En 2022, les personnalités du spectacle sont peu nombreuses à afficher publiquement leur soutien à un ou une candidate à l’élection présidentielle. Parmi les quelques personnalités à s'être exprimées : Juliette Binoche pour Christiane Taubira, Alain Delon pour Valérie Pécresse ou encore Philippe Chevallier pour Marine Le Pen. Pourtant, si on remonte le temps, ces alliances candidats - artistes étaient légion autrefois. L’archive en tête d’article, extraite du l'émission « INAttendu » du 17 février 2022, proposait un panorama de ces alliances entre personnalités culturelles et candidats.
Les artistes communistes ont été les premiers à s'engager pour leur parti aux côtés des candidats : Simone Signoret, Jean Ferrat, Pablo Picasso ou encore Louis Aragon.
Mais dès la campagne de 1974, un autre candidat s’entoure de vedettes. C’est Valéry Giscard d’Estaing. Inspiré des campagnes présidentielles américaines, il veut que ça brille. C'est ce qu'expliquait très bien l’auteur de chansons politiques Pierre Saka en 1977 : « C’est un peu l’histoire des élections américaines où ils sont beaucoup plus en avance que nous. Alors là, carrément, les artistes prennent un engagement pour un parti, pour un président, pour un garçon qui se présente, pour un candidat. C’est vraiment du show-business. J’espère surtout qu’on ne verra jamais ça en France. » Le candidat réunit alors les stars du moment : Mireille Mathieu ou Louis de Funès.
Plus les années passent et plus les campagnes se parent de paillettes. Surtout du côté du parti socialiste, où chanteurs et acteurs s’affichent volontiers aux côtés de François Mitterrand, tels Renaud ou Gérard Depardieu, en 1988. Les meetings deviennent « des soirées très branchées » à l’image de celui de Lille (29 avril 1988) où Julien Clerc chante Quand les hommes vivront d’amour, repris par le candidat, où celui du Zénith, début mars 1988. Parmi les 5 000 personnes présentes, Pierre Arditi expliquant même que « les vedettes du PS ont été discrètes », ajoutant que dans ce meeting « la parole était aux artistes ». L'acteur précisant qu'il considère que François Mitterrand répond le mieux « à ce que je rêve ou ce que j’espère en tout cas ». Ou Rachid Taha soutenant « le côté humaniste de l’individu ».
La même année, la droite et le centre ne sont pas en reste. Alain Delon allant même jusqu’à recevoir la télé dans son salon pour soutenir Raymond Barre ou participer au clip officiel de campagne du candidat UDF : « Le 24 avril prochain, quand vous placerez votre bulletin dans l’urne, je sais que vous penserez à l’avenir, mais surtout à l’avenir des jeunes. Mais en votant pour Barre vous penserez à l’avenir de la France ».
Campagne « bling-bling »
Campagne de 1995. Les vedettes sont toujours là. Line Renaud soutient son vieil ami Jacques Chirac : « Je croise les doigts pour la France parce que ça serait le bon choix », déclare-t-elle publiquement. Les journalistes commencent à critiquer ce mélange des genres en évoquant le comité de soutien de Lionel Jospin : « Un comité de soutien tellement médiatique qu’on se serait cru sur la croisette. », précisera l’un d’eux dans le 19-20 de F3.
Une communication politicienne qui va encore s'accroître avec Nicolas Sarkozy en 2007. Ce ne sont plus les vedettes qui viennent à la politique mais les candidats qui font appel à eux dans un but électoraliste. Au meeting de Bercy du 29 avril 2007, artistes ou sportifs de renoms proclament leur soutien : Johnny, Gilbert Montagné ou Henri Salvador, en passant par l'humoriste Jean-Marie Bigard.
Pour gagner des électeurs plus jeunes, le candidat fait appel à Doc Gynéco. Lors de l’université d’été de l’UMP en septembre 2006, l’artiste explique son choix de supporter Nicolas Sarkozy, qui représente à ses yeux « un ami avant tout ». Il le qualifiera même de « maître à penser ». Cette campagne que les médias qualifieront de « bling-bling » aura des répercussions pour certains des artistes comme Faudel, très critiqué, qui verra sa carrière brisée, ou comme Doc gynéco également vilipendé, qui déclarera 10 ans plus tard, que cette exposition médiatique avait peut-être été une erreur « vis-à-vis du public ».
Peu d'impact sur les votes
Quant à savoir si le fait de s’afficher avec des vedettes apporterait des voix, rien n’est moins sûr. En 2006 déjà, Jean-Marie Lech, le fondateur d’Ipsos répondait qu’au moment des votes, l’impact était « quasi nul ». Selon ce spécialiste des sondages, les politiques réfléchissaient avec 10 ou 15 ans de retard sur la société française pas dupe de « la ficelle ».
En 2016, dans une enquête Harris Interactive-2016, les Français interrogés étaient 69% à n’accorder aucune importance aux soutiens d’artistes. 71% des Français jugeant même que c’était une mauvaise chose pour un artiste de soutenir un candidat en campagne.
Aujourd’hui, les artistes réfléchissent à deux fois avant de soutenir un candidat. Désormais l’agressivité ambiante, notamment sur les réseaux sociaux, dissuade encore davantage à prendre la parole publiquement.
Inattendu : émission du 17 février 2022
2022 - 25:56 - vidéo