« L’académie Goncourt, une véritable institution, qui depuis 72 ans révèle les meilleurs écrivains français. Mais, cependant, combien d’auteurs, aujourd’hui célèbres, a-t-elle ignorés ? », s'interrogeait un JT en 1972. Mais, surtout combien d’autrices ont été ignorées ?
Créé en 1904, le Goncourt, prix littéraire le plus prestigieux de France, n’a récompensé que 12 femmes, soit 10 % des lauréats. « Au deuxième tour, le prix est décerné à Madame Elsa Triolet pour son livre Le premier accroc coûte 200 francs ». La première femme à recevoir le prix fut en effet Elsa Triolet, en 1945.
Du côté du jury, la même année, c’est sans grande surprise la même histoire. « Monsieur Roland Dorgelès, Monsieur André Billy, Monsieur Francis Carco, Monsieur Léo Larguier ... », des hommes, encore des hommes, le jury du Goncourt était énuméré dans cette archive de 1945.
Seule une femme jurée. Il s'agissait de Colette, la deuxième à faire partie du jury. « ... et Madame Colette se sont réunis pour décerner le prix Goncourt. » C’est d’ailleurs elle qui fut la première femme présidente du prix Goncourt en 1949. Une activité présentée dans cette archive de 1953 : « Colette a choisi de procéder par élimination successive. Et dit-elle, heureusement, mon mari m’apporte une aide précieuse pour les premières sélections. »
De Marguerite Duras à Leïla Slimani
Parmi les lauréates du prix Goncourt, de grands noms de la littérature : Simone de Beauvoir en 1954, Marguerite Duras en 1984. En 1996, le nouveau président de l'Académie Goncourt, François Nourissier faisait retour sur l'attribution du prix à l'autrice de L'Amant : « C’est la première fois que le prix allait à une septuagénaire. Elle avait juste 70 ans Duras. (...) Elle n’avait jamais frôlé un grand prix, elle avait fait son œuvre comme sur une route parallèle à celle des récompenses importantes ou officielles. Elle jouissait de virginité par rapport à cela. » La virginité d’une septuagénaire, quel argument !
En 1998, c’est Paule Constant qui le recevait non sans ironie. « Ça m'étonne, le prix Goncourt est quand même un prix qui n'est pas du tout misogyne. Parce que j’ai écrit un livre où les hommes sont pratiquement absents, où ils ne sont présents que dans le regard des femmes. »
Citons encore Marie Ndiaye en 2009 et la dernière en date, Leïla Slimani, en 2016, qui se disait « très émue, très heureuse, que mon livre ait une telle reconnaissance, d’être reconnue par mes pairs. »