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1986 : les camps militaires d'Albin Chalandon pour traiter de la petite délinquance

1986 : les camps militaires d'Albin Chalandon pour traiter de la petite délinquance

Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur et des Outre-Mer en déplacement à Mayotte, a annoncé son projet de créer des lieux de «redressement» pour les mineurs délinquants encadrés par des militaires». Il n'est pas le premier à avancer cette idée. Avant lui, Albin Chalandon, Garde des Sceaux entre 1986 et 1988, avait déjà mis en place ce type de structure associée à un encadrement militaire.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 23.08.2022
 

Le ministre de l'Intérieur et des Outre-Mer Gérald Darmanin, en visite à Mayotte, a annoncé lundi 22 août qu'il allait faire des propositions pour ouvrir «des lieux de rééducation et de redressement» pour les mineurs délinquants, encadrés par des militaires. Cette idée de placer les mineurs délinquants dans des centres fermés est récurrente dans les archives. Autrefois on parlait de « maison de correction » ou de « maisons de redressement ». Mais la volonté d'y associer une discipline militaire est plus récente. Le premier à y faire référence fut le ministre de la Justice Albin Chalandon. Le 8 juillet 1986, il exposait son projet dans le 20h00 d'Antenne 2 . Nous vous proposons de l'écouter dérouler son argumentaire dans l'archive en tête d'article.

A l'époque, son annonce faisait grand bruit car le garde des Sceaux avait employé le terme de « camp », à connotation négative, ce que lui rappelait d'ailleurs le journaliste Bernard Rapp au début de l'interview. Le ministre expliquait que son projet était né du constat que face au phénomène de la petite délinquance, la justice seule ne pouvait pas traiter le problème. Il estimait que l'ensemble de la société devait se mobiliser. Son projet reposerait donc sur des associations et des bénévoles pour une part et pour une autre part sur l'armée. Prenant l'exemple des « loubards » mineurs récidivistes de sa région de Roubaix-Toucoing , il estimait que la meilleure solution était à ses yeux de « les grouper pour leur faire mener ensemble », il insistait sur ce point, une vie collective basée sur « une certaine discipline et une activité physique génératrice de travail ».

Son projet de « Centres d'éducation sportive et professionnelle », comme il souhaitait les appeler désormais, devait s'appliquer à tout jeune délinquant, qu'il soit condamné ou pas. Son credo était de traiter le jeune délinquant « de façon humaine et de l'aider à se réhabiliter ». Il insistait sur un point, il ne fallait pas mettre de jeunes délinquants mineurs en prison.

Vers la réinsertion des «JET»

Dans les années qui suivirent, quelques centres furent ouverts, Certains jeunes délinquants choisissant parfois la voie de la réinsertion en camp militaire. Ces « Jeunes en Equipes de Travail » découvraient ainsi la discipline militaire, le travail et l'école, comme l'avait souhaité Albin Chalandon. Le reportage de 2000 tourné à Fort-Barraux en Isère, à regarder ci-dessous, montre le fonctionnement de l’un des centres. Tous les trois mois des jeunes encadrés par des militaires découvraient la vie dans le centre, rythmée par des entraînements militaires, des chantiers divers et des cours de remise à niveau scolaire. Les jeunes témoignaient de ce quotidien bien différent de la prison de manière plutôt positive. Quant à la ministre de la Justice de l'époque, Elisabeth Guigou , venue visiter l'endroit, elle annonçait que 75% des jeunes passant dans ces structures ne récidivaient pas. Un succès apparent.

20 ans plus tard : un bilan mitigé

Vingt ans après leur création, ce que l'on avait coutume d'appeler les « camps Chalendon » revenaient sur le devant de l'actualité, après que la candidate à la présidentielle, Ségolène Royal, ait à son tour proposé la création de « lieux d'encadrement à dimension militaire », qui, de fait, n'étaient pas nouveaux. Le 20 heures de France 2 avait donc enquêté sur le camp de la Souchère (Haute-Loire), l'un des quatre centres Chalandon. Il avait fermé deux ans plus tôt, car l'expérience n'avait pas été concluante, notamment à cause de dissensions entre les civils et les militaires en charge du camp. Pourtant l'ancien directeur du centre expliquait que les jeunes d'abord réticents étaient plutôt en demande de cadre et de discipline. Mais les éducateurs civils, eux, dénonçaient la mainmise militaire sur l'éducation. L'expérience s'était achevée dans la discorde et par une fermeture définitive de tous les centres. Au moment du reportage, rien n'était venu remplacer les structures supprimées.

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