L’ACTU.
Le 11 octobre, les élus du Conseil de Paris ont voté pour demander à l’État de classer Monument historique la basilique du Sacré-Cœur, à Montmartre. Ce statut permet de protéger des bâtiments, des objets et des lieux en reconnaissant leur intérêt patrimonial. Il permettra notamment à la mairie de Paris de financer une partie des travaux que le site pourrait nécessiter. Le Sacré-Cœur a déjà le niveau inférieur de protection, obtenu en 2020, c’est-à-dire l’inscription au titre des Monuments historiques. Son classement, lui, avait été repoussé pour ne pas chevaucher les 150 ans de la Commune.
L’ARCHIVE.
Au moment de cette inscription au titre des Monuments historiques, en 2020, France 3 revenait sur l'histoire controversée de la basilique, construite à la fin du XIXe siècle. Avec son rang de deuxième monument le plus visité de la capitale française, son absence parmi les monuments historiques étonnait : « Aussi étrange que cela puisse paraître la basilique du Sacré-Cœur ne fait aujourd’hui pas partie de la liste officielle des presque 2000 Monuments historiques parisiens. »
Pourtant, reconnaître cette église monument historique fait polémique. D’abord pour des raisons architecturales, narrait l’archive en tête d’article. Laurent Roturier, alors directeur régionale des affaires culturelles d’Île-de-France, y expliquait : « Pendant longtemps, le regard sur le XIXe siècle a été un regard très critique sur la qualité architecturale, patrimoniale, de ce qui avait été construit à ce moment-là. » L'architecte, Paul Abadie, restaurateur de l'église de Saint-Front à Périgueux, s'était inspiré de ce monument pour imaginer le Sacré-Cœur.
Deux histoires peuvent-elles cohabiter en un même lieu ?
Mais c’est loin d’être le seul reproche fait à la construction. « Le Sacré-Cœur traîne depuis longtemps un autre poids, racontait le journaliste sur les images en noir et blanc du monument, celui de l’Histoire. » La colline de Montmartre est depuis longtemps un lieu de culte, notamment chrétien, après le martyre du premier évêque de Paris. Mais, ce fut à la suite de la défaite contre les Prussiens, en 1870, que la construction de la basilique fut décidée. « Pour expier les erreurs du passé », selon le journaliste.
L’année suivante, la colline fut l’un des théâtres de la Commune de Paris. Comme le montraient les photographies anciennes dans le reportage, « c’est là que le peuple s’empare des canons de l’armée. 25 000 communards seront massacrés en représailles. » Un événement tragique dont la basilique, construite seulement deux ans après, insulte la mémoire selon les défenseurs de la commune interrogés dans ce reportage : « on est en train d’honorer les bourreaux, mais on punit encore les gens de la Commune qui ont lutté pour une république universelle. »
Un conflit mémoriel, donc, que les élus du Conseil de Paris choisissent de laisser au passé, l'adjointe au patrimoine de la Ville arguant que « le classement comprend le square Louise Michel, qui porte le nom d'une grande personnalité de la Commune », permet de « faire dialoguer ces deux histoires sans oublier ni l'une ni l'autre. »