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Comment Recep Tayyip Erdogan est arrivé au pouvoir en Turquie

Comment Recep Tayyip Erdogan est arrivé au pouvoir en Turquie

Recep Tayyip Erdogan a été réélu à la tête la Turquie, dimanche 28 mai. Retour sur l'arrivée au pouvoir au début des années 2000, d'abord en tant que chef de parti puis comme Premier ministre.

Par Romane Sauvage - Publié le 11.05.2023 - Mis à jour le 29.05.2023
Elections législatives Turquie - 2002 - 02:01 - vidéo
 

L'ACTU.

L'actuel président turc, Recep Tyyip Erdogan, conservateur et connu pour sa dérive autoritaire, a été réélu à la tête de son pays dimanche 28 mai.

LES ARCHIVES.

« En Turquie, le vote pour les élections législatives a commencé ce matin, le Premier ministre Bulent Ecevit, leader du parti démocratique de gauche devrait être battu par le parti islamiste AKP qui, ce soir, arrive en tête, selon les premières estimations. » Le 3 novembre 2002, la Turquie voyait un tout nouveau parti, le parti de la justice et du développement (AKP), remporter les élections législatives anticipées. Fondé par l'ancien maire d'Istanbul, Recep Tyyip Erdogan, ce parti conservateur apportait l'espoir de sortir d'une crise économique lancinante.

Comme on le voit sur l'archive du 20h de France 2 en tête d'article, la population se pressait pour aller voter. « Parce qu'ici le vote est obligatoire, racontait le journaliste, Mais aussi parce que c'est un bien précieux dans cette Turquie laïque à 99% musulmane, les femmes ont obtenu le droit de vote en 1930, bien avant les Françaises. »

L'espoir d'intégrer l'Union européenne

Un enjeu était celui d'une intégration de la Turquie à l'Union européenne. « Nous voulons faire entendre nos voix et montrer que nous sommes prêt à entrer dans l'Europe et aussi améliorer nos conditions de vie », insistait une électrice. Ainsi, précisait le journaliste : « Les principales formations politiques se sont déclarées favorables à l'intégration de la Turquie dans l'Europe. Presqu'un thème de campagne comme une solution aux problèmes que traverse le pays. »

Alors que l'AKP aussi se disait apte à défendre l'intégration européenne, déjà, l'analyse de certains observateurs turcs permettait d'envisager l'échec du processus d'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, débuté en 1987. « Quoi que nous fassions, ce ne sera jamais assez », disait ainsi l'un d'entre eux au micro de France 2.

Une prise de pouvoir à la faveur d'une législative partielle

Recep Tyyip Erdogan ne fut pas élu lors de ce scrutin, mais son parti, lui, largement. En effet, il avait été condamné à six mois de prison en avril 1998 pour la lecture d'un poème qualifiée d'incitation à la haine. Ainsi, quand l'AKP remportait les élections législatives, il était inéligible.

Un autre ponte de l'AKP, Abdullah Gül fut nommé Premier ministre. Pour autant, Recep Tyyip Erdogan se rendit dans les principaux pays européens, en chef de gouvernement de fait. Ainsi, fin novembre 2002, il était en France et, comme on l'entend dans l'archive ci-dessous, il était en duplex avec David Pujadas pour parler de la place de la Turquie en Europe.

Duplex de Recep Tayyip Erdogan
2002 - 03:42 - vidéo

En France, pays pour qui la laïcité est essentielle à la démocratie, la dimension très religieuse de ce nouveau dirigeant inquiétait. « Pouvez-vous nous dire clairement, "non la Charia ne sera pas appliquée en Turquie, il ne s'agit pas d'un régime islamiste" ? », demandait le présentateur.

L'ancien maire d'Istanbul se montrait alors offensé : « Ce parti, créé il y a quinze ans de cela, et est un parti différent des autres et ces questions sont à la rigueur déplacées, car nous ne sommes pas un parti islamiste. L'expression parti islamiste est fausse. » Et de conclure : « Nous sommes démocratiques, laïques, dans le cadre d'un État de droit. Nous sommes certainement conservateurs, mais avant tout démocrate. » L'entretien se terminait par une plaidoirie d'Erdogan en faveur de l'intégration à l'Europe.

À la faveur d'une élection législative partielle début 2003 obtenue par l'AKP avec l'argument d'un vice de procédure, le leader conservateur fut finalement élu puis nommé Premier ministre. L'archive ci-dessous insistait sur le caractère opportun d'une telle élection pour les États-Unis. Le journaliste expliquait : « En Turquie, en revanche, les choses pourraient s'arranger pour les américains. Dans quelques jours le nouvel homme fort du pays sera Recep Tayyip Erdogan, son élection annoncée au poste de premier ministre devrait favoriser le déploiement des troupes américaines dans le pays. »

20 ans de pouvoir et d'autoritarisme

Quelques années plus tard, en 2014, le dirigeant était finalement élu président de la République. L'archive de Soir 3 ci-dessous annonçait : « Sa victoire ne faisait aucun doute, le voilà président de la République turque. Recep Tayyip Erdogan a été élu au suffrage universel direct, c'est une première dans l'histoire du pays. L'ancien Premier ministre islamo-conservateur prolonge ainsi de cinq ans son règne à la tête de la Turquie. » Là-bas, précisait le journaliste, « l'opposition craint une dérive autoritaire. »

Recep Tayyip Erdogan, fort de sa victoire, promettait : « Nous continuerons notre combat pour améliorer la démocratie et l'installer durablement. » Pourtant, détaillait le journaliste, le « leader sans partage » était « un personnage trouble ». En effet, « d'un côté, il est l'homme qui a soutenu le développement économique de son pays. De 2002 à 2012 la Turquie est le membre de l'OCDE qui enregistre la plus forte croissance. En tant que chef du gouvernement, le pays lui doit de nombreux avancements, notamment le processus d'adhésion à l'Union européenne. » Et pourtant, « l'ancien maire d'Istanbul est aussi accusé de dérives autoritaires, n'hésitant jamais à user d'un discours populiste. »

Celui qui était surnommé le sultan, se rêvait dès 2014, « en président jusqu'en 2023, date du centième anniversaire de la Turquie moderne fondée par Kemal Ataturk à qui Erdogan rêve de succéder dans les livres d'histoire. » Pari réussi.

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