En 2020, le nombre de sans-papiers en France était estimé dans une fourchette allant de 300 000 à 600 000 personnes. La condition de ces étrangers en situation irrégulière résulte d'une entrée clandestine sur le territoire national, ou d'une expiration de la durée de validité de leur titre de séjour (ce qui était le cas pour 90% d'entre eux en 1998 et en 2002). Etre dépourvu de permis de séjour en règle leur interdit notamment de bénéficier de la plupart des droits accordés aux autres citoyens comme celui de travailler et constitue un délit, passible d'un an de prison, de 3750 euros d'amende et de 3 ans d'interdiction du territoire.
Le terme de "sans-papier", employé par les mouvements associatifs pour sa connotation militante, n'est cependant pas exact et peut porter à confusion. En effet, sont désignés sous cette expression les étrangers qui n'ont pas de titre de séjour en règle, mais qui peuvent par ailleurs avoir un passeport valide, une carte d'assurance maladie... La désignation de "sans-papiers" a commencé a être systématiquement utilisée en 1996, au moment de l'occupation des églises parisiennes de Saint-Ambroise puis de Saint-Bernard jusqu'à sa violente évacuation le 23 août 1996. Tout avait commencé le 18 mars 1996 au matin. 300 personnes en situation irrégulière, originaires d'Afrique, investissent alors l'église Saint-Ambroise dans le 11e arrondissement de Paris, pour réclamer leur régularisation. Ils reçoivent rapidement la visite de nombreuses associations et de sympathisants. Après leur évacuation de force quatre jours plus tard, commence une période d'errance qui les mènera notamment dans le Théâtre de la Cartoucherie de Vincennes où ils seront accueillis par Ariane Mnouchkine. Celle-ci convie alors un collège de médiateurs constitué de personnalités, pour obtenir leur régularisation auprès du gouvernement.
Priorité gouvernementale et évacuation à la hache
Si les autorités leur promettent d'examiner les dossiers avec "bienveillance", le résultat est décevant : sur 205 dossiers, seuls 22 obtiennent une carte de séjour d'un an. Les autres demandeurs ont un mois pour quitter le territoire. Déterminé à aller jusqu'au bout de son combat, le collectif de sans-papiers s'installe dans l'église de Saint-Bernard, au cœur du 18e arrondissement de Paris. Le 23 août, d'importantes forces de police (plus de 1000 hommes ) enfoncent les portes de l'église à la hache et les délogent tous sans ménagement, pour les conduire au centre de rétention de Vincennes. L'opération aura duré 3 heures devant une foule de Parisiens solidaires des délogés. Une semaine après cette opération spectaculaire, une dizaine d'entre eux est reconduite à la frontière, et les autres étrangers en situation irrégulière sont libérés.
Fortement médiatisée, suite notamment à la mobilisation de l'actrice Emmanuelle Béart ou du professeur Léon Schwartzenberg, l'évacuation de l'église Saint-Bernard a suscité une vive émotion.
La situation des sans-papiers est devenue, dès lors, l'une des priorités du gouvernement. Or, la résolution de ce problème s'avère extrêmement délicat et récurrent dans le débat public.