L'ACTU.
« Ce n'est pas simplement une réforme, c'est une cause nationale ». Jeudi 4 mai, Emmanuel Macron a dévoilé sa réforme des lycées professionnels. En visite dans un lycée de Saintes (Charente-Maritime), il a annoncé vouloir faire de ces filières « une voie de choix et une voie par choix ». Ainsi, l'État devrait investir « un milliard d'euros par an ». Trois axes sont priorisés : « La lutte contre le décrochage scolaire, l'amélioration de l'insertion professionnelle et la reconnaissance du travail et de l'engagement du corps enseignant. »
Parmi les propositions concrètes : une gratification de l'ordre de 50 à 100 euros par semaine versée par l'État aux lycéens en stage. Un point qui crispe, comme l'a expliqué Sigrid Gérardin secrétaire générale du syndicat SNUEP-FSU : « Donner des aides financières à nos élèves de lycées professionnels, qui sont majoritairement issus de milieux populaires, c'est une bonne chose. Mais c'est conditionné au stage en entreprise, (....) on devrait mettre à contribution les entreprises. » Et de conclure : «C'est l'Éducation nationale qui va offrir de la main d’œuvre gratuite.»
LES ARCHIVES.
Le « baccalauréat professionnel, nous permettra d'avoir je l'espère 80 % d'une classe d'âge en l'an 2000 qui ira jusqu'au niveau du baccalauréat. » En 1985, Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'Éducation nationale, portait une réforme majeure de l'enseignement professionnel. À la place des lycées d'enseignement professionnel, ou LEP, des lycées professionnels étaient créés pour porter le tout nouveau baccalauréat professionnel.
Dans l'archive en tête d'article, au micro de l'antenne amiénoise de FR3, le ministre détaillait : « Les élèves qui vont dans les lycées d'enseignement professionnel pour préparer un CAP ou bien un Brevet d'étude professionnelle vont pouvoir prolonger leurs études jusqu'à 18 ans pour avoir un niveau baccalauréat comme c'est le cas dans la plupart des grands pays avancés. » Avec un objectif : « 80 % d'une classe d'âge en l'an 2000 qui ira jusqu'au niveau du baccalauréat. C'est-à-dire deux fois plus qu'aujourd'hui. »
Cette réforme venait réorgansier la filière, qui dès 1959 avait progressivement intégré le système éducatif, avec, entre autres, la réforme Berthoin qui porta jusqu'à 16 ans la scolarité obligatoire et unifia en partie le système scolaire. Dès lors, les centres d'apprentissage existant furent appelés Collèges d’enseignement technique (CET). En 1977, les lycées d'enseignement professionnel les remplaçèrent. Ils avaient pour objectif de préparer un BEP ou un CAP. À l'arrivée du baccalauréat professionnel, ils devinrent donc lycées professionnels.
« Le gouvernement prépare une loi de 5 ans pour l'enseignement professionnel. (...) L'enseignement professionnel permettra de passer un baccalauréat professionnel et celui-ci permettra d'entrer dans des universités technologiques. Les études seront effectuées dans ce qui s'appelait jusqu'à présent des LEP et qui deviendront désormais des lycées professionnels. » Dans l'archive ci-dessous, Roland Carraz, secrétaire d'État à l'Éducation nationale, expliquait : « Actuellement, nous formons encore trop à des métiers qui n'existent plus et pas encore aux métiers qui existeront demain. On s'aperçoit tous les jours que des secteurs professionnels nouveaux ou en voie de constitution ne sont pas couverts par l'Éducation nationale ni d'ailleurs par le système éducatif au sens large. Ce que nous voulons faire avec ces baccalauréats professionnels, c'est donner un enseignement correspondant à un métier. Donc un bac pour un métier. »
20 ans de retard
Comme Jean-Pierre Chevènement, il insistait sur le retard de la France dans ce domaine : « Pour ce qui concerne l'enseignement secondaire, la notion de bachelier ouvrier est déjà une notion tout à fait courante dans les grands pays industrialisés nous avons de ce point de vue 15 à 20 ans de retard. Nous n'avons pas considéré suffisamment tôt l'investissement éducatif comme investissement prioritaire et ce qui est important aujourd'hui c'est de montrer que par la voie d'un métier, d'une qualification professionnelle, on peut arriver au niveau du baccalauréat. »
Création des bacs professionnels - Interview de Roland Carraz
1985 - 01:17 - vidéo
Ce nouveau baccalauréat comprenait des périodes de formation en entreprise et réorganisait également le statut des enseignants, désormais alignés sur les filières générales. Il permet aux titulaires d'un BEP ou d'un CAP de compléter leurs études secondaires et même d'envisager des classes post-bac. Ce bac se préparait donc en quatre ans, soit deux ans après un BEP ou un CAP
Selon Fabienne Maillard, dans son article « Les évolutions de l’enseignement professionnel depuis 1985 : entre innovations et ruptures », ces nouveautés étaient créées « officiellement, pour répondre à plusieurs missions : décloisonner l’enseignement professionnel, réduit jusqu’alors au « second cycle court » représenté par le CAP et le BEP alimenter les nouveaux besoins des entreprises en matière d’emplois et de compétences mais aussi favoriser la généralisation de l’accès au baccalauréat. » Un autre enjeu, favoriser « l’entrée des jeunes dans la vie active », venait en réponse à la fin des Trentes glorieuses qui avait fait monter le chômage des jeunes.
Engouement pour les baccalauréats professionnels et leurs filières
1997 - 01:07 - vidéo
Cette réforme eu l'effet escompté dans les années 1990, période à laquelle les journaux télévisés parlaient d'un « engouement pours les baccalauréats professionnels », comme l'archive ci-dessous.