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Avec les réservistes de l'armée, un des socles d'Israël

Avec les réservistes de l'armée, un des socles d'Israël

À la suite des attaques terroristes menées par le Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, le ministère de la Défense israélien a mobilisé 300 000 réservistes en 48 heures. L'armée israélienne a pour particularité de reposer sur une majorité de réservistes. Le service militaire est obligatoire et mixte, et chacun peut être mobilisable jusqu'à ses 45 ans.

Par Florence Dartois - Publié le 10.10.2023 - Mis à jour le 23.01.2024
Réservistes israéliens - 1988 - 02:49 - vidéo
 

L'ACTU.

Depuis le 7 octobre 2023 et l'attaque du Hamas en Israël, des dizaines de milliers de réservistes de l'armée israélienne ont été mobilisés dans la riposte opérée dans la bande de Gaza. Depuis cette date, de nombreuses pertes ont été enregistrées. Ainsi, le 21 janvier 2024, 24 militaires dont 21 réservistes ont été tués au cours des combats, soit la perte quotidienne la plus lourde. Le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a annoncé l'ouverture d'une enquête sur ce qu'il a qualifié de «désastre».

L'armée israélienne, aussi appelée « armée du peuple », a pour particularité d'être essentiellement constituée de réservistes. Ses rangs comptent environ 161 000 soldats, mais peut mobiliser jusqu'à 425 000 réservistes.

L'HISTOIRE.

L’armée israélienne est née le 26 mai 1948. Le gouvernement israélien était alors dirigé par David Ben Gourion qui décréta officiellement l'unification des différents groupes paramilitaires préexistants sous la bannière unique de l'Armée de défense d'Israël. Le Premier ministre avait choisi ce nom pour exprimer l'idée que l'armée israélienne serait essentiellement défensive, mais aussi en référence à la Haganah, l'ancienne organisation militaire juive qui existait avant la création de l'État d'Israël. « Haganah » signifiait Défense et c'est en grande partie sur son modèle que la nouvelle armée fut construite.

Dès sa création, l'armée est organisée autour des réservistes. Il avait été décidé que tout Juif ferait son service militaire et resterait mobilisable à chaque instant, de 21 ans à 45 ans. Seuls les Israéliens juifs orthodoxes furent exemptés de service militaire, en vertu d'un accord conclu entre Ben Gourion et les représentants des Juifs orthodoxes.

On peut se faire une idée de la puissante armée avec l'archive ci-dessous. Elle présente les troupes et les équipements de l'armée. Il s'agit du défilé des troupes organisé à Haïfa en 1953 à l'occasion du cinquième anniversaire de la naissance de l’État d'Israël. La parade s'était déroulée en présence de David Ben Gourion et avait duré deux heures.

Fête de l'indépendance à Haïfa
1953 - 00:30 - vidéo

Des femmes soldats apparaissent dans cette archive. En effet, l'armée israélienne possède cette particularité d'être mixte et d'incorporer des femmes dans ses rangs. Le service militaire est devenu obligatoire pour les femmes en 1949. Il est plus court que pour les hommes, deux années contre trois.

L'archive ci-dessous est extraite du journal des Actualités françaises du 4 juillet 1956, elle montre la cérémonie de promotion au grade d'officiers de femmes soldats à Tel Aviv. Relevons tout de même la note sexiste du commentaire : « Les défilés y gagneront un peu de charme ... »

Femmes soldats en Israël
1956 - 00:27 - vidéo

« Chaque Israélienne fait son service militaire et suit le peloton tout comme les hommes ».

Cette intégration de la gent féminine dans les rangs de l'armée ne fut pas du goût de tous. En 1953, des religieux traditionalistes avaient manifesté en masse contre le service militaire national obligatoire des femmes, sans que le gouvernement fléchisse.

L'ARCHIVE.

Les réservistes sont le socle de la défense du pays. En situation d’urgence, l’ordonnance numéro 8 permet au ministre israélien de la Défense de les rappeler du jour au lendemain et pour une durée indéterminée. Nos archives comptent de nombreux reportages sur ces soldats des deux sexes, de tous les âges et de toutes les origines sociales. Celui proposé en tête d'article date de juin 1988. Il a été réalisé par le correspondant d'Antenne 2 de l'époque, Charles Enderlin.

Durant plusieurs jours, le journaliste avait suivi des soldats réservistes envoyés dans les territoires occupés, notamment dans un village situé près de Ramallah en Cisjordanie. Il dressait le portrait de David. Dans le civil, l'homme était enseignant à Jérusalem et père de quatre enfants. Depuis trois semaines, il portait son uniforme kaki de réserviste. Il devait rester 60 jours sur zone. Souriant (et casqué), dans une jeep, il expliquait la difficulté à quitter sa famille et son travail, mais qu'il faisait son devoir. Son commandant, directeur d'un grand hôtel dans le civil, veillait strictement à l'application des ordres. « Pas de bavures dans son unité qui compte des militants d’extrême gauche et d'extrême droite », précisait le commentaire.

