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En 1978, la contraception gratuite existait déjà mais personne ne le savait

En 1978, la contraception gratuite existait déjà mais personne ne le savait

Olivier Véran, le ministre de la Santé, a annoncé jeudi 9 septembre la gratuité de la contraception pour les femmes jusqu'à 25 ans. Une avancée dans un contexte économique compliqué. Mais saviez-vous que dès les années 1970 il était possible de se procurer une contraception gratuite ? Explications.

Par Florence Dartois - Publié le 10.09.2021 - Mis à jour le 10.09.2021
Témoignage femme et planning familial - 1978 - 12:51 - vidéo
 

Jeudi 9 septembre, sur France 2, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé que la contraception serait désormais gratuite pour les femmes jusqu'à 25 ans (l'âge de l'indépendance sociale et économique), et non plus réservée aux jeunes filles de moins de 18 ans. Une mesure justifiée selon lui par "un recul de la contraception chez un certain nombre de jeunes femmes", souvent pour des "raisons financières". La mesure est assez large puisqu'elle permettra "une prise en charge de la contraception hormonale, du bilan biologique qui peut aller avec, de la consultation de prescription et de tous les soins qui sont liés à cette contraception jusqu'à 25 ans", a déclaré le ministre.

Une bonne nouvelle pour la coprésidente du Planning familial, Caroline Rebhi, qui a déclaré sur franceinfo : "Cela répond aux inégalités d'accès à la contraception un peu partout […] Aujourd'hui, si vous vouliez avoir accès à une contraception de manière gratuite et anonyme [de 18 à 25 ans] , il fallait vous rendre dans un centre de planification, par exemple. Il n'y en a pas partout […] cela sera accessible en ville de la même manière que pour les mineurs. C'est plutôt une bonne chose."

Depuis sa création en 1956, le Planning familial a pour mission de diffuser l’information sur le contrôle des naissances. Ce mouvement militant défend le droit à la contraception, à l’avortement et à l’éducation à la sexualité. L’association est implantée sur l’ensemble du territoire national et à l’outre-mer. Aujourd’hui la confédération du Planning familial rassemble 72 associations départementales et 9 fédérations régionales. Cette question de la contraception a toujours été au centre de ses combats et elle ne s'est pas résolue avec sa légalisation, en décembre 1967, avec le vote de la loi Neuwirth, ni par le vote de la loi Veil. L'archive en tête de cet article date du 17 octobre 1978. A l'époque le Planning familial alertait déjà sur l'insuffisance du recours à la contraception pour des raisons économiques comme aujourd'hui mais pour un motif plus insidieux, celui de la communication.

"Très peu de gens savent qu'ils peuvent obtenir une contraception gratuite"

Au Planning familial d'Amiens, en ce mois d'octobre 1978, trois responsables dressent le bilan des conditions de l'application de la loi Veil relative à l'interruption volontaire de grossesse, votée en janvier 1975. Un bilan mitigé dans le département de la Somme où la loi était encore mal appliquée, faute de moyens et d'informations. Judith Radiguet, la responsable du Planning familial d'Amiens, regrette avant tout - et déjà - le faible usage de la contraception. Elle l'explique alors principalement par un manque d'information : "C'est ça le drame. Si l'information sur la contraception était plus diffusée, était démultipliée, il y aurait peut-être un espoir que le nombre d'avortement diminue mais pour le moment, il n'y a aucun espoir de ce genre. Donc 4 ans après le vote de la loi, la situation est en gros aussi dramatique qu'avant … et beaucoup de gens pensent que le problème est réglé."

A côté d'elle, une autre membre du Planning familial, sans doute infirmière, insiste sur l'absence d'information concernant la gratuité de la contraception dans certaines conditions, notamment dans les hôpitaux : "Le centre d'information sur la contraception de la maternité de l'hôpital doit normalement donner des informations sur la contraception mais fait assez peu de publicité. Et très peu de gens savent qu'ils peuvent obtenir une contraception gratuite à l'hôpital." Une solution simple qui résoudrait la question économique pour accéder à un contraceptif : "Ce qui fait que ça peut poser des problèmes pour des femmes qui n'ont pas d'argent devant elles et d'aller voir leur médecin traitant alors qu'elles ont la possibilité de contraception gratuite à l'hôpital. Mais il n'y a pas de publicité…", conclut-elle.

La gratuité : pour qui et quoi ?

Judith Radiguet reprend la parole et alerte sur un autre point tout aussi important : "Il faudrait se pencher sur les raisons qui font que la contraception est si peu diffusée et si peu acceptée. Or très souvent les médecins au centre disent : on a beau faire de l'information, les femmes n'en veulent pas ! Et on ne se pose pas les questions plus profondément. C'est vrai que très souvent les femmes ne sont pas convaincues que pour éviter l'avortement, pour avoir une vie sexuelle, disons tranquille, du point de vue de ma maternité, il faut employer un moyen de contraception". Elle concluait : "Il y a des barrages psychologiques très profonds, sûrement".

Le coût de la contraception, bien que gratuite à l'hôpital, restait pour le gouvernement et les associations un obstacle majeur à son utilisation, notamment chez les adolescentes. En octobre 2012, la ministre de la Santé, Marisol Touraine annonçait le remboursement à 100% pour les jeunes filles de 15 à 18 ans. Mais dans la vidéo ci-dessous, le professeur Israël Nisand, obstétricien, estimait que cette annonce n'aurait d'intérêt que si on informait les jeunes dans les écoles et si on formait les médecins. La question de l'information était donc toujours d'actualité en 2012.

La nouvelle mesure annoncée par Olivier Véran prend en compte le coût financier de la contraception mais n'aborde pas la question de sa désaffection du recours à la contraception qui pourrait aussi expliquer cette baisse. Selon un baromètre de l'agence sanitaire Santé publique France publié en septembre 2018, à l'occasion de la Journée mondiale de la contraception, si la pilule restait le moyen de contraception le plus utilisé, notamment chez les plus jeunes femmes, sa désaffection progressait notamment depuis 2012, suite au débat sur les risques d'AVC et de thromboses liés aux pilules de 3e et 4e génération, profitant à d'autres méthodes comme le stérilet, le préservatif ou l'implant.

Il faut également noter que le ministre de la Santé n'englobe que la "contraception hormonale", qui était déjà remboursée pour les moins de 18 ans et sera étendue jusqu'à 25 ans, à partir du 1er janvier 2022. Cela comprend certaines pilules contraceptives de 1ère et 2e génération (les moins chères), l'implant contraceptif, le DIU (stérilet) hormonal ou en cuivre, ainsi que le diaphragme. Mais l'Assurance maladie ne remboursera pas les pilules de 3e et 4e génération, le préservatif féminin, l'anneau vaginal, le patch, les spermicides et la contraception définitive (ligature des trompes).

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