Aller au contenu principal
2013 : l'effondrement du Rana Plaza, symbole des dérives de l'industrie textile

2013 : l'effondrement du Rana Plaza, symbole des dérives de l'industrie textile

Au Bangladesh, les ouvriers du textile sont en grève début novembre pour demander une revalorisation de leur salaire et de meilleures conditions de travail. C'est l'un des plus grands mouvements de protestations depuis l'effondrement du Rana Plaza en avril 2013. Cet immeuble abritant des ateliers textiles s'était effondré à Dacca au Bangladesh et 1134 personnes perdirent la vie. En Occident, la réalité lointaine de la production de vêtements à très bas prix fit soudainement la une des journaux télévisés et provoqua une prise de conscience des consommateurs.

Par Romane Laignel Sauvage - Publié le 24.04.2023 - Mis à jour le 07.11.2023
 

L'ACTU.

Ce sont les usines qui fournissent les plus grandes marques occidentales. Début novembre, pendant une semaine, près de 600 usines textiles des environs de Dacca au Bangladesh étaient à l'arrêt, sous le coup d'une grève majeure de leurs ouvriers. Ceux-ci demandent une augmentation de leurs salaires, particulièrement bas, et une amélioration de leurs conditions de travail.

Le pays est le deuxième exportateur de vêtements au monde, fournit de nombreuses enseignes occidentales. Les mauvaises conditions de travail dans ces usines bangladaises étaient soudainement apparues aux yeux des Occidentaux lors de l'effondrement du Rana Plaza en 2013. Les centaines de morts et de blessés firent la une des journaux télévisés.

LES ARCHIVES.

« Au Bangladesh, dans la capitale, Dacca, un accident impressionnant met en lumière le sort fait aux petites mains du textile. » Il y a 10 ans, le 24 avril 2013, dès la fin de journée, un effondrement massif d'une usine textile bangladaise, le Rana plaza, fait la une de Soir 3. Le bilan était déjà lourd : plus de 100 morts et des centaines de blessés parmi les employés, « des centaines d'hommes, et surtout des femmes, qui travaillent pour la confection. »

Le bâtiment abritait plusieurs ateliers et employait au total près de 5 000 personnes. « Des ateliers de confection textile installés sur huit étages d'une construction illégale dont les murs se fissuraient depuis la veille », expliquait l'archive. Des alertes et consignes d'évacuation auraient été ignorées par les responsables. Une survivante témoignait, à peine extraite du bâtiment : « On ne voulait pas entrer dans l'atelier ce matin, mais la direction nous y a forcé en disant que l'immeuble n'avait aucun problème. Et juste après que je me suis assise, l'immeuble s'est effondré, j'étais piégée. »

Un effondrement révélateur des dessous de la mondialisation

Un bâtiment dangereux, qui n'était pas une exception. Au Bangladesh, selon le commentaire, ce type d'« ateliers qui fournissent le monde entier sont surpeuplés et ne respectent généralement aucune règle de sécurité. Des dizaines d'employés ont déjà été victimes d'incendies ces derniers mois, prise au piège dans leur usine. » Et si cet effondrement massif faisait la une des journaux, c'était parce que, comme le soulignait le journaliste, les commanditaires de ces ateliers étaient des marques européennes, « Mango ou Benetton notamment » dans le cas du Rana Plaza. Le 24 avril, le bilan s'alourdissait d'heure en heure. Quelques semaines plus tard, plus de 1100 morts seront comptabilisés.

Au Bangladesh, une journée de deuil national fut organisée le lendemain du drame. Des manifestations eurent lieu pour appeler à de meilleures conditions de travail. Dans les décombres, des étiquettes de la marque Camaïeu ont été retrouvées, mais bien d'autres marques de l'industrie textile ont été impliquées dans ce drame, comme Benetton, C&A, H&M, Lee Cooper, Tex (groupe Carrefour) ou encore Zara. Celles-ci se défendaient de toute responsabilité, arguant celle de leurs sous-traitants.

Quelques semaines après le Rana Plaza, France 2 retournait à Dacca. Là-bas, des ouvriers témoignaient : « On sait tous que cela peut arriver à nouveau à tout moment. Ce n'est plus une question de conditions de travail, c'est une question de vie ou de mort. » L'espoir d'une amélioration et la responsabilité des grands groupes était soulignée.

Comme on le voit dans l'archive ci-dessous, un an après le drame, Soir 3 revenait sur l'effondrement du Rana Plaza. Sur le plateau, Anne Gintzburger, réalisatrice du documentaire des « Damnées du Low Cost » pour France 5 faisait le bilan : « Pour les victimes, peu de choses ont changé, pour les survivantes, beaucoup d'entre elles et beaucoup d'entre eux attendent encore des soins. (...) Beaucoup ont perdu des jambes, l'usage de leurs membres, sont paralysés. Mis à part une petite indemnisation assez symbolique octroyée par l'État du Bangladesh juste après le Rana Plaza, ils n'ont reçu aucune compensation financière à ce jour. »

Une amélioration de la sécurité grâce un accord

Plus généralement, un accord international concernant la sécurité avait tout de même été signé, sous l'égide de l'Organisation internationale du travail et associait des multinationales du secteur du textile, des syndicats et des ONG. Et Anne Gintzburger d'ajouter : « Il y a eu des augmentations de salaires assez conséquentes pour les ouvriers du Bangladesh. » Les conditions de travail des ouvriers bangladais restent tout de même particulièrement dures et leur travail peu rémunéré.

En 2014, un programme d'inspection des usines démarrait également, mais la réalisatrice notait : « Il faut inspecter 4500 usines, qui sont souvent dans des conditions déplorables donc vous imaginez bien que les patrons et les grandes marques occidentales n'ont pas vraiment intérêt à ce que les portes s'ouvrent. » Depuis, des milliers d'inspections ont eu lieu et permis des rénovations dans pratiquement 1600 usines bangladaises. En France, une loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, a été votée en 2017. Elle vise à « prévenir les risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement, y compris lorsqu’elles sont commises par leurs filiales directes ou indirectes [des multinationales], en France et dans le reste du monde. »

S'orienter dans la galaxie INA

Vous êtes particulier, professionnel des médias, enseignant, journaliste... ? Découvrez les sites de l'INA conçus pour vous, suivez-nous sur les réseaux sociaux, inscrivez-vous à nos newsletters.

Suivre l'INA éclaire actu

Chaque jour, la rédaction vous propose une sélection de vidéos et des articles éditorialisés en résonance avec l'actualité sous toutes ses formes.