Le 17 décembre 1931, naissait Igor Barrère. Journaliste et réalisateur pour la télévision, il créa le premier magazine médical télévisé alors qu'il était encore étudiant en médecine. Il raconte ici une extraordinaire anecdote sur l'une de ses émissions médicales.
Véritable homme-orchestre, ce passionné de cinéma devient l'assistant de René Clair et d'Orson Welles dans les années 1950. Il va rapidement quitter les plateaux de cinéma pour ceux de la toute récente télévision, en qualité de journaliste. Il fait ses armes aux côtés des « trois Pierre» : Pierre Desgraupes, Pierre Dumayet et Pierre Lazareff qui travaillent à l'époque sur la mise en place des magazines d'actualité. Igor Barrère poursuit en parallèle des études de médecine auprès des plus grands professeurs de l'époque, tels le professeur Jean Bernard, ou le professeur Jean Hamburger. C'est tout naturellement que l'étudiant propose un concept original : filmer des opérations chirurgicales en direct pour montrer aux Français les progrès de la médecine et de la chirurgie. Ses pairs acceptent d'accueillir ses caméras au bloc, mais à une seule condition, que le jeune homme se serve de ses documentaires pour préparer sa thèse. Marché conclu. « Médicales », sera la première émission du genre sur la RTF. Elle sera diffusée sous différents titres à partir de 1956, jusqu'en 1984.
« Il m'a avalé d'endoscope au bout duquel se trouvait une caméra de télévision »
Dans cette interview du 11 juin 2000, diffusée dans "Télé notre histoire", Igor Barrère revenait sur ses débuts et racontait comment il était parvenu à concilier ses études de médecine à son métier de réalisateur. Il dévoilait notamment les coulisses de l'émission diffusée le 2 juillet 1962. Pour la première fois sa caméra allait filmer une endoscopie, une toute nouvelle technique chirurgicale encore balbutiante. Elle impliquait de rentrer un long tube rigide dans la gorge, puis dans la trachée d'un patient. Un vrai casse-tête comme il le racontait lui-même ici : « C'était le début des endoscopies qui permettaient aux médecins d'aller voir dans la trachée ou l'œsophage mais elles étaient rigides, c’est-à-dire que l'endoscope était une épée en quelque sorte qu'on vous rentrait dans la gorge…» .
L'accord de principe des professeurs obtenu, il lui avait fallu trouver un « patient » consentant. Igor Barrère avait d'abord demandé à des internes de servir de cobayes, ce qui posait trop de problèmes déontologiques. Il avait alors eu une idée de génie : « Je crois que c'est la seule bonne idée de ma vie que j'ai eue pour devenir réalisateur de télévision (...) c'est un avaleur de sabre qui m'a avalé l'endoscope en direct (...) Ça a été probablement l'un des événements les plus grands dans ma carrière.", racontait-il toujours enthousiaste.
L'endoscopie en images
Endoscopie du poumon
1962 - 06:19 - vidéo
Nous vous proposons à présent de découvrir le passage évoqué dans l'interview. Âmes sensibles s'abstenir...
Lorsque l'extrait débute, la caméra est déjà plongée dans l'œsophage, à 28 cm dans le corps de l'avaleur de sabre. Il subit sans « broncher » sa bronchoscopie. Une fois l'examen terminé, le patient répond immédiatement à la question que tout le monde se pose : « Vous avez eu mal monsieur ? »
Après cette première réussite, pendant les trois années suivantes, Igor Barrère réalisera une émission médicale par mois, sorte de cours particuliers qui constitueront le socle de sa thèse de médecine sur la mémoire, qu'il obtint avec succès. Igor Barrère produira au cours de sa longue carrière de multiples émissions d'information, de débats, mais aussi de divertissement comme les célèbres « La Tête et les Jambes » ou « La Caméra invisible », d'abord pour la RTF puis l'ORTF, et pour TF1. Il produira également des émissions pour La Cinquième et TF1. Igor Barrère est décédé le 24 juin 2001.
