L'archive en tête d'article est un bon aperçu de la force évocatrice de l'oeuvre du jeune poète né à Charleville-Mézières en 1854. Dans ce poème intitulé L'orgie parisienne ou Paris se repeuple, Arthur Rimbaud nous plonge au coeur d'une capitale exsangue. Il ne parle pas de sa ville d'origine mais de Paris. Ce poème dresse un tableau satirique de la restauration de l'ordre bourgeois dans la capitale dans les jours qui suivirent la Semaine sanglante (21-28 mai 1871). Rimbaud la décrit alors comme une ville morte, utilisant l'image d'un corps en putréfaction, grouillant de "vers livides", c'est-à-dire, en réalité, vivant, agité par "l'immense remuement des forces" qui annonce sa résurrection prochaine.
Dans cet extrait de "Terre des arts" de 1965, le comédien et metteur en scène Laurent Terzieff déploie sa passion du verbe et sa fougue contagieuse dans ce texte tortueux qu'il incarne avec puissance. Il s'agit-là d'extraits choisis du poème.
"Ô cité douloureuse, ô cité quasi morte,
La tête et les deux seins jetés vers l'Avenir
Ouvrant sur ta pâleur ses milliards de portes,
Cité que le Passé sombre pourrait bénir :
Corps remagnétisé pour les énormes peines,
Tu rebois donc la vie effroyable ! tu sens
Sourdre le flux des vers livides en tes veines,
Et sur ton clair amour rôder les doigts glaçants !
Et ce n'est pas mauvais...(…)
(…) Ô cité douloureuse, ô cité quasi morte,
La tête et les deux seins jetés vers l'Avenir
Ouvrant sur ta pâleur ses milliards de portes,
Cité que le Passé sombre pourrait bénir :
Corps remagnétisé pour les énormes peines,
Tu rebois donc la vie effroyable ! tu sens
Sourdre le flux des vers livides en tes veines,
Et sur ton clair amour rôder les doigts glaçants !
Et ce n'est pas mauvais. "
Aucun manuscrit du poème ne nous est parvenu. L'Orgie parisienne ou Paris se repeuple se compose de soixante-douze alexandrins disposés en quatrains à rimes croisées dans la première version imprimée, celle de la revue La Plume (1890), de soixante-seize dans les Poésies Complètes chez Vanier (1895).
Pour aller plus loin :
L'enfance par Béatrice Arnac. (1962)
Comédie en trois baisers par Simone Valère. (1973)
On n'est pas sérieux quand on a 17 ans par Léo ferré. (1987)
Télé-poème : 'le Dormeur du val' de Rimbaud
2021 - 01:21 - vidéo