L'ACTU.
La Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) a organisé mercredi 22 février un rassemblement à Paris pour dénoncer la menace qui pèse sur les dauphins du golfe de Gascogne, tués en masse par la pêche intensive pratiquée dans cette zone de l'océan Atlantique Nord entre la Bretagne en France et la côte cantabrique en Espagne. L'association dénonce un « massacre » de « milliers de dauphins » et constate que depuis décembre 2022, 400 cadavres de dauphins ont été retrouvés échoués sur les plages du golfe de Gascogne. Selon l'association 10 000 cétacés seraient victimes de la pêche chaque année.
Interrogé sur franceinfo en amont de la manifestation, Allain Bougrain-Dubourg, le président de la LPO, a fustigé l'inaction du chef de l’État. Paraphrasant Jacques Chirac au Sommet de la Terre en 2002, le défenseur des dauphins a déclaré : « L'océan se rougit du sang des dauphins et Emmanuel Macron regarde ailleurs ». Il a annoncé en appeler au Tribunal pénal international et à la Commission européenne pour contraindre la France à prendre des mesures « pour en finir avec ces massacres insupportables qui durent depuis plus de 30 ans ». Selon lui, la disparition des dauphins est avérée et que si rien ne change « dans 40 ans, il n’y aura plus de dauphins dans le golfe de Gascogne ».
Les dauphins victimes de chalutiers, c’est un drame ancien qui était déjà dénoncé par des chercheurs dès 1997. Cette hécatombe de dauphins victimes des chaluts pélagiques dans le golfe de Gascogne faisait même l'objet d'un sujet le 1er mars 1997, dans le JT de 20h00 de France 2.
L'ARCHIVE.
Le reportage proposé en tête d'article débutait sur une plage de galets de l’île de Ré où un nouveau dauphin venait de s’échouer. Inspectant le cadavre, la responsable du centre de recherche des mammifères marins de La Rochelle, Anne Collet, expliquait qu'en deux semaines, elle avait « inspecté et dénombré plus de 400 cadavres de dauphins » dont la mort n’était pas naturelle. Ses expertises mettaient notamment en lumière des « coups de couteaux nets » qui permettaient d’établir que le dauphin avait été pris dans un filet. « Pour pouvoir le libérer, les marins-pêcheurs ont dû couper ses appendices, ajoutait-elle, et puis probablement ils ont essayé de couper la tête de l’animal ».
À l’époque du reportage, on estimait à 5 000 le nombre de dauphins pris dans les filets des chaluts pélagiques chaque année, « des chaluts longs d’une centaine de mètres, trop peu sélectifs selon les scientifiques. Ils étouffent tous les poissons pris dans leurs mailles », décrivait le commentaire. C’était le cas d’un marsouin que la chercheuse s’apprêtait à autopsier dans son laboratoire. Cet examen permettrait de mettre en évidence les signes d’asphyxie qui avait coûté la vie à l’animal. Une asphyxie résultant d’une capture dans un filet d’engin de pêche.
Le journaliste précisait que depuis 15 ans, chaque hiver, les pêcheurs étaient toujours pointés du doigt, malgré les demandes d'une réglementation au plan mondial et européen. Anne Collet proposait une consultation pour « trouver ensemble » des engins de pêche « plus sélectifs » qui ne « détruiraient pas autant les stocks de poissons et les populations de dauphins ». Mais tous les spécialistes des mammifères marins semblaient d’accord, l'ensemble des dauphins du golfe de Gascogne étaient menacés.
2004 : un constat amer
En 2004, la situation s'était encore aggravée. Découvrez ci-dessous un reportage intitulé « Enquête sur les dauphins échoués du Golfe de Gascogne », diffusé dans le magazine du dimanche de France 3 le 28 mars 2004. Des centaines de cétacés s'échouaient alors chaque année sur les rivages de la façade atlantique, seul 10% des cadavres parvenant sur les plages. Depuis le mois de janvier, un bateau de Greenpeace opérait en mer pour observer la mortalité des dauphins : leur cible, les chalutiers. Selon Greenpeace plusieurs espèces de cétacés étaient menacées de disparition dans golfe de Gascogne. Pour le dauphin commun, on dénombrait près de 5% de perte chaque année.
La surveillance du golfe de Gascogne
En 1997, le JT de 20h00 de France 2 consacrait un long reportage sur la surveillance du golfe de Gascogne, « zone à risques, sous haute surveillance » par les contrôleurs des affaires maritimes à bord de la « Gabian ». L’une de leur mission était de faire respecter la réglementation européenne en matière de pêche et de contrôler les chalutiers sur zone. « Et ce n’est pas une mince affaire », commentait le journaliste. Le reportage montrait le contrôle d’un bateau français et d’un chalut espagnol. Les navires espagnols étaient plus gros que les navires français et pêchaient d’énormes quantités de poissons. Un problème pour les autorités, « les contrôleurs français, on ne les aime pas trop chez les Espagnols, ils ont mauvaise réputation, ce sont des fouineurs », précisait le journaliste sur les images des visages anxieux de pêcheurs espagnols... Au bout de quatre heures de fouilles minutieuses, les contrôleurs trouveraient une planque réfrigérée, vide ce jour-là. « Une traque sans fin et sans moyens » concluait le reportage.
Enquête : la vie à bord d'une vedette de surveillance des zones de pêches
1997 - 04:30 - vidéo