La caméra filmait ensuite un incident. De jeunes lycéens palestiniens attaquaient la patrouille à coup de pierres. Quelques minutes plus tard, la jeep revenait avec un jeune homme ligoté, les yeux bandés. Le lycéen exprimait ainsi son refus de voir la présence israélienne, expliquait David. Le réserviste se justifiait : « Nous sommes obligés d'être ici pour garder le calme et garder la paix dans le pays, sur les routes d'Israël... et même dans ce village. »

Le reportage de Charles Enderlin montrait néanmoins l'existence d'un malaise au sein même de l'armée. Un autre réserviste exprimait ses doutes et s'interrogeait sur le sens de cette arrestation et plus généralement, sur celui de sa mission : « Il croit que c'est son pays et nous, notre pays, alors c'est la bagarre (...) C'est plutôt le travail de la police pas de l'armée. »

Des réservistes récalcitrants

Ce malaise de certains réservistes vis-à-vis des Palestiniens apparait dans plusieurs archives et notamment en 2002. En pleine seconde intifada (septembre 2000-février 2005) des émeutes palestiniennes dans les territoires occupés avaient été immédiatement réprimées par l'armée israélienne. En janvier 2002, le gouvernement décrétait le blocus de cinq villes autonomes palestiniennes, l'armée menaçant d'occuper des secteurs d'où elle s'était retirée après les accords d'Oslo en 1993. Dans ce contexte de tensions, la contestation commençait à gagner du terrain dans l'armée israélienne, certains soldats n'hésitant plus à refuser de servir dans les territoires occupés. Un premier reportage de Charles Enderlin avait donné la parole aux réfractaires. Certains dénonçant des ordres amoraux.

Israël refus des réservistes
2002 - 01:39 - vidéo

Un mois plus tard, ce mouvement de contestation encore minoritaire prenait davantage d'ampleur. L'archive à découvrir ci-dessous date du 6 février 2002, elle a été diffusée dans le 19-20 national de France 3. À l'époque, la polémique enflait en Israël alors que des soldats et des officiers dissidents de réserve venaient de déclarer publiquement leur refus d'accomplir leur période annuelle de service (les soldats effectuent trois ans de service militaire et un mois de réserve par an jusqu'à 45 ans). Ils refusaient désormais de participer aux opérations. Une pétition avait été signée par 52 gradés.

Grogne réservistes Tsahal
2002 - 03:03 - vidéo

Grogne des réservistes de l'armée israélienne.

Visage caché, un officier de l'armée israélienne expliquait sa position : « Nous considérons que cette occupation des territoires est immorale et anti-démocratique, expliquait David. Il poursuivait : « Les Palestiniens n'y ont plus aucun droit. Pour défendre nos colonies, on fait souffrir cette population civile innocente. On empêche les Palestiniens de sortir de chez eux, on détruit leur maison. Le meilleur moyen de défendre les colons d'Israël, c'est de mettre fin à cette occupation des territoires. »

Depuis ce mouvement de protestation, des dizaines de soldats israéliens appelaient l'association pacifiste « Yesh Gvul» pour savoir ce qu'ils risquaient. À cette date, seuls les deux initiateurs de la pétition, Yaniv Itzkovich et David Zonshein, avaient été temporairement relevés de leurs fonctions, mais aucune sanction n'avait été prononcée.

La fin du reportage suivait une patrouille qui protégeait une colonie proche du village de Yaquir en Cisjordanie, d'où partaient de fréquentes attaques de roquettes. Ici pas de contestation, mais un malaise et du fatalisme. Un sergent expliquait qu'il n'avait pas d'autres choix que d'exécuter les ordres : « Ce qu'on fait ici, c'est immoral, mais on n'a pas le choix. Il n'y a pas d'autre façon de le faire (...) pour éviter que des terroristes arrivent au milieu d'une ville, [se fassent] exploser et tuent 40 personnes », déplorait-il. Il était difficile alors de déterminer si ce mouvement était passager ou le début d'une contestation plus profonde. Malgré cette contestation, le patriotisme restait de mise chez une majorité de réservistes.

Ce reportage de TF1 en date du 30 mars 2022 montrait le retour des réservistes dans les divisions. Ils quittaient leur vie civile et leur famille du jour au lendemain et pour une durée indéterminée. Il leur faudrait rapidement retrouver leurs réflexes militaires.

Rappel des réservistes en Israël
2002 - 02:20 - vidéo

Le pays, entouré par des ennemis potentiels, doit être prêt à se défendre. Rester à niveau, retrouver ses automatismes, c'est essentiel pour les réservistes. Le reportage à regarder ci-dessous a été diffusé le 5 janvier 2009 dans le 20 heures de France 2. Dorothée Olliéric s'était rendue dans le sud d'Israël dans un camp d'entraînement des réservistes qui se préparaient à une guerre en milieu urbain. Il était déjà question de Gaza et pour l'occasion, un quartier avait été entièrement reconstitué par l'armée israélienne.

Cette mise en situation de type guérilla urbaine était essentielle pour permettre aux soldats d'être efficaces sur un terrain de guerre : séances de tir, briefings, préparation matérielle et psychologique étaient au programme de cette remise à niveau. Les militaires étudiaient tous les scenarios « pour demain éviter les pièges », expliquait la journaliste.

Interrogé, le porte-parole de l'armée livrait des propos qui résonnent avec l'actualité : « Sur un terrain comme Gaza, on a des ennemis qui utilisent des civils comme boucliers humains, on entraîne nos hommes pour qu’ils se préparent à ça. »

Le camp des réservistes de Tsahal
2009 - 02:08 - vidéo

Avec les « enfants de Tsahal »

Du 3 au 7 novembre 2008, le 13 heures de France 2 a consacré une série en 4 parties sur la préparation et le quotidien des « enfants de Tsahal », ces jeunes, homme ou femme, qui font leur service militaire en Israël. S'il est obligatoire, ils sont de plus en plus nombreux à vouloir échapper à ce devoir. 30% d’exemptés cette année-là. Mais la plupart d'entre eux acceptent ce sacrifice, par obligation, pour défendre leur pays, d'autres sont volontaires et viennent parfois de très loin pour s'engager. Nous suivons notamment la jeune soldate Victoria, 20 ans, Marocaine venue de France, dans un centre d'entraînement au nord de l'Israël. Les quatre épisodes sont à regarder ci-dessous.

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