, des phoques gris qui avaient entamé une phase de reproduction à Surstey dès les années 1980.
Avec toutes ces années de recherche, « il y a beaucoup de questions auxquelles on aimerait trouver une réponse : pourquoi ne trouve-t-on pas certaines espèces ici, pourquoi certaines mettent plus de temps à s’installer que d'autres ? »
Malgré tout, Surtsey connait une intense érosion, rongée par les vents et la mer. Aujourd'hui, elle ne mesure plus qu’un peu plus d'un kilomètre carré.