« Tu vois, tu as dit une réplique écrite par Molière, mais non pas une chose sentie par toi. Il faut que tu encaisses ce que Dom Juan vient de te dire, et que tu l'improvises […] Ce n’est plus Molière pour toi qui parle, mais toi, interprète, qui retransmet Molière. » Ce conseil d’un professeur à son élève, c’est François Florent, mort ce lundi 27 septembre à l’âge de 84 ans, qui le prodigue à une apprentie actrice au cours d’une leçon donnée en octobre 1964. Une archive exceptionnelle – c’est aussi la première interview de François Florent à la télévision – issue de l’émission « L’avenir est à vous », qui montre en quelque sorte « l’ancêtre » du cours Florent. Car à cette époque, la célèbre école de théâtre n’existe pas encore.
François Eichholtzer, né en 1937 à Mulhouse, devient François Florent en 1956, lorsqu’il débarque à Paris, un bachot de philo en poche et une première expérience théâtrale encourageante à Strasbourg. Accepté à l’Ecole nationale supérieure des arts et techniques du théâtre, plus connue sous le nom d’Ecole de la rue Blanche, il est employé pour des petits rôles à la Comédie française.
Rencontre
L’année suivante, en octobre 1957, il intègre le Conservatoire national supérieur d'art dramatique dans la classe de René Simon. La rencontre avec ce grand nom du théâtre va être déterminante pour le jeune comédien, qui comprend que sa véritable passion est l’enseignement de l’art dramatique. Après ses trois années d’étude au Conservatoire, il interprète différents rôles, principalement sur les planches.
En 1963, Annette Haas créée le Conservatoire municipal du XVIIe arrondissement pour répondre à la demande de la mairie de Paris qui souhaite démocratiser l’accès à l’enseignement artistique, et lui propose le poste de professeur d’art dramatique. C’est dans cette classe que nous le retrouvons, plus d’un après, dans l’archive en tête d’article.
Technique
François Florent, alors « le plus jeune professeur d’art dramatique de Paris » (il a 27 ans), explique au journaliste de « L’avenir est à vous » la nature de son enseignement. « Je crois qu’au départ, il faut découvrir des natures de théâtre. » Alors seulement, le professeur peut commencer à former son élève, comme un sculpteur malaxerait son argile : « [Leur] donner une technique, les astreindre à la discipline théâtrale, leur donner une diction impeccable, la connaissance des styles », tout un ensemble de connaissances qui rendront le comédien « multiforme », apte à jouer tout types de rôles. En plus de ces qualités « requises sur scène ou à l’écran », s’ajoutent selon François Florent des « qualités personnelles, ou parfois même des défauts personnels », qui feront souvent toute la différence : « Savoir frapper aux portes, avoir de l’entregent, du bagout, je crois que c’est très important. »
Toutes ces techniques, qui ne ressortent alors « pas du domaine de l’enseignement classique », François Florent les prolongera quelques années plus tard. En 1967, après avoir remporté plusieurs prix d’art dramatique avec son conservatoire du XVIIe arrondissement, le jeune professeur fonde le cours Florent, avec vingt-huit élèves.
Une école vite célèbre en France, qui va former plusieurs générations de comédiens, parmi lesquels Jeanne Balibar, Francis Huster, Jacques Weber, Jean-Pierre Darroussin, Isabelle Adjani, Daniel Auteuil, Édouard Baer, Dominique Blanc, Guillaume Canet.
Pour les créateurs de contenus
L'équipe de médiaclip, une offre de l'INA pour les pros, a sélectionné une archive de 2006 de François Florent.