L'artiste Miss.Tic, connue pour ses pochoirs de femmes brunes et poétiques, est morte dimanche 22 mai à l'âge de 66 ans. La figure du street art parisien, Radhia Novat de son vrai nom, a régulièrement été exposée en France et à l'étranger depuis 1986.
Née d'un père immigré tunisien et d'une mère normande, elle avait commencé à peindre en 1985 dans les rues de la Butte-Montmartre - où elle a grandi -, du Marais, de Montorgueil et de la Butte-aux-Cailles, où elle a beaucoup essaimé. «Je venais du théâtre de rue, j'aimais cette idée de l'art dans la rue», avait-elle expliqué en 2011. «Je me suis dit d'abord : 'Je vais écrire des poèmes'. Puis : 'Il faut des images' avec les poèmes. J'ai commencé par des autoportraits, puis j'ai continué vers les autres femmes», ajoutait-elle, faisant des formules incisives sa signature
«J'aime bien la pierre»
Dans l'archive en tête de cet article, nous sommes en 1990, quelques années à peine après ses débuts. Elle n'est pas encore très connue. La caméra la suit une nuit dans Paris à réaliser ses pochoirs à l'aide d'un comparse. Face à l'une de ses oeuvres, elle se confie. Sur son nom tout d'abord : «J'ai choisi de m'appeler Miss.Tic car à la rue il n'y avait que des garçons qui sortaient mettre des textes et j'avais vraiment envie qu'on sache que j'étais une fille (...) et puis il y a le jeu de mot avec le spirituel auquel j'accorde beaucoup d'importance»
Elle poursuit, indiquant que son inspiration vient de sa vie privée, «c'est complètement subjectif, mais c'est aussi ce que je défends, alors qu'on est submergé de voix publicitaires, politiques, de langue de bois, j'ai pris le parti d'avoir une langue de pierre et pas de ces pierres dont on fait les murailles, mais d'avoir quelque chose de basé sur l'émotion et le sentiment et de dire des choses qui ont du contenu». Elle indique ne pas être gênée que ces textes soient éphémères, mais si elle concède ne pas apprécier que ses peintures soient effacées trop rapidement. «Mais ça me gène aussi quand ça reste de longs mois, des années, parce que c'est fait aussi pour passer dans la vie des gens, c'est pas fait pour rester», pointe-t-elle, comme un paradoxe.
Tout en exprimant sa détestation des tagueurs qui ne parlent qu'à eux-mêmes - à l'époque, chaque porte cochère ou presque était recouverte de tags - elle donnait les secrets des murs où elle peignait : «Les murs, je les choisis par rapport à leur esthétique, j'aime bien les murs un peu vieux, qui sont chargés, qui ont un passé, j'aime bien la pierre, quand je les trouve beaux, je peux pas m'empêcher d'écrire dessus».
Miss.Tic sera l'une des artistes exposés à l'automne 2022 à l'Hôtel de Ville de Paris, à l'occasion d'une exposition retraçant 40 ans d'art urbain dans la capitale.
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