Dans l'intimité, le réalisateur des comédies populaires comme Le Corniaud, La Grande Vadrouille ou la La Folie des grandeurs partageait sa vie avec celle qu'on surnomme : "les plus beaux yeux du cinéma", Michèle Morgan. Discret sur son histoire d'amour, en 1967, le couple ouvre pourtant les portes de son domicile à France Roche pour l'émission Tête d'affiche et accepte de livrer sa vision de l'amour et de la vie de couple…
"Je l'ai aperçue dans un éblouissement, une ravissante créature !"
Leur première rencontre, c'est Gérard Oury qui la relate toujours aussi ému par ce souvenir : "Nous nous sommes rencontrés au Cours Simon mais nous nous sommes juste croisés, si je puis dire. Moi, je suis arrivé au Cours Simon, Michèle venait de tourner "Gribouille", elle y revenait de temps en temps. Je l'ai aperçue dans un éblouissement, une ravissante créature et je me suis dit : "Mon Dieu ! Qu'elle est belle ! J'avais moi à ce moment-là 17 ans ½ ou 18 ans. Alors je l'ai regardée avec des grands yeux comme ça et je suis rentré dans la foule anonyme. Un an après, je suis rentré au Conservatoire et nous sommes restés beaucoup d'années sans nous rencontrer."
"Elle avait l'impression d'avoir en face d'elle un garçon absolument empoté !"
Mais le destin va les remettre en présence quelques années plus tard alors que Gérard Oury est comédien... Il tourne avec elle dans le film La belle que voilà en 1949. A l'époque, elle est mariée à Henri Vidal qui tournait aussi dans le film. Gérard Oury joue un imprésario de ballet qui prend en main une ballerine et tient le rôle de méchant. Il garde un souvenir amusé de cette collaboration peu glorieuse : "Et là, je l'attrapais dans un ascenseur et l'embrassais comme une brute et alors, pourtant je ne suis pas particulièrement timide avec les dames... Mais là, j'étais absolument pétrifié. Et souvent nous reparlons de ce baiser de cinéma où elle avait l'impression d'avoir en face d'elle un garçon absolument empoté. Je dois dire que c'est assez rigolo."
En 1958, la comédienne recroise le chemin de Gérard Oury alors qu'il s'essaye à l'écriture de scénario. Michèle Morgan reprend la suite du récit de leur rencontre à épisodes : "Et puis après nous avons tourné. Il a écrit le scénario, avec André Cayatte, du film Le miroir à deux faces. Dans ce film, il jouait aussi le rôle du chirurgien."
"Elle est devenue la femme de ma vie en effet. C'était tout à fait imprévisible et étonnant."
France Roche s'impatiente et demande à Gérard Oury "quand est-ce qu'elle est devenue la femme de votre vie alors ?" Il répond rêveur : "Oh vous savez, ces choses-là se font petit à petit. Elle est devenue la femme de ma vie en effet. C'était tout à fait imprévisible et étonnant. Quand je reviens en arrière et que je repense à tous ces moments de la vie où nous nous sommes rencontrés et que tout d'un coup, elle le soit devenue... Je n'aurais jamais pensé que ça puisse arriver bien-sûr. Nous sommes sortis ensemble, elle était assez triste. Elle avait eu pas mal d'épreuves dans la vie. Henri avait disparu (il est mort d'une overdose en 1959) et les choses se sont faites avec beaucoup de douceur et d'agrément."
"J'ai la chance d'avoir rencontré un homme qui pense comme moi. Nous n'aimons pas la cohabitation."
Une question étonne France Roche et elle la pose sans détours à Michèle Morgan : "Pourquoi ne vous-êtes vous pas remariée ? En effet, le couple ne s'est jamais marié et il vivront chacun chez soi jusqu'à la fin de leur vie.
L'actrice, visiblement embarrassée répond : "ah la la quelle question ! Parce que je suis heureuse dans le célibat et que j'ai la chance d'avoir rencontré un homme qui pense comme moi. Nous n'aimons pas la cohabitation. Nous pensons qu'elle n'est pas favorable à la compréhension, à l'amour. Et il serait idiot de se marier si nous ne voulons pas habiter ensemble. Ça serait bête si on se mariait et qu'on disait "allez chéri bonsoir, je rentre chez moi. Va chez toi."
"J'estime qu'il ne faut pas faire subir sa mauvaise humeur... à la personne qu'on aime."
Gérard Oury ajoute pour sa part que "la forme de vie que nous avons adopté, d'un commun accord, fait que j'estime qu'il ne faut pas faire subir sa mauvaise humeur ou les ennuis que l'on peut avoir dans la vie, que nous avons tous dans mille domaines, à la personne qu'on aime."
Michèle Morgan reconnait bien-sûr que c'était plus facile pour eux car "quand on a la chance de pouvoir habiter deux appartements différents, de pouvoir se retrouver, de pouvoir partir en vacances ensemble et puis, lorsque ces vacances sont finies, de pouvoir rentrer chacun chez soi. Pour moi, je trouve que c'est absolument merveilleux et la chance que j'ai, c'est que Gérard Oury pense la même chose que moi."
"C'est une fausse calme complète... à l'intérieur, il y a quelque chose qui bouillonne."
Gérard Oury décrit enfin les qualités et le défaut de sa dulcinée : "son absence de complications, son honnêteté morale, sa fidélité" quant à ses défauts, il se moque d'elle : "de ne pas vouloir prendre l'avion parce que ça complique beaucoup pour les voyages. J'adore les voyages, j'ai très envie de parcourir le monde dans les moments où je ne travaille pas et Michèle a une allergie complète à l'avion… C'est une sensation qui lui est violemment désagréable. Elle l'a pris quelques-fois, au moment d'aller voir son fils qui était à Hollywood. Elle prenait l'avion pour y aller mais là, vous voyez quel sacrifice maternel cela représentait. C'est une fausse calme complète, c'est quelqu'un qui est très nerveux intérieurement et qui donne des apparences de placidité et de calme mais pas du tout… à l'intérieur, il y a quelque chose qui bouillonne."
Pour aller plus loin
Quelques films de Gérard Oury : Le Corniaud, La Grande Vadrouille, La Folie des grandeurs ou encore Les aventures de Rabbi Jacob, autant de films entrés dans le Panthéon des comédies françaises.
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