En 1979, à la veille des achats de Noël, Annick Beauchamps consacrait son magazine à la dangerosité des jeux de chimie.
Dans ce reportage, le journaliste Jean-Charles Deniau explique que depuis le 15 mars 1979, certains jeux mis sur le marché faisaient l'objet de normes sévères, notamment les jeux "contenant du métal, du bois ou du verre". Mais pour les jouets électriques ou chimiques, aucune norme n'était encore applicable.
L'enquête présente trois jeux achetés et soumis à André Picot (chargé de recherche en toxicologie au CNRS). Il donne son avis sur leur dangerosité et identifie les éléments de sécurité manquants : " il manque des lunettes de protection … contre les projections, une paire de gants pour la manipulation des produits corrosifs et des poires pour manipuler avec les pipettes. Un autre danger est celui de la manipulation de l'alcool à brûler parce que lorsque l'on va transvaser l'alcool, il est possible qu'il se répande et que lorsqu'on va allumer cette lampe on puisse entraîner une inflammation importante."
Pour illustrer sa démonstration, il enflamme le plan de travail : "Au niveau des produits comme la soude caustique ou l'acide chlorhydrique les flacons sont vides mais bien entendu il va falloir les remplir et s'approvisionner chez un droguiste et là on va utiliser des solutions concentrées et c'est au niveau de la dissolution que vont apparaître les dangers puisqu'on risque de faire des échauffements importants de chaleur et avoir une corrosion de la peau."
Le journaliste souligne qu'avec des mélanges de produits concentrés, on peut provoquer des explosions.
Quant à la toxicité des produits présents, le chercheur repère du permanganate de potassium dont l'étiquetage n'est pas réglementaire car il ne présente pas le mot "dangereux" et qui est susceptible de provoquer une perforation de l'estomac chez les enfants en cas d'ingestion : "Quant au sulfate de cuivre, son ingestion par un jeune enfant peut provoquer des vomissements et des diarrhées qui peuvent être très graves."
Les autres produits présents s'avéraient peu dangereux. Mais dans une autre boîte, le chercheur constate d'un peroxyde potentiellement explosif en cas de choc et allergène!
Si des notices complètes sont fournies, André Picot dénonce le fait que certaines manipulations proposées soient extrêmement dangereuses comme celle du chlore: " C'est quelque chose qui est à mon sens particulièrement dangereux puisque le chlore est un gaz de combat et sa manipulation, même à très faible dose est très dangereuse... Dans ce kit, on préconise de mélanger le chlore au benzine qui est du benzène qui peut provoquer des troubles sanguins et des anémies chez l'enfant et plus grave la leucémie."
Quid des normes en 1979 ?
Après le reportage, en plateau, Annick Beauchamps fait réagir Gérard Coll, chef de la division équipement domestique à l'AFNOR, qui évoque la législation en matière de jouets (arrêté du 13 novembre 1979). Il précise que pour les jouets tels que les panoplies de chimiste, la norme ne doit devenir obligatoire qu'en juin 1981. Annick Beauchamps s'étonne alors de ce délai et Gérard Coll lui explique que la norme ne pourra pas complètement protéger les enfants : "Il faut savoir ne rien faire ou avancer..."
Annick Beauchamps prend des exemples concrets de produits dangereux dans les jeux de chimie et Gérard Coll, déstabilisé, explique que normalement certaines substances ne devraient pas être vendues à des enfants de moins de 18 ans. Gérard Coll ne peut que constater que l'AFNOR a fait des choses pour "les crayons, les peintures mais que pour ces jeux rien n'est encore réglé."
Annick Beauchamps conclue en alertant les parents et souligne qu'il ne faut pas offrir ce type de jeux à des enfants trop jeunes, ne pas jouer n'importe où et mettre un tablier en coton pour se protéger.
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