Grand homme politique de la IIIe République, Aristide Briand fut l’un des défenseurs de la paix entre 1925 et 1932, époque à laquelle il fut plusieurs fois ministre des Affaires Etrangères et président du Conseil. Il est resté célèbre pour sa contribution à la réconciliation franco-allemande en 1924-1925 (pacte de Locarno), ce qui lui valut d'obtenir, avec son homologue allemand Streseman, le prix Nobel de la paix en 1926.
Apôtre de la paix en Europe, Aristide Briand profitait de ses allocutions régulières à la tribune de l'Assemblée de la SDN (Société des Nations), l'ONU de l'époque, pour défendre son point de vue devant le monde entier.
Le 5 septembre 1929, devant cette assemblée réunie à Genève, Aristide Briand, le délégué de la France, appelait à condamner unanimement la guerre et à adopter une politique de désarmement généralisé. Dans ce discours resté célèbre, l’orateur pacifiste portait une proposition spectaculaire : la création d'une union fédérale entre les peuples européens afin d'établir un système efficace de sécurité, de coopération et d'entente entre les pays. Il se prononçait en faveur de la future mise en place d’un « lien fédéral » entre pays européens. Une requête qui n’est pas sans résonner aujourd'hui avec les velléités contemporaines de défense commune de l’UE.
L’archive que nous vous proposons d’écouter en tête d’article un extrait audio de cette allocution exceptionnelle tant par son ancienneté que par son contenu. Dans ce fragment, il est uniquement question de désarmement. La qualité sonore du document étant parfois médiocre, nous vous proposons ci-dessous une partie de la transcription de ce discours historique.
Pacifier et unifier
A la tribune, Aristide Briand commence par rappeler le travail accompli par la SDN, tout en soulignant ses limites et les oppositions auxquelles elle continue de faire face. Il présente ensuite ses idées sur le pacifisme et le désarmement : « Et bien, messieurs, si les nations réunies pouvaient réduire les armements et pratiquer l'article 8 du Pacte, si à ce moment-là, elles ont la possibilité de cette parole et de ce geste, et si elles le produisent devant le peuple, écartant d'une main vigoureuse toute possibilité de crime, de guerre, dans l'avenir. »
Plus loin, il décrit le monde tel qu'il serait, unit et débarrassé des guerres : « Ce jour-là, les peuples pourront s'illuminer, les peuples pourront se réjouir, les peuples pourront envisager la possibilité d'une large réduction des armements car la situation sera nette. Elle sera éclaircie, elle ne sera plus hypothéquée par l'effroyable risque de guerre qui pèse sur les nations et qui est encore, dans la situation actuelle, une des causes profondes de sa réalité. »
L'histoire montrera que dans les années trente, la SDN sera impuissante à empêcher la montée des totalitarismes en Europe, notamment en Italie et en Allemagne. L'Assemblée ne parviendra pas davantage à stopper les premiers coups de force des régimes totalitaires. Il faudra attendre l'après Seconde Guerre mondiale pour que plusieurs des projets défendus par le ministre français voient le jour, la création d'un marché commun puis d'une union européenne notamment. Mais Aristide Briand, visionnaire arrivé trop tôt sur l'échiquier politique, n'en verra jamais la conclusion, mourant le 7 mars 1932.