Dans la matinée du 2 juin 1953, 3 millions d’Anglais se pressent dans le centre de Londres pour acclamer le somptueux carrosse royal tiré par huit chevaux. A son bord, Elizabeth Windsor se dirige vers l’abbaye de Westminster pour y être couronnée reine du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. Celle qui n’aurait jamais dû monter sur le trône s’apprête à être sacrée Elizabeth II. Son règne sera le plus long de l’histoire britannique.
Née en 1926 à Londres, Elizabeth est âgée de 9 ans lorsque son grand-père le roi Georges V décède. Le 20 janvier 1936, son oncle Edouard VIII, héritier du trône, lui succède. Mais à la satisfaction générale, il abdique au bout de quelques mois, par amour, pour épouser l’Américaine divorcée Wallis Simpson que la famille royale rejette. A moins qu’il n’ait été écarté par le gouvernement britannique en raison de sa sympathie et son admiration pour les nazis. C’est alors à son frère cadet, Georges VI, le père d’Elizabeth, de monter sur le trône. Cet homme timide, qui rêvait d’une existence paisible, doit désormais gouverner. Quant à sa fille aînée chérie, Lilibeth, élevée loin des rigueurs de la cour, elle devient soudainement héritière de la couronne. Elle est âgée de 25 ans lorsque son père, de santé fragile, meurt en février 1952. Le chagrin la submerge, mais elle doit pourtant faire face car à présent, c’est à elle de régner sur un empire de plusieurs centaines de millions de sujets.
Grandiose cérémonie
En 1953, Elizabeth II est sacrée reine du Royaume-Uni, mais également cheffe du Commonwealth, une organisation informelle de pays autonomes, vestiges d’un empire colonial britannique qui s’effrite. Parmi eux, le Canada, l’Australie et l’Inde. A l’automne 1953, Elizabeth II et son mari, le prince Philip, entament ainsi leur première tournée royale. Un grand périple de six mois à travers le Commonwealth pour y préserver l’influence britannique. Car c’est avant tout un rôle de représentation qui est attendu de la monarque britannique. Elle règne, mais ne gouverne pas. Elizabeth II n’aura de cesse de multiplier les initiatives destinées à rassembler autour de la couronne.
Et pour commencer, elle va offrir l’incroyable spectacle d’une cérémonie grandiose. Le 2 juin 1953, à 11h15, la jeune Elizabeth, vêtue d’une robe de soie blanche et d’une traine de velours de 5m de long, pénètre dans l’abbaye de Westminster. Plus de 7000 invités triés sur le volet accueillent solennellement la future reine. Parmi eux, une vingtaine de caméramen autorisés pour la première fois à filmer la cérémonie. Prouesse médiatique, l’événement est retransmis en direct à la télévision dans plusieurs pays européens. Après des mois de préparatifs, le rituel millénaire est scrupuleusement respecté.
La couronne britannique entend ainsi démontrer la stabilité de son modèle. Mais également son renouveau, grâce à la présence de la télévision, symbole de modernité. La frêle silhouette d’Elizabeth II et ses célèbres chapeaux font bientôt le tour du monde. Imperturbable, ni les crises économiques, ni les bouleversements politiques, ni même les frasques de la famille royale, ne semblent en mesure de l’ébranler.