L'archive en tête d'article, composée d'images de 1938, décrit les dessous et les conséquences des accords signés la nuit du 29 au 30 septembre de cette année-là, à Munich, «berceau du nazisme», par Adolph Hitler, l'Italien Benito Mussolini, le premier ministre britannique Neville Chamberlain et le président du Conseil français Édouard Daladier.
Ces accords devaient régler la crise des Sudètes, région que Hilter avait prévu d'annexer tout en sachant que cela revenait, du fait d'un jeu d'alliances, à déclarer la guerre à la France et à l'Angleterre. Sur proposition italienne, une conférence était organisée pour trouver une solution pacifique. La France, qui n'était pas prête pour une guerre, gagnait ainsi du temps.
Cet accord, expliquait l'archive déjà citée, « dépouillait la Tchécoslovaquie de la région des Sudètes, la privant ainsi de ses défenses naturelles ». Et d'ouvrir la voie à l'annexion pure et simple du pays par l'Allemagne moins de six mois plus tard.
Une paix temporaire
À la signature, « Chamberlain était convaincu d'avoir bien fait, expliquait le commentaire, monsieur Daladier était beaucoup moins assuré. Les dictateurs, Hitler, Mussolini exultaient. Les deux hommes d’État, l'Anglais et le Français, rentraient chez eux, conscients ou inconscients qu'ils venaient de sceller le destin d'une génération. »
Le président du Conseil français, lui, « hésitait à faire poser son avion au Bourget », croyant que « la foule immense qui l'attendait » était là pour le huer. En réalité, l'opinion publique était de son côté. Sur le plan politique, on observait une majorité de « munichois », c'est-à-dire de partisans des accords de Munich. On pensait la paix sauvée.
Lorsqu'il se rendit compte qu'on l'acclamait, Daladier aurait murmuré : « Les malheureux, s'ils savaient ce qu'ils applaudissent ». Plus clairvoyant, Léon Blum se disait, selon l'archive, partagé entre « un lâche soulagement et la honte ».
Une série de renoncements
Comme on l'entend dans l'archive, « moins d'un an plus tard, c'était la guerre. » À partir de là, les conséquences de la conférence de Munich étant claires, le qualificatif de « munichois » devenait péjoratif, synonyme de lâcheté, d'aveuglement et de renoncement face à l'expansion d'États totalitaires.
Cette expression, régulièrement reprise pour attaquer un adversaire en politique, fait « de la conférence de Munich l’exemple absolu de la faillite des efforts de la diplomatie face à un autocrate à l’insatiable appétit de conquête » comme le notent les journalistes Thomas Wieder et Jérôme Gautheret dans une analyse pour Le Monde. Et de proposer d'incriminer « plus largement l’ensemble des renoncements ayant permis à Hitler de prendre une série d’initiatives, la plupart en contradiction avec le traité de Versailles (1919) et les accords de Locarno (1925), qui mirent en péril la paix internationale ».
Edouard Daladier devant les militants radicaux
2024 - 08:30 - audio
« La guerre ne sera jamais plus une solution. »
Pour aller plus loin : des documents de 1938
Archives audio de 1938 : Trois semaines de lutte pour la paix : rétrospective Munich (Audio, septembre 1938)
Archives audio de 1938 : Après la signature des accords de Munich, reportages sur le soulagement manifesté à Paris (avec acclamation de Daladier au Bourget, audio, septembre 1938).
Archives audio de 1938 : Discours à l'Assemblée nationale de Georges Bonnet, ministre des Affaires étrangères : il justifie longuement les décisions politiques franco-britanniques qui ont amené de la conférence de Londres jusqu'à la signature des accords de Munich. Il détaille les étapes des négociations avec l'Allemagne et affirme que, la mission de Walter Runciman ayant échoué en Tchécoslovaquie, l'affaire des Sudètes ne pouvait pas connaître un autre dénouement. (Audio, 1er octobre 1938)
Archives audio de 1938 : Discours d'Edouard Daladier devant les militants radicaux au congrès du Parti radical : « L'honneur de la France n'a pas été compromis, il n'y a dans cet accord de raison aucun caractère d'ultimatum ». Il critique les auteurs de la campagne antimunichoise qui « l'heure des extrêmes périls étaient moins bruyants ». Il se prononce pour un rapprochement et une collaboration franco-allemande, dans une égale estime réciproque, « car la guerre ne résout plus rien dans les temps présents ». Enfin, il remercie le parti radical qui l'a soutenu dans son effort et regarde la situation internationale et estime que « la paix a été sauvée ». Il raconte comment il a surmonté la crise tchécoslovaque. (Audio, 29 octobre 1938).