"C'est avec une immense émotion que nous vous faisons part du décès de Raoul Cauvin, un des plus grands hommes du monde de la bande dessinée, survenu ce 19 août". C'est ainsi que les éditions Dupuis ont annoncé la disparition de l'un de leurs auteurs phares de bande dessinée. Ses plus grandes séries sont d'ores et déjà rentrées au Panthéon de la bande dessinée, comme, par exemple, "Les Femmes en blanc", "Pierre Tombal", "L'Agent 212", "Les Psy", "Cédric", sans bien-sûr oublier "Les Tuniques Bleues". Raoul Cauvin fonde cette BD en 1968 avec Louis Salvérius. "Les Tuniques Bleues" est une bande dessinée humoristique sur fond de guerre de Sécession. Elle va rapidement devenir l'un des best-sellers des éditions Dupuis, avec plus de quinze millions d'exemplaires vendus en français et d'innombrables traductions à travers l'Europe.
L'archive en tête d'article présente les auteurs de la BD en 1975. Willy Lambil assure alors la réalisation des planches, Cauvin est toujours le scénariste des aventures. Dans ce reportage réalisé pour l'émission jeunesse "Les visiteurs du mercredi", les deux artistes ont accepté d'être mis en situation... dans l'ambiance du Far West. Le scénariste de la BD et son dessinateur sont installés dans ce qui ressemble à un campement en plein milieu d'une plaine du Far Ouest. Assis dans un bivouac de fortune, le papa du Caporal Blutch raconte que chaque aventure est basée sur un fait authentique : "Que ce soient les guerres indiennes, où les tuniques bleues étaient directement mêlées, ou la guerre de Sécession, où les tuniques bleues étaient placées à l'avant-plan." Cette véracité permet aux amateurs de westerns de retrouver "des noms, des villes ou des endroits connus", ajoute-t'il. De quoi rendre accrocs les lecteurs.
Humour et véracité
Justement, dans une mise en scène étudiée, l'entretien est interrompu par une tunique bleue à vélo qui porte un message urgent aux deux auteurs : "Un plis de la part du général Grant…". Après cet intermède comique, Raoul Cauvin revient sur l'importance de l'humour dans ses albums impliquant souvent l'ignorance ou la maladresse du caporal Blutch et du Sergent Chesterfield...
Le duo d'auteurs est bien rôdé et Cauvin avoue aimer "écrire le scénario seul", tout en laissant à Lambil la liberté de dessiner comme il le souhaite. Mais pour le scénariste, chaque nouvelle histoire commencera par une phase de documentation essentielle à la véracité du scénario.
Un Indien interrompt à présent la conversation, l'occasion pour les deux hommes d'évoquer le triste sort des Indiens, regrettant qu'ils soient : "Toujours considérés comme les méchants alors que les méchants, c'étaient les blancs, qui les chassaient de leur territoire, qui ont tout fait pour les détruire…", déplore Cauvin. Quoi qu'il en soit, les Indiens sont plutôt bien traités dans la BD. Quant aux deux héros, ils ont chacun leur caractère, évoqué ici par Lambil. Il y a : "Le sérieux, le sergent et "le tire-au-flanc, le caporal. Il peut se montrer héroïque dans certaines situations mais au départ c'est un tire-au-flanc."
Un tire-au-flanc qui aura diverti des générations de lecteurs. Parfois malmené par la critique, le scénariste aux 50 millions d’albums laisse derrière lui quelques séries cultes. Des “Tuniques bleues” mais aussi “Sammy” en passant par “Cédric”, “les Psys” ou “Cupidon”.
Florence Dartois
Pour aller plus loin :
Les grands maîtres de la bande dessinée : "Les tuniques bleues". (15 avril 1981)