Catherine Sauvage, la voix «Ferré»

L'ANNIVERSAIRE.

19 mars 1998. La France apprenait la disparition de Catherine Sauvage. Avec une vingtaine d'albums à son actif et près de 45 ans de carrière, cette chanteuse qui avait débuté dans les cabarets parisiens, allait rester pour beaucoup l'interprète attitrée de Léo Ferré. Une amitié artistique qu'elle ne trahirait jamais. Mais Catherine Sauvage, c'était avant tout l'amour de la poésie. Sa carrière musicale est indissociable de celle des grands poètes. Prêtant son timbre si particulier à chaque univers poétique, elle rendait ses auteurs uniques.

En 1997, pour la sortie de son double CD Catherine Sauvage chante les poètes, elle déclarait dans une interview : « je suis une amoureuse des mots, j'adore la musique. Au théâtre, je n'ai joué que les grands auteurs. Pour moi, cela participe à mon bonheur. Les chansons prennent de la valeur les unes confrontées aux autres. Comme dans la peinture, les rapports de couleurs existent. L'essentiel est de ne pas faire de fausses notes. » C'est ainsi qu'elle offrit sa voix à Louis Aragon, Jacques Audiberti, Charles Baudelaire, Francis Carco, Colette, Robert Desnos, Paul Éluard, Jacques Prévert, Raymond Queneau et tant d'autres.

Aragon disait d'elle : « Un pays, je vous dis, où tout, comme les mots, se détache avec cette perfection du dire et ce tact merveilleux de chanter (...) C'est que tout cela est langage de poètes, mais qui passe par une gorge de jour et d'ombre, le prisme de la voix se fait lumière et transparence. Avec qui voulez-vous parler ? Moi, je voulais parler de seize chansons choisies et d'une femme rencontrée avec ce nom déjà de souveraine, comme un beau masque de velours : Catherine Sauvage. »

LES ARCHIVES.

Mais son âme sœur artistique reste et a toujours été Léo Ferré. Elle l'interprétait merveilleusement, à l'instar de cette prestation d'Avec le temps proposée en tête d'article. Une archive extraite du magazine « Aujourd'hui madame » du 30 janvier 1980.

L'auteur et son interprète ont souvent été interrogés sur leur relation artistique inconditionnelle teintée de respect mutuel. En 1956, Léo Ferré racontait à Jacqueline Joubert sa rencontre avec Catherine Sauvage : « c'est la première qui a tout pris de moi (...) sans changer un mot ! (...) Catherine a tout chanté et c'était courageux de sa part à cette époque. »

En 1968, c'était au tour de la chanteuse de décrire l'osmose entre son « Léo » et elle-même. Elle décrivait leur relation comme vitale pour elle et revenait avec amusement sur son exclusivité et la pointe de jalousie du compositeur lorsqu'elle l'abandonnait pour d'autres auteurs.

Une infidélité qui sera de courte durée, puisqu'en 1980, elle revenait à son grand amour musical en publiant un double album de 21 chansons de Léo Ferré, 25 ans de chansons de Léo Ferré. Des noces d'argent musicales. Dans « Aujourd'hui madame », elle expliquait en quoi son mentor était un personnage « démesuré ».

« Si on m'enlevait Ferré, on me couperait en deux et je ne pourrais plus chanter »