Constantin Gavras naît en 1933. Il passe son enfance et son adolescence à Athènes. Son père est un Grec de Russie, originaire d’Odessa, qui quitte cette ville soviétique en 1922 avec l’intention d’émigrer aux Etats-Unis. Pourtant, il s’arrête en Grèce où il occupe un poste de fonctionnaire dans un ministère. Comme beaucoup de ses compatriotes, il prend part à la résistance contre les nazis ; il est sympathisant de gauche, n’adhère pas aux thèses communistes. Son engagement est dicté par des considérations patriotiques, et non idéologiques. La résistance, principalement menée par le parti communiste en clandestinité, regroupe donc des hommes de toutes origines et d’horizons politiques différents.
A la fin de la guerre, la Grande-Bretagne obtient les coudées franches pour empêcher que la Grèce ne bascule dans le camp communiste : la plupart de ceux qui s’étaient battus contre les Allemands sont paradoxalement considérés comme des indésirables par le gouvernement libéral et royaliste, appuyé par les Anglais. C’est le cas du père de Costa-Gavras, discrédité pour ses idées anti royalistes. Et ses positions rejaillissent sur son fils : Costa-Gavras ne peut pour ces raisons politiques, ni s’inscrire à l’université d’Athènes, ni immigrer aux Etats-Unis (qui prennent le relais des Britanniques dans leur chasse aux communistes et à l’opposition de gauche en général), ce qu’il souhaitait faire en raison de son attrait pour la culture américaine.
Il décide alors d’aller à Paris, et s’inscrit en littérature à la Sorbonne. Il veut écrire et raconter des histoires. Deux ans après, en 1954, il décide donc de faire du cinéma et s’inscrit à l’IDHEC (aujourd’hui la Fémis). Il apprend son métier en tant qu’assistant réalisateur auprès de grands cinéastes de la « Qualité française », René Clair, René Clément, Jean Giono, Henri Verneuil, mais aussi de la Nouvelle vague comme Jacques Demy.
Il appréciera plus particulièrement le cinéma et l’expérience de travail avec René Clément, le réalisateur de Plein Soleil et Jeux Interdits, avec qui il collabore sur Les Félins, en 1963. Il réalise ses deux premiers films, Compartiment tueurs et Un homme de trop, respectivement en 1965 et 1967. Compartiment tueurs, réalisé grâce à l’aide de ses amis Yves Montand et Simone Signoret, est un succès. Sa carrière démarre sur les chapeaux de roue.
L'histoire contemporaine grecque, matrice de Z
En mars 1967, un mois avant le coup d’état en Grèce, il effectue un court séjour à Athènes où son frère lui conseille le roman de Vassilis Vassilikos, Z, écrit en 1966, racontant fidèlement les événements autour de l’assassinat du député grec de gauche, Gregoris Lambrakis, en 1963, par des hauts gradés militaires liés au pouvoir. On comprend alors pourquoi ce livre le fascine : il mêle une intrigante enquête politico-judiciaire au contexte culturel de son pays d’origine.
Une histoire qui renvoie aux événements internationaux de la fin des années 1960
Surtout, cette histoire d’assassinat politique lui permet d’évoquer ce contexte si particulier et tragique des assassinats politiques qui ont ensanglanté les années 1960 : les deux frères Kennedy, Martin Luther King, Patrice Lumumba… Il décide donc de gommer les références explicites à la Grèce pour porter un propos plus universel. Il s’entoure d’un casting d’exception : Yves Montand, Jean-Louis Trintignant, Jacques Perrin, Irène Papas, Renato Salvatori, Pierre Dux… Le succès est immense, dans de nombreux pays européens, mais aussi aux Etats-Unis, au Mexique… En France, il lance la mode du film politique, et entraîne lors de sa diffusion des débats passionnés.
En 1976, le scénariste Jorge Semprun revenait sur la production et la réception de Z
Cyrille Beyer
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