Sur l'ensemble des filles interrogées, seules deux proposent une vision alternative quant à leur futur métier, l'une souhaitant être boulangère par choix, et l'autre imaginant un futur où elle serait émancipée par rapport à son mari et ses enfants.
Toutes les autres petites filles s'imaginent dans des métiers qu'elles considèrent comme typiquement féminins, comme puéricultrice ou secrétaire, mais qui ne correspondent pas à leurs rêves. Des métiers comme inspecteur ou docteur, parce que leur paraissant typiquement masculins, leur paraissent donc inaccessibles.
« Est-ce que tu sais ce que tu veux faire plus tard dans la vie ?
- Puéricultrice.
Et si tu avais été un garçon ?
- Inspecteur de police.
Et tu penses que tu ne peux pas être inspectrice de police en tant que fille ?
- Non ! [...] ça existe pas ça.
Ça existe pas tu crois ? Il y a des femmes dans la police.
- Oui, mais c’est des secrétaires »
Une résignation qu'on retrouve chez les petites filles au sujet de la répartition des tâches ménagères dans leur (futur) foyer.
« Avant ton travail, qu’est-ce que tu feras ?
- Le matin ? Le ménage.
Et puis en rentrant de ton travail, qu’est-ce que tu feras ?
- Les courses
Tu feras les courses ? Et après ?
- Le manger
Tu feras le manger ? Et après le dîner ?
- La vaisselle [elle rit] »
Les garçons, eux, ont leurs rêves bien plus près du coeur. Ils veulent devenir policiers, ingénieurs, polytechniciens. Se sentent-ils solidaires de leurs petites camarades qui manquent de confiance dans le choix de leur futur métier ? Ils semblent ne pas trop y avoir pensé, ou ne pas se sentir concernés par ce « problème de filles ».
Quant aux tâches ménagères, ils avouent pour la plupart, en toute ingénuité, ne pas trop s'en préoccuper.
En guise de conclusion, un petit garçon résume cette philosophie patriarcale encore bien prégnante en ces années 1970 de luttes féministes :
« Qu’est-ce que tu veux faire plus tard toi ?
- Je voudrais aller dans l’école Polytechnique [...] En rentrant, je me détends, j’aime pas travailler le soir.
Alors ça sera ta femme qui fera le travail ménager ?
- Non, puisque je crois qu’elle l’aura fait pendant la journée... »