Avant de devenir une des premières femmes rabbin de France, Delphine Horvilleur a eu plusieurs vies : étudiante en médecine, mannequin, journaliste, directrice de revue… Face aux archives, elle raconte que ces étapes, en apparence différentes les unes des autres, ont un fil conducteur qui les rassemble : « la question de la transmission ». Spectatrice de son installation émouvante à la Synagogue de Beaugrenelle dans le XVe arrondissement de Paris où elle officie toujours, elle exprime la conviction que chaque rabbin et chaque personne en général porte en lui « un enseignement à apporter au monde ». Le sien consiste en la « pluralité des langages » : « les voix d’ouvertures et de tolérance » qu’elle oppose à l’unicité du message des fondamentalistes.
Face aux archives de Simone Veil et Marceline Loridan, Delphine Horvilleur, dont les grands-parents maternels ont survécu aux camps de concentration, évoque la difficile question de la parole face à la Shoah. La difficulté de témoigner en public ou en privé pour les rescapés, ainsi que la difficulté pour l’opinion de s’ouvrir à des témoignages aussi terribles. La rabbin considère que ces deux visages de la prise de parole de ce moment d’histoire cohabitent, voir combattent en elle et en chaque femme. « Simone Veil incarne le sens du devoir, d’être à la hauteur, de transmettre, avec sérieux », tandis que « Marceline, c’est ce féminin passionné qui aspire à la liberté et à l’amour », analyse-t-elle.
Par la suite, elle réagit à la célèbre et polémique archive de de Gaulle qui décrit les juifs comme un « peuple d’élite, sûr de lui et dominateur » lors d’une conférence de presse donnée à l’Élysée à l’occasion de la « guerre des six jours » : « Parfois des résidus antisémites sont parlés par des gens qui ne sont pas du tout antisémites », regrette-t-elle ; elle s’émeut également devant un reportage sur l’assassinat d’Yitzhak Rabin qu’elle était allée voir discourir sur la place des Rois d’Israël, quelques heures avant le drame, le 4 novembre 1995. « Une idéologie qui nourrissait les assassins de Rabin a gagné une bataille », déplore-t-elle, faisant allusion à la présence de l’extrême droite au pouvoir en Israël. L’émission termine sur une note plus légère : un congrès sur l’humour juif qui a lieu en Israël. L’occasion pour elle d’en donner sa propre définition